UNIVERSITE LUMIÈRE-LYON2
U.F.R. DE SCIENCES DU LANGAGE
THESE
Pour obtenir le grade de
DOCTEUR DE L’UNIVERSITE LUMIÈRE-LYON2
Discipline : Sciences du Langage
Le 13 décembre 2001
Le dialogue romanesque chez Marguerite Duras
Un essai de pragmatique narrative
Directeur de thèse :
Catherine KERBRAT-ORECCHIONI
JURY
Catherine KERBRAT-ORECCHIONI
Christiane BLOT-LABARRERE
Sylvie DURRER
Nadine GELAS
Dominique MAINGUENEAU

Remerciements

Je remercie Marc Wilmet et Raymond Trousson, parce qu’ils m’ont formée.

Je remercie Paul Aron et Hoda Blanc, parce qu’ils ont cru en mes capacités.

Je remercie Didier Daussaint, parce que sans lui ce travail n’aurait jamais vu le jour.

Je remercie ma Directrice de Thèse, Mme Catherine Kerbrat-Orecchioni, pour l’image qu’elle donne d’elle-même et pour sa gestion des rapports humains qui ont fait en sorte que ce travail soit arrivé à son terme.

RESUME

La thèse se propose d’examiner le dialogue romanesque chez Duras à la lumière de la pragmatique, et plus précisément des analyses effectuées par les interactionnistes pour les conversations authentiques. Le dialogue romanesque ne se réduira pas aux seuls dialogues de personnages, qui sont eux-mêmes à envisager par rapport à un circuit communicationnel supérieur. Aussi une première partie intitulée « macrocommunication » vise-t-elle tout en posant le problème du statut pragmatique de la fiction à ré-articuler pour le texte durassien les éléments (polyphonie narrative, intertextualité) référant à ce qu’il est convenu d’appeler, depuis Bakhtine, le dialogisme. Y sera posée l’existence d’un auteur et d’un lecteur inscrits par rapport auxquels sont analysées la gestion de l’information, la stéréotypie et les normes qui participent en profondeur à la communication, voire au dialogue entre ces instances. Les deuxième et troisième parties sont consacrées plus spécifiquement aux dialogues de personnages. La deuxième vise au travers d’une analyse de la communication non verbale, de la politesse et de l’émotion à définir en profondeur le statut de ces dialogues chez la romancière, l’évolution qu’ils ont subie dans son écriture, et à contribuer à l’élaboration d’une poétique du dialogue. La troisième tente de les catégoriser sur le modèle proposé par les interactionnistes, tout en articulant cette typologie aux différentes scènes romanesques de la tradition littéraire. Tout au long de l’analyse, une mise en parallèle des dialogues durassiens avec ceux d’autres oeuvres, littéraires ou cinématographiques, et avec les interactions réelles permet de dégager les spécificités du code romanesque d’une part, de l’écriture durassienne de l’autre, mais aussi de renvoyer aux interactionnistes les interrogations qu’amène inévitablement une représentation littéraire des conversations.

MOTS-CLES : actes de langage / communication non verbale / dialogisme / dialogue romanesque / Duras / émotion / gestion de l’information / interactions verbales / intertextualité / maximes conversationnelles / narratologie / norme / politesse / polyphonie / pragmatique / stéréotypie / typologie.

Abstract

This thesis examines the dialogues in the novels of Marguerite Duras in a pragmatic perspective, more specifically within the framework used in conversational analysis for naturally occurring conversations. Novelistic dialogue is not understood here simply as dialogue between the characters. It must, in fact, be considered with respect to a higher communicative level. Indeed, the first part of the study, "macrocommunication", raises the question of the pragmatic status of fiction and reexamines concepts such as narrative polyphony and intertextuality (referring to what has been called "dialogism" since Bakhtine) in view of applying them to the prose of Duras. The existence of an author and a reader, embedded within the text, is assumed, and, with respect to these concepts, an analysis is proposed of the way information is managed, of stereotyping, and of the conventions which govern communication (one might even use the word "dialogue") between them at a deeper level. The second and third parts examine the dialogues between characters. Through an analysis of nonverbal communication, of politeness, and of emotion, the second part attempts to define the status of these dialogues for the novelist and the way they have evolved in her writing, and to contribute to the construction of a poetics of dialogue. The third part attempts to categorize these dialogues according to the models assumed by interactionists, while establishing links between the resulting typology and the different types of narrative scenes assumed in the literary tradition. Throughout the analysis, the dialogues of Duras are compared to those of other works, literary and cinematographical, as well as to naturally occurring interactions. This makes it possible to uncover the specific properties of the novelistic code on the one hand, and of Duras's writing on the other. It also suggests a series of questions for interactionists, which are inevitably raised by the literary representation of conversations.