1.3. « Narrateur fictif » et « lecteur fictif ».

Le troisième niveau de Lintvelt est purement textuel, il se situe dans « le monde romanesque », c’est celui du « narrateur fictif » et du « lecteur fictif » désormais appelés malheureusement, comme Lintvelt le dit lui-même, narrateur et narrataire par la narratologie. Pour nous, une dissociation devrait être opérée entre le lecteur fictif que nous appelons inscrit et le narrataire qui prend place dans la trame même de l'histoire sous forme de personnage ou sous forme de destinataire du récit fait par le narrateur mais uniquement par le narrateur réduit à la seule responsabilité de la partie narrative du récit. Nous rejoignons donc la position de Dufays (1994 : 26) quand il insiste sur le fait qu'il ne faut pas confondre le narrataire et le lecteur inscrit et qu’il signale le niveau communicationnel qui lie le narrateur et le narrataire :

‘Pour éviter tout malentendu, précisons que les différents lecteurs inscrits [...] ne se laissent d'aucune manière confondre avec le narrataire. Intégré à la structure narrative, celui-ci n'est pas une instance abstraite, mais un personnage de fiction construit par certains textes (narratifs ou autres) pour servir d'interlocuteur au narrateur (Dufays 1994 : 26).’

Nous constatons donc que les trois niveaux dégagés par Lintvelt pour les pôles émetteur et récepteur (réel-abstrait-textuel) sont bien attestés chez de nombreux théoriciens, n'en déplaise à Genette, et ont tous leur raison d'être même si un certain malaise terminologique subsiste, reflétant d'ailleurs l'aspect complexe du niveau « abstrait » qui ne s'identifie pas à une instance unitaire mais comprend en fait les différents sujets dont parlaient Dessons et Meschonnic (1998 : 44).