7.5 Conclusion

En dehors de la confirmation des hypothèses de départ, les éléments les plus saillants de ce chapitre proviennent du comportement particulier des sujets pour certains critères.

Le critère ’inclusion catégorielle’ tout d’abord, qui ne permet pas de départager les ’patients’ et les ’témoins’, quelle que soit la consigne et la catégorie. Par ailleurs, ce critère est le plus fréquemment retenu par les ’témoins’ pour effectuer la tâche de catégorisation. Nous ne pouvons écarter les effets du protocole sur le comportement des sujets, mais nous notons également que ce phénomène a également été décrit par Hilaire (2000a), lors d’une tâche de dénomination. Ceci tendrait à signifier que quelle que soit la position théorique que l’on assigne aux catégories (qu’elles soient établies ’quelque part’ et que l’on mesure l’ajustement des réponses des sujets à ces entités pré-existantes, ou que ce soient les réponses des sujets qui établissent les catégories pour reprendre Dubois, 2000, p. 57) il n’en est pas moins incontournable que tout sujet structure les objets du monde en catégories. Nos données inclinent à penser que la construction des catégories relève en réalité d’une articulation entre l’expérience de l’individu (perceptive, représentative) et ses connaissances linguistiques (conceptuelles). Le fait que des sujets confrontés à une déstructuration de leurs capacités lexico-sémantiques aient tendance à se comporter comme des sujets que l’on soumet à des tâches de catégorisation d’objets pour lesquels il n’existe pas de noms spécifiques (odeurs, bruits) est un argument de poids dans ce débat.

L’étude du critère ’script’ en est un autre. Il est en effet celui qui divise le plus les ’témoins’ et les ’patients’. Par ailleurs il est celui auquel les ’patients’ se réfèrent le plus pour effectuer la tâche de catégorisation et qui résiste globalement aux effets de consigne, de catégorie et de re-test. Il s’agit, bien entendu, d’un effet de ’recontextualisation’ déjà décrit chez les sujets atteints de la maladie d’Alzheimer (Hilaire, 2000a). Néanmoins l’étude de sujets atteints de démence nous permet de franchir un pas supplémentaire par rapport à Dubois :

‘’On the cognitive side, these overall results suggest that odors and noises are memorized as effects-of-the-world-on-the-subjects, in contrast with sounds and colors, which are rater memorized as objects of the (material and visible) word. (Dubois, 2000, p. 55)’

pour étendre ses résultas aux objets du monde en général. Il est possible que les deux phénomènes cohabitent, et que les objets du monde soient catégorisés à la fois comme des ’effets du monde sur les sujets’ (ce qui rejoint également la position de Barsalou (1998)), mais également comme des objets du monde (auxquels sont associés des concepts –représentations mentales – et des noms, voir à ce propos Dubois & Rouby, 2001). La dissociation entre ces deux processus n’apparaît que lorsque le sujet se trouve dans l’incapacité de se référer au nom de l’objet, soit parce que ce nom fait défaut en langue (niveau des connaissances partagées) soit parce qu’il fait défaut dans la mémoire de l’individu (niveau de figement des représentations du sujet dans le lexique d’une langue, Dubois, 1997c).

En référence au travaux de David (1997a, 1997b), sur la catégorisation des odeurs, nous tenterons dans le chapitre suivant de préciser ce rapport des sujets au monde, en étudiant dans leurs productions, l’utilisation qu’ils font des marques de la personne