7. 2. 5. Boğazköy : Phrygiens ou centro-anatoliens

Le site de l'ancienne capitale hittite est celui qui dispose du plus grand nombre d'indices pour une phrygianisation dès le VIIIe siècle, en raison de la présence d'inscriptions. Les inscriptions monumentales mentionnent des monarques et Cybèle ¹⁶²⁷ . Il existe peu d'objets représentant la culture phrygienne à Boğazköy : on peut se référer à certaines catégories de céramique peinte (avec des lignes ondulées ou des décors géométriques) du VIIIe siècle et à des vases imitant les caractéristiques de la vaisselle métallique ¹⁶²⁸ . Plusieurs dons votifs proviennent d'un lieu de culte phrygien à l'extérieur du propylée du temple I (hittite) ¹⁶²⁹ , à Boğazköy ; notamment trois bols avec des attaches phrygiennes typiques avec tige et bobine près du bord, imitations en céramique d’originaux en bronze. Les cratères de type Alişar sont occasionnels à Boğazköy alors qu'ils sont rares à Gordion ¹⁶³⁰ . Les proportions dans la distribution des productions chamois et grises sont différentes de celles de Gordion. Les similitudes entre les deux sites en ce qui concerne la céramique peinte sont limitées, les imitations peu nombreuses comme les importations et les exportations. Sams pose Boğazköy en candidat à une présence phrygienne du fait de l'existence d'éléments phrygiens dès le VIIIe siècle malgré les différentes inscriptions datant du VIIe siècle au plus tôt, à une époque où plusieurs aspects de la culture phrygienne se sont répandus vers l'est ¹⁶³¹ . Cette idée est partagée par certains chercheurs de Boğazköy ¹⁶³² . Bittel réfute, pour sa part, l'hypothèse d'une empreinte phrygienne ¹⁶³³ . Les productions céramiques découvertes à Büyükkale et à Büyükkaya ressemblent à celles d'Alişar mais avec des détails très différents, notamment un très petit nombre de cervidés ou d'autres animaux. Les formes les plus fréquentes sont des assiettes, des jarres, des profils en S. Les exemplaires que nous venons de mentionner ne sont pas faits au tour ¹⁶³⁴ . L'une des hypothèses propose que ces productions soient les précurseurs de la céramique peinte d'Alişar ¹⁶³⁵ . Les pattes et le ventre du cervidé sont beaucoup plus réalistes à Boğazköy, de plus les cercles concentriques y sont souvent absents. La peinture est brun foncé à brun, la couleur de surface grise à gris-beige. On suppose donc une cuisson en atmosphère réductrice.

La céramique de Boğazköy semble avoir des parallèles à Eskiyapar, à Maşat Hüyük et à Alaca. Le sud du Halys n'est pas bien documenté mais à Göllüdağ, Tepebağları et Porsuk, on retrouve des éléments de comparaison. Le corpus céramique montre que les productions ciliciennes ont peu de connexions avec les productions centro-anatoliennes.

L'essentiel de la céramique issue des fouilles de Büyükkale n'a pas été publié. Cette publication ¹⁶³⁶ devrait paraître incessamment, mais au moment où nous écrivons, il ne nous a pas été possible d'en prendre connaissance. Cette lacune rend très difficile l'examen des données de Boğazköy, Büyükkaya pouvant être juste antérieur aux premiers niveaux de Büyükkale I et II. Les différents rapports de fouilles rendent compte de la présence de cruches à embouchure trilobée, d'amphores, de pithoi, de vases et de couvercles à décor plastique ¹⁶³⁷ . Mellink a suggéré que la céramique peinte était empreinte de tradition hittite ¹⁶³⁸ . Comme l'a déterminé Sams, il semble qu'aux IXe et VIIIe siècles sur le plateau anatolien les productions céramiques avaient un "air de parenté" en même temps que des différences régionales. Il nous paraît concevable que Boğazköy, malgré la proximité d'Alişar, ait été le foyer d'un centre de production régional.

Le Fer ancien se diviserait en trois phases ¹⁶³⁹ au vu de la stratigraphie, les deux premières ont été examinées en première partie de l'étude sur la céramique ¹⁶⁴⁰ . La phase la plus récente de Büyükkaya serait antérieure ou contemporaine à Büyükkale I, laquelle serait elle-même antérieure à la datation attribuée jusqu’alors (peut-être du IXe siècle si la date de cette couche est reculée ou plutôt du VIIIe siècle) ¹⁶⁴¹ . Les vases à décor peint en noir ressemblent à des productions de Gordion, ainsi les bols avec des motifs géométriques sur les bords qui se trouvent aussi à Kaman, pl. 411-418 ¹⁶⁴² . Ils sont associés à une céramique unie grossière dont certaines formes se retrouvent aux périodes antérieures. Tous ces vases sont non tournés, certains sont de couleur chamois. Les dégraissants sont de la chaux en faible proportion ou du gravier fin, les tons sont rouge clair, brun clair et beige, les surfaces sont partiellement polies. Dans le même contexte, les tessons brun foncé sont fréquents. Les jarres hittites à bec très saillant sont fréquentes au Bronze ancien et moyen, on ne les retrouve plus au Bronze récent mais elles se retrouvent de nouveau au Fer. On rencontre aussi de la poterie semblable à celle d’Alişar 4c mais différente dans les détails. Il existe peu de représentations de cervidés ou d’autres animaux. Les formes les plus fréquentes sont des assiettes, et des bols dont les profils sont en forme de S, pl. 162 ¹⁶⁴³ .

Il apparaît, grâce à la stratigraphie, qu'au moins une phase dans laquelle aucune des céramiques n’est tournée ¹⁶⁴⁴ , date du IXe siècle, juste avant les premiers niveaux de Büyükkale. L’assemblage ressemble aux poteries des niveaux 4 d’Alişar, comme si ces productions avaient un ancêtre commun. Mais les vases grossiers faits à la main avec des boutons sont assez répandus. La décoration peinte est uniquement monochrome. Les représentations de silhouettes d’animaux sont très rares ¹⁶⁴⁵ . Malgré les similitudes entre Büyükkaya et Alişar, les différences sont donc importantes.