7.6011Auto-évaluation quotidienne de la mémoire

Le dernier « test» que nous avons utilisé est le questionnaire d'auto-évaluation de la mémoire quotidienne développé par Sunderland, Harris et Baddeley (1983) qui apparaît intégralement dans la traduction de l'ouvrage de Baddeley (1990 / 1993a). Ce questionnaire de métamémoire est utilisé pour évaluer la perception qu'ont les individus de leur efficience mnésique quotidienne. Baddeley mentionne les notes moyennes fournies par un échantillon de sujets normaux (anglophones) pour chacune des 28 questions de cet outil. Nos données pourront être directement confrontées à cette référence théorique.

Dans ce questionnaire, le sujet doit évaluer, sur une échelle originale, la fréquence d'occurrence de vingt-huit situations d'échecs dans différents domaines de la mémoire quotidienne (annexe 7.1). La plupart des problèmes présentés pour l'évaluation décrivent des échecs qui peuvent arriver de façon normale à la majorité des gens (oublier l'endroit où est posé un objet, oublier d'emporter quelque chose, de transmettre un message, diverses répétitions d'actions ou de messages, avoir un mot sur le bout de la langue, oublier ou déformer les événements et les messages...). Quelques items traduisent des problèmes sévères de mémoire ; notamment, ceux qui portent sur l'impossibilité de reconnaître des proches (item n°11), sur l'oubli des détails importants concernant la personne (item n°19), sur l'oubli de détails survenus la veille (item n°15), de détails de choses faites régulièrement (item n°22), sur la désorientation dans un lieu connu (item n°25a)... Les auteurs ont regroupés les items en cinq catégories selon qu'ils présentent des problèmes de langage, de lecture / écriture, de visages et lieux, d'actions et de nouveaux apprentissages.

L'objectif de ce questionnaire entre bien dans le cadre de la connaissance que les gens possèdent sur le fonctionnement de leur mémoire. Mais la métamémoire mesurée par un tel outil paraît bien éloignée de celle qui est appréhendée dans les tâches de laboratoire où les personnes doivent prédire ou évaluer leur performance. Cet outil est « écologique» dans le sens où il s'adresse à des comportements rencontrés par le sujet au cours de ses activités journalières. L'inconvénient d'un tel questionnaire réside dans l'impossibilité de confronter les évaluations recueillies avec les comportements réels puisqu'il se base intégralement sur les rapports verbaux. Nous avons discuté, au chapitre 2, des problèmes associés à l'utilisation de telles verbalisations (Ericsson et Simon, 1980) ainsi que des problèmes inhérents aux jugements de fréquence d'occurrence, sensibles à un certain nombre de biais désormais avérés (Kahneman et al., 1982). Pour l'heure, notre objectif est de confronter ce nouveau type d'auto-évaluation avec les données recueillies en laboratoire. Cette confrontation nous permettra de vérifier l'hypothèse d'une relation entre la métamémoire générale (efficacité perçue de la mémoire quotidienne), la performance mnésique et les jugements émis au cours d'une situation spécifique de mémoire (hypothèse 3.4.).