3. 5. 2. 1. Tuhana

Plusieurs inscriptions ont été trouvées à Ivriz, à Bor, à Bolkarmaden, à Andaval, à Niğde.

Les inscriptions d'Ivriz et de Bor sont au nom d'un certain Warpalawas/Urballa de Tuwana/Tuhana 707 . Celles d'Andaval et de Niğde signalent un nommé Saruwanas, "ruler, lord of the city Nahitia" (Niğde) 708 . Il peut s'agir d'un vassal de Warpalawas. A Andaval, une inscription sur un relief mentionne Nahitaāwanàś, Saruwanas et Warpalawas 709 .

L'inscription de Çiflik mentionne Kubaba et Saruwas :

‘"On the one hand Tarhunzas and Hebats (sits),
(and on the other) Ea and Kubaba (sits)
and on the other Saruwas and Alasuwas sits." 710

Kubaba est mentionnée aussi à Carchémish, elle serait probablement équivalente à l'appellation Cybèle 711 . Á Bolkarmaden, nous lisons le nom de Tarhunasis qui serait lui aussi un vassal de Warpalawas 712 . Ces inscriptions permettent de définir une partie du territoire de Tuhana, car ces souverains dépendent tous de Warpalawas. Celui-ci est connu par les textes assyriens comme l’un des tributaires de l'Assyrie sous Tiglat-Pileser III, il est aussi un allié de Midas contre Sargon II 713 . Il existe donc des relations assez étroites entre Tuhana et la Phrygie. L'étude de la toponymie a révélé des noms d'origine hittito-louvite ou pré-hittito-louvite : Tuwanuwa = Tyane, Nahitiya = Niğde 714 .

Le terme de royaume de Tabal apparaît seulement dans les sources assyriennes. Il correspond à l'un des royaumes des royaumes de Tabal, appelé peut-être aussi Bit-Burutaş 715 . Ce territoire pourrait correspondre à deux réalités, l’une géographique et l’autre politique 716 . Le territoire géographique s’étendrait entre Kayseri, Nevşehir, Aksaray, Ulukışla et Niğde. Il est défini enpartie par la répartition des inscriptions mentionnant Wasusarmas et Tuwatis. Il est difficile d'établir avec certitude s'il correspond au territoire sousdomination tabalienne.  Le territoire politique est régi par Wasusarmas et son père Tuwatis ; il occupe uniquement la partie septentrionale de Tabal 717 . Wasusarmas est contemporain de Warpalawas, il fait partie des tributaires de Tiglat-Pileser III en 738. Wasusarmas et son père Tuwatis réclament le titre de "Grand Roi", issu de la titulature hittite 718 et sont peut-être les descendants d'Hartapu 719 .

A Aksaray, une stèle mentionne le nom de Kiyakiyas, qui serait peut-être l'équivalent de Kiakki de Šinuhtu dépossédé par Sargon en 718 720 . Le nom Kiyakiyas de Šinuhtu se trouve à Aksaray ainsi qu'à Kululu sur des bandes de plomb, sous le nom Kiyaki. Il pourrait être équivalent à Kikki ou Kiakki fils de Tuatte des textes assyriens de Salmanazar III en 837. Ceci impliquerait la proximité de Šinuhtu, mais son emplacement dépend de celui d'Atuna-Tunna.Une inscription mise au jour à Sultanhan dit :

‘"Whosoever …ed this place
no one strengthened it,
but Sarwatiwaras did it by the help and goodness of Wasusarmas" 721

Ce site appartenait donc au giron de Wasusarmas. Rappelons qu'en 837, Salmanazar III compte parmi ses tributaires vingt-quatre rois de Tabal. Sous Sargon II, dans les formules de Kululu I et de Çiftlik, les auteurs sont les vassaux de Tuwatis 722 .

Á cette période, l'Assyrie joue un très grand rôle dans la politique intérieure du pays de Tabal. En 732-729, Wasusarmas ne paie apparemment pas de tribut, il a de fait été déposé au profit d'Hulli, fils "de personne". Il semble avoir été installé sur le trône par Sargon II, après avoir été déporté en Assyrie par Salmanazar V (726-722). Son fils Ambaris lui succède ; il est roi du pays de Tabal et il est marié à une fille de Sargon II. Il semblerait qu'en 713, Ambaris soit déporté à son tour. Le pays de Tabal deviendrait une province assyrienne sous l'autorité de la fille de Sargon. Pour les années 710-709, nous avons examiné plus haut une lettre de Sargon au gouverneur provincial de Què à propos de la position difficile des rois de Tabal qui sont pris entre la Phrygie et l'Assyrie devenues alliées. Il y a plusieurs rois de Tabal mais nous reconnaissons seulement le nom d'Urballa-Warpalawas. Á la mort de Sargon en 705, Tabal passe sous la coupe directe de l'Assyrie 723 .

Une inscription découverte à Topada porte le nom de Wasusarmas ainsi que la titulature de ce souverain, puis :

‘"Against me in Parzuta there were seven king(s) of lesser and greater rank...
and three kings were favourable to me...
The names of the three kings follow." 724

Les trois rois alliés de Wasusarmas sont Warpalawas de Tuhana, Kiyakiyas de Šinuhtu et Ruwatas, ce dernier étant vraisemblablement inconnu ailleurs. Les ennemis ne sont pas cités mais il s'agit du pays de Parzuta qui serait Purushattum en ancien assyrien, équivalent aussi de Pars(u)hunta/Parsuhanda/ Purushanda. Ce pays aurait été circonscrit aux environs d'Acemhöyük ou plus probablement de Karahöyük (Konya) 725 .

Á Sultanhan, à Kayseri et à Suvasa, les dirigeants sont aussi des vassaux de Wasusarmas 726 .

Les inscriptions de Kululu II, Bohça, Erkilet I et II, Eğriköy n'ont pas fourni d'informations quant à l'appartenance politique de leur souverain. Malgré cela, à Bohça nous trouvons les noms d'Askwisis et de Kurtis dont il est possible qu'ils soient cités dans les textes assyriens sous les formes Ushitti et Kur-ti, pl. 13 727 .

Une inscription découverte à Karaburun livre un autre nom de roi : "Sipis the king" qui est aussi "Sipis Nis's son". Ces phrases ont été gravées lors de la restauration de la citadelle et de sa porte. Ce roi semble ne gouverner que sur un territoire restreint, c'est l'un des nombreux rois du pays de Tabal 728 . On constate par ailleurs, à l’examen de ces textes, que l’état de Tabal était probablement divisé en une série de petits Etats parfois pas plus grand qu’une ville 729 .

Notes
707.

POSTGATE, 1973, 13-36.

708.

HAWKINS, 1969, 103.

709.

USSISHKIN, 1967, 198.

710.

HAWKINS, 1981, 177.

711.

Ibid., 178.

712.

HAWKINS, 1969, 105.

713.

MELLINK, 1979, 249-257. Cf. 3. 3. 4. Tiglat-Pileser III (744-727). 3. 3. 5. Sargon II (721-705).

714.

BRIXHE, 1991, 37-46.

715.

JASINK, 1995, 128.

716.

Ibid.

717.

WÄFLER, 1983, 181.

718.

HAWKINS, 1969, 108.

719.

HAWKINS, 1994, 91-94.

720.

MELLINK, 1982, 566. Cf. 3. 5. 2. 2. Atuna.

721.

HAWKINS, 1975, 141

722.

HAWKINS, 1969, 99-109.

723.

HAWKINS, 1979, 153-167.

724.

Ibid., 166.

725.

HAWKINS, 1992, 259-275.

726.

Ibid., 275.

727.

HAWKINS, 1979, 166. Cf. Pl. 16. Carte de répartition des inscriptions louvites.

728.

Ibid., 167.

729.

JASINK, 1995, 129.