5.3.1.1011Interaction Phase / Niveau

Comme la triple interaction n'atteint pas le niveau de significativité requis, les résultats sur l'interaction Phase / Niveau sont valables pour les deux groupes de sujets (figure 5.2, p. 11). Cette interaction nous indique que la performance n'évolue pas de la même manière au cours de l'expérience selon le matériel à retenir. Les effets observés sont identiques chez les sujets jeunes et âgés mais la performance des premiers est systématiquement supérieure à celle des seconds.

Lorsque l'encodage a été incident, on observe une plus grande facilité de rappel pour les paires de mots reliés que pour les paires de mots non-reliés, quelle que soit la relation (2,07 versus 4,37 et 3,93 respectivement pour les paires de mots non-reliés, avec une relation phonétique et avec une relation sémantique).

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Figure 5. 2 : Performance de rappel libre : interaction Phase / Niveau

Dans la seconde phase de l'expérience (encodage intentionnel), on retrouve l'effet préconisé par la théorie de la profondeur de traitement, à savoir une performance de rappel croissante avec le degré de relation entre les mots. Cependant, la différence entre le rappel des mots non-reliés et celui des mots reliés phonétiquement est marginalement significative (p=.09).

Lorsque les sujets procèdent à une classification à voix haute des stimuli dans les trois catégories (travail d'analyse), l'effet de profondeur disparaît : le rappel est équivalent pour les trois types de mots (2,96, 3,3 et 3).

L'inconstance de l'effet de profondeur de traitement au fil des consignes ne s'explique pas par une augmentation de la performance pour les mots plus difficiles à retenir, comme le suggérait notre hypothèse. En effet, la performance pour les mots non-reliés est similaire entre la mémorisation intentionnelle et la mémorisation incidente, et entre la mémorisation avec analyse et la mémorisation intentionnelle (respectivement, 2,07, 2,89 et 2,96 mots). La différence est significative à .08 entre la première et la troisième phase. De plus, pour les mots reliés phonétiquement, l'effet du travail d'analyse est plutôt négatif puisqu'on obtient une meilleure performance en mémorisation incidente (p=.03), la performance étant intermédiaire dans le cas d'un encodage intentionnel (respectivement, 4,37, 3,74 et 3,30 mots). Enfin, le travail d'analyse des stimuli abaisse la performance de rappel des mots sémantiquement reliés qui sont toutefois mieux retrouvés dans la seconde phase de l'expérience (respectivement, 3,93, 5,41 et 3 mots). Ainsi, la catégorisation des stimuli lors de l'encodage semble avoir un effet plutôt perturbateur qu'efficace pour le rappel libre. Outre la possibilité d'un effet de fatigue ou d'un manque d'effort de récupération volontaire (les sujets savent qu'ils seront soumis à une épreuve plus facile de rappel indicé), ce phénomène peut provenir de la charge mentale imposée par cette tâche, qui pourrait interférer avec le processus de mémorisation. Les résultats en rappel indicé devraient éclaircir cette question.

L'intention de retenir favorise donc principalement le rappel des mots sémantiquement reliés à condition que le sujet n'effectue pas un travail d'analyse concomitant lors de l'encodage ; les paires de mots les plus difficiles à retenir (non-reliés) ne subissent pas l'effet négatif du travail d'analyse. Ceci peut traduire un effort de la part des sujets vers la mémorisation (récupération) de ce type de mots au détriment du matériel plus facile.