7.4.2.1011Fréquences de choix de chaque attribution selon les groupes

La figure 7.6. (page 583) illustre, pour chaque groupe expérimental, la proportion de sujets ayant choisi chacune des réponses possibles pour expliquer sa performance (détail en annexe 7.6).

Nous constatons tout d'abord que les items relatifs à la chance (ou hasard) sont très peu sélectionnés (2 sujets sur 111) comme causes éventuelles du niveau de performance atteint. Ils ne constituent donc pas des attributions externes plausibles dans ce type d'expérimentation : les sujets ne croient pas à l'intervention du hasard dans leur comportement pour cette tâche de laboratoire.

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Figure 7. 6 : Proportions de sujets ayant choisi chacune des attributions causales de la performance en fonction du groupe. 1. chance générale -, 2. chance spécifique +, 3. chance générale +, 4. motivation -, 5. chance spécifique -, 6. intérêt -, 7. forme générale +, 8. facilité de la tâche (tâche +), 9. stress - (stress), 10. entraînement habituel +, 11. attention +, 12. temps +, 13. stress + (sérénité), 14. motivation +, 15. entraînement -, 16. forme générale -, 17. capacité +, 18. intérêt +, 19. capacité -, 20. efforts +, 21. difficulté de la tâche (tâche -), 22. efforts -, 23. attention -, 24. temps -, 25. stratégies, 26. caractéristiques de la tâche.

Un certain nombre d'autres explications sont choisies par moins de 10% de l'échantillon total (tableau VII. 8, p. 127) : une bonne forme générale (2 sujets), une faible motivation (4), la facilité de la tâche (4), un faible intérêt (6), un fort entraînement habituel de la mémoire (8), un haut niveau de stress (9), le temps passé sur l'étude du matériel (10) et un bas niveau de stress (11). On notera que cinq de ses huit items relèvent du domaine des explications conatives (qui comprend lui-même huit items). Ainsi, pouvons-nous dire que l'origine de la performance semble peu située dans la sphère des affects et des motivations. De plus, rares sont les sujets estimant que leur performance provient de la facilité de la tâche (à raison), du temps passé sur le matériel (temps qui était par ailleurs imposé par les consignes chez 73 sujets) et de leur bon entraînement mnésique. Les faibles effectifs associés à ces choix ne nous permettent pas de discerner de différences provenant des caractéristiques des groupes.

Parmi les items choisis par plus de 10% de l'ensemble des sujets (14 items), il est plus aisé de repérer des écarts systématiques entre groupes. On peut classer les réponses en quatre catégories :

  • égalité dans les trois groupes : attribution de la performance à une forte motivation (proportions respectives de .135, .139 et .158),

  • dissociation entre le groupe intentionnel et les groupes incident et contrôle ; attribution de la performance à une bonne mémoire (resp. .162, .000 et .211), à un faible entraînement (.135, .278 et .132) ; dans les deux cas, les sujets du groupe intentionnel tendent à développer des explications qui déprécient leur propre personne,

  • dissociation entre le groupe contrôle et les deux groupes soumis à la tâche d'orientation ; attribution de la performance à une mauvaise capacité de mémoire (resp. .189, .194 et .105), à l'attention (.108, .111 et .316), au manque d'attention (.405, .444 et .289), à un haut niveau d'intérêt (.162, .111 et .263), aux stratégies d'étude du matériel (622, .694 et .974), aux caractéristiques de la tâche (.946, .861 et .447) ; dans tous les cas, les explications fournies par les sujets du groupe contrôle soulignent le rôle du sujet sur la performance alors que les attributions faites par les deux autres groupes privilégient des facteurs externes ou des facteurs à connotation négative.

  • effectifs hiérarchiques ; attributions de la performance aux efforts (.216, .111 et .316), au manque d'efforts (.270, .361 et .184), à la fatigue (.135, .306 et .211), à la difficulté de la tâche (.243, .389 et .053), au manque de temps (.459, .667 et .289) ; les réponses présentant un facteur perturbateur sont toujours plus fréquemment choisis par les sujets du groupe intentionnel alors que le seul item où la variable mentionnée devrait avoir un effet positif (efforts) est moins fréquemment sélectionné par ces mêmes sujets ; les réponses du groupe contrôle sont toujours éloignées de celles du groupe intentionnel ; l'explication de la performance par la fatigue constitue la seule exception à cette règle : les sujets du groupe incident sont moins nombreux à accepter cette explication que les sujets du groupe contrôle.

La simple observation des effectifs pour chacune des explications causales de la performance nous amène à conclure que les conditions expérimentales influencent l'orientation que les sujets donnent à l'explication de leur performance. Ainsi, il semblerait que les attributions reflètent assez bien une analyse objective des conditions expérimentales. Les sujets du groupe contrôle avaient une meilleure maîtrise de leur processus de mémorisation, alors que les autres sujets étaient soumis à de fortes contraintes extérieures ; ces faits ressortent dans les attributions. Le groupe de sujets soumis à la tâche de décision et avertis du test de mémoire futur se distingue nettement par son patron d'attributions : relativement au groupe incident, il favorise les causes internes négatives (dépréciant sa personne) ou les causes externes impossibles à maîtriser, et il délaisse les causes internes positives. Ce résultat plaide à nouveau en faveur d'un éventuel conflit entre avertissement préalable à propos du test et performance médiocre provenant des contraintes expérimentales. Avertis au départ, les sujets ont plus de difficulté à attribuer leur performance (jugée mauvaise) à des éléments de l'environnement et se retournent contre eux-mêmes. Tout se passe comme si l'avertissement de départ fournissait un sentiment de contrôle assorti d'une obligation de résultats en occultant le rôle des facteurs extérieurs sur le niveau de performance.