1.2.1.2 Observations et intuitions initiales

On l’aura déjà constaté, la question de l’espace appelle très vite la prise en compte de celle de la temporalité. Si le développement de l’expérience humaine dans le double référentiel temporo-spatial impose a priori ce corollaire général, c’est bien plus la problématique propre à la majorité des institutions étudiées ici qui en fît pour nous un passage obligé, sur la base des plusieurs observations portant sur la pré-histoire et l’histoire de et dans l’institution. Trois constats sont en effet apparus comme particulière-ment signifiants quant au fonctionnement des institutions étudiées. Le premier porte sur la dimension historique de l’institution, et impose de s’interroger sur la temporalité dans une perspective très particulière du vécu institutionnel. Le deuxième amène à considérer la place débordante du mortifère et de la répétition au quotidien. Le troisième et dernier concerne l’importance conférée à la dimension spatiale, et ce à de multiples niveaux.

L’ampleur de chacune des problématiques soulevées devait nous conduire à rester humble... pourtant l’intuition sourde d’une profonde et complexe intrication de ces trois questions de la temporalité, du mortifère et du spatial nous a engagés dans un premier travail visant à faire émerger la nature possible du lien qui semble les solidariser si puissamment dans la matière même de l’architecture de l’institution.

« ‘Il est juste de dire que le handicap est aussi question, recherche et mise ’à la question’. Il est un peu ’le sphinx’ de la tragédie. Il fait question et introduit, face à l’énigme, en position d’OEdipe, plus qu’en celle du devin Tiresias, lié et exposé, handicapé puis mutilé [...], soumis à la question [...], meurtrier et errant [...]. Le handicap interroge et renvoie à questionnement de vérité. La réponse n’est pas dans le handicap. S’il en est, elle est enfouie dans celui qui se laisse interroger – jusqu’au bout – par le handicap’ » (Morvan J.S., 1997, p. 219, s/n). C’est en nous laissant pareillement interroger qu’ont émergé, mêlées à nos premières observations, les intuitions sur lesquelles se trouve fondée notre problématique.

Le lecteur nous permettra alors de laisser encore libre court à notre plume pour restituer la réflexion fertile issue de cette analyse ’flottante’. D’une première formulation – à l’origine nécessairement encore très vague – cette phase de travail a permis de donné naissance, par une certaine liberté de la pensée, débrayée un temps de la rigueur méthodologique du processus de recherche et alimentée aux sources de l’imaginaire, à autant d’inférences propres à engager la mise en mot de la problématique et à affiner le libellé de nos hypothèses.