1.2.3 Prototypes

Reprenant les travaux empiriques antérieurs sur l’organisation interne des catégories, Rosch (1976) établit que tous les exemplaires d’une même catégorie n’ont pas le même statut, en ce sens qu’un certain nombre d’entre eux – prototypiques - regroupent le maximum de traits communs aux exemplaires contenus dans une catégorie alors qu’ils en partagent un minimum avec les exemplaires des autres catégories. En cela, ils semblent obéir à des principes identiques à ceux qui régissent les catégories du niveau de base, de sorte que le continuum apparent des catégories naturelles peut en réalité être cognitivement séquencé en items qui diffèrent par leur degré de prototypicalité.

‘’Ainsi les prototypes peuvent se définir comme les membres d’une catégorie qui reflètent la tautologie structurelle de la catégorie en tant qu’ensemble’ (Rosch et al., 1976 ; p. 433). ’

C’est ainsi que le concept de prototype permet à Rosch d’expliquer les variations observées chez les sujets lors des expériences de jugement d’attributs. Le prototype devient potentiellement et cognitivement commode puisqu’il leur permet par comparaison, de catégoriser sans avoir recours au calcul de validité d’indices individuels, tout en intégrant leurs connaissances sur la structuration du monde. Dans le même temps, l’explication qu’elle donne des variations individuelles, introduit ipso facto une organisation des objets à l’intérieur des catégories, semblable à celle qui structure les catégories dans la taxonomie.

‘’Ainsi de la même façon que l’ignorance sélective et l’expertise à propos des catégories créent des discontinuités dans la catégorisation à l’intérieur d’une taxonomie, la variation des classes de niveau de bases et leur codage en termes de prototypes créent incontestablement des discontinuités de catégorisation à l’intérieur des catégories du niveau de base’ (ibid. p. 434). ’

On peut donc prétendre que le pingouin, le homard ou le palmier constituent des classes différenciées de ce qu’on pourrait supposer être des classes de niveau de base en matière d’oiseau, poisson et arbre. La structure de l’organisation des objets à l’intérieur des catégories est en cela semblable à la structure de l’organisation des catégories à l’intérieur de la taxonomie. Rosch introduit ainsi une sorte de gradient dans la répartition des classes d’exemplaires à l’intérieur d’une catégorie, en référence à une classe des prototypes. C’est le passage de l’application initiale de ce gradient à des classes d’objets, aux objets eux-mêmes ultérieurement, qui va permette à Rosch de définir le concept de typicalité des exemplaires.