9. 2. 5. La zone culturelle d'Alişar

Les sources écrites

L’organisation politique d’Alişar est inconnue et l’on ne sait pas comment ce site est hiérarchisé (vassal ou suzerain), par rapport aux sites voisins comme Boğazköy. Les relations entre les différentes puissances sont difficiles à établir mais elles peuvent être attestées par des inscriptions (Ivriz, Bor, Andaval), des objets ou des traces invisibles de nos jours (contacts directs entre les individus). Pour ce qui est de l'appartenance politique d'Alişar, aucun élément ne permet de déterminer si un roi y régnait. Les inscriptions en langue louvite 2218 sont, pour la plus grande part, répartis en terre du royaume de Tabal jusqu'à l'aire culturelle d'Alişar, bien que ce site n'en possède pas. Selon Sams, Alişar appartenait aux royaumes de Tabal, qu'il considère comme une extension de la sphère syro-hittite 2219 . Les échanges culturelles se faisaient plutôt vers le sud.

Il est difficile d'établir si la région d'Alişar était sous la domination de la population appelée, dans les textes assyriens, Mushki 2220 . Selon Mellink 2221 , la présence d'inscriptions louvites serait une attestation de la présence Mushki. Jusqu'à présent, il a été impossible d'affirmer que les Mushki et les Phrygiens sont une même population et il est vraisemblable qu'il n'y aura pas de réponse définitive tant qu'aucun texte ne sera mis au jour. Certains chercheurs demeurent partisans de deux entités 2222 tandis que pour d'autres 2223 l'équivalence est évidente. Il apparait que les Mushki sont présents en Turquie du sud-est aux environs de 1115 2224 . L'équation Mita = Midas donc Mushki = Phrygiens est invérifiable dans la mesure où le même souverain a pu régner sur deux peuples différents : Phrygiens à l'ouest et Mushki à l'est 2225 . Comme pour l'équivalence entre les populations, il nous semble qu'en l'absence d'argument scientifique, il est impossible de se prononcer avec certitude. L'utilisation de la céramique d'Alişar désignée par Muscarella comme Mushki 2226 pour étayer l'hypothèse d'un territoire phrygien s'étendant dans le nord de l'Anatolie centrale nous semble peu recevable. Comme Summers nous nous opposons à ce postulat, en considérant qu'il serait "phrygiocentrique" et peu scientifique en l'absence de matériel comparatif de restreindre ainsi l'appellation 2227 . D'après les recherches dans le cadre de la construction du barrage du Keban en Turquie du sud-est, certaines productions antérieures aux productions urartéennes seraient Mushki. Sevin retrouve du matériel comparable dans la zone d'Elazığ 2228 .

Certains chercheurs 2229 ont proposé d'établir des liens entre la région d'Alişar, Tabal et la province hittite sécessionniste de Tarhuntašša, en raison de la présence d'inscriptions louvites et du territoire occupé. La nature de cet héritage culturel, comme pour la question des Phrygiens-Mushki, ne pourra être reconnue que par l'apport de données textuelles irréfutables. Boğazköy pourrait être le meilleur candidat pour une présence phrygienne à l'est dès le VIIIe siècle, du fait de la découverte d'inscriptions phrygiennes et de céramique.

Notes
2218.

Cf. Pl. 16. Carte de répartition des inscriptions louvites. PRAYON, 1994, Karte 18.

2219.

SAMS, 1994, XXXI.

2220.

Cf. Chap. 3. Sources écrites. 3. 3. Sources assyriennes. 3. 3. 1. Tiglat-Pileser

2221.

MELLINK, 1965b, 322, 325.

2222.

MELLINK, 1965b, 317-325.

2223.

POSTGATE, 1973, 13-36.

2224.

Cf. Chap. 3. Sources écrites. 3. 3. Sources assyriennes. 3. 3. 1. Tiglat-Pileser

2225.

MUSCARELLA, 1988a, 177-182.

2226.

Ibid.

2227.

SUMMERS, 1994, 245.

2228.

SEVIN, 1991b, 87.

2229.

YAKAR, 1993, 14.