5.5011Etude des erreurs de rappel

Le nombre d'erreurs de rappel restant assez faible (surtout en rappel libre), nous privilégierons l'analyse descriptive et globale en restant prudente sur les résultats tirés des analyses de variance.

5.5.1011Rappel libre

Nous avons déjà mentionné le faible taux d'erreurs lors de la tâche de rappel libre, qui s'associe à une faible performance. Le processus de rappel est sélectif et ne se déploie pas dans de multiples directions. C'est pourquoi les mots activés font généralement partie de la liste de présentation. Une analyse de variance sur le nombre d'erreurs avec un facteur intra-sujet (consignes) et un facteur inter-sujet (âge), révèle une tendance à l'interaction (F(2;50)=2,97, p=.06). Cette interaction se traduit par un taux d'erreurs plus élevé chez les sujets jeunes dans la première phase (encodage incident) relativement à toutes les autres conditions de l'expérience (annexe 5.9).

Une analyse qualitative des erreurs (tableau V.9) met en évidence les ressemblances entre les erreurs des sujets et des mots effectivement présents dans la liste. Par exemple, un sujet a rappelé à tort le mot « ombre» , probablement à cause de sa ressemblance phonétique avec le mot « oncle» réellement présenté. Généralement, les mauvaises réponses ne sont pas données au hasard mais reflètent dans la plupart des cas une certaine analogie avec les bonnes réponses. Les réponses répertoriées comme sans lien apparent sont celles qui ne ressemblent pas aux items originaux. Nous avons également différencié les erreurs selon leur caractère d'intrusions (nouveau mot) ou d'interférences (mot d'une liste antérieure). Il ne peut y avoir d'interférences lors de la première phase dès lors qu'aucune liste n'a été présentée auparavant.

Tableau V. 9 : Moyennes et typologie des erreurs de rappel pour chaque groupe d'âge et pour chaque épreuve de rappel libre (nombre total d'erreurs relevées dans l'échantillon).Les chiffres entre parenthèses indiquent le nombre de réponses qui reproduisent correctement la relation originale entre indice et cible.
Types de ressemblances Types de mots Reproduction

moyenne
par sujet
sans lien phonétique sémantique nouveau mot interférence inter-liste de la relation
originale
JEUNE
RL 1 1,357 2 12 (8) 5 (3) 19 - 11/19
RL 2 0,571 3 3 (2) 2 (2) 7 1 4/8
RL 3 0,571 5 1 (1) 2 (1) 4 4 2/8
AGE
RL 1 0,462 4 1 (0) 1 (1) 6 - 1/6
RL 2 0,769 6 2 (1) 2 (2) 8 2 3/10
RL 3 0,692 6 1 (1) 2 (1) 5 4 2/9

A partir de cette classification des erreurs, nous constatons deux faits qui ne sont certainement pas indépendants :

  1. Les sujets jeunes donnent plus de réponses liées à des items existants que les personnes âgées lors de l'étape d'encodage incident. Sur 19 erreurs répertoriées, 17 présentent sans ambiguïté une relation de type phonétique ou sémantique avec un mot de la liste et 11 reproduisent une relation véritablement présente. Les sujets âgés semblent plus prudents et donnent moins de réponses erronées. Cette donnée suggère une certaine prise de conscience de la nature du matériel chez les personnes jeunes assortie d'une prise de risque plus grande. Au fur et à mesure des consignes d'encodage, le nombre d'erreurs diminue chez les jeunes et devient ainsi comparable dans les deux groupes. De plus, en avançant dans l'expérience, les erreurs de rappel faites par les jeunes présentent de moins en moins de relation avec des items originaux.

  2. Le nombre d'interférences entre listes est rare. Dans la dernière phase de l'expérience, les erreurs se répartissent équitablement entre intrusions et interférences. Les interférences étant principalement classées comme non-reliées à des items existants, cela explique la légère augmentation d'items non-reliés à des mots existants au fur et à mesure des consignes.

Bien que relatifs à un nombre très faible de données, ces résultats témoigneraient d'une cohérence plus robuste des réponses des jeunes, donc d'une connaissance plus réaliste du contenu mnésique, ou encore d'un traitement plus élaboré lors de l'encodage. Les jeunes tendent à fournir des réponses erronées plus proches de la réalité. Les seniors voient moins clairement les relations entre les mots des paires et ont plus de difficulté à trouver des réponses qui reproduisent ces relations. Elles sont sujettes aux intrusions sans lien avec le matériel original, ce qui évoque soit un certain déficit de métamémoire (une connaissance imparfaite du contenu mnésique), soit une incapacité à activer volontairement des fragments d'information contextuels exacts bien qu'insuffisants pour accéder définitivement à la trace, soit encore un traitement originel des stimuli moins élaboré. Notons également l'éventualité d'une différence entre jeunes et âgés dans le risque accepté lors de la production des réponses.