1.2.2. Le langage des émotions.

Le langage émotionnel est un langage qui est loin d'être toujours verbal. Goleman (1995 : 66) déclare que le « domaine des émotions s'étend au-delà du langage et de la connaissance » et Harvey (1994 : 198) cite, nous l'avons vu, le rire, les cris, les sanglots et les gémissements comme langage des émotions. Dans notre partie consacrée à la communication non verbale, un certain nombre de liens entre les signes non verbaux et l'émotion ont déjà été analysés. Pour traduire l'émotion, les phénomènes sont donc nombreux :

‘Une émotion se manifeste nécessairement par des indices corporels - intonation, mimique, gestuelle, praxémique- et/ou par des indices linguistiques. Ces deux modes de manifestation constituent une sémiologie corporelle des émotions et une sémiologie linguistique des émotions (Bürgel 2000 : CD-Rom).’

Kerbrat-Orecchioni (2000 : 40-48), au fil de sa synthèse de l'émotion linguistique, énumère la plupart des procédés relevant de cette double sémiologie en insistant toutefois sur les procédés plus purement langagiers  :

‘Chez tous les auteurs on retrouve en gros le même inventaire de procédés langagiers admis comme constituant les meilleurs vecteurs potentiels de l'affectivité : procédés phonétiques et prosodiques (développement de la « phonostylistique »), interjections, exclamations et phrases exclamatives, suffixes diminutifs et procédés de l'intensification, ordre des mots et en particulier l'antéposition de l'adjectif, vocabulaire, tropes et figures... (p. 40).’

Liste à laquelle elle ajoute la notion de connotation qu'elle avait, elle-même, étudiée dans un ouvrage du même titre, les catégories sémantiques de l'affectif et de l'axiologique, étudiées cette fois dans L'énonciation. De la subjectivité dans le langage, et les actes de langage dits expressifs dans la terminologie de Searle.

Ces phénomènes sont tous reliés à des domaines d'étude spécifiques. Certains, comme le débit, le rythme, l'intonation, relèvent de la phonétique et de la phonologie. Leur transcription textuelle se fera souvent sous la forme d'éléments de ponctuation. D'autres, comme le champ lexical, les suffixes, les hypocoristiques, les injures, les particules expressives269, relèvent plus spécialement du lexique, d'autres encore de la sémantique (dénotation/connotation, affectif/axiologique). La morphosyntaxe étudie les phénomènes d'antéposition, de dislocation de la phrase et les modalités. La stylistique, bien qu'elle reprenne la plupart des phénomènes dans son champ, y ajoutera l'étude plus spécifique des figures de style.

Nous organiserons donc l'étude du langage émotionnel en distinguant le non verbal et le verbal.

Notes
269.

Nous empruntons la liste à Kerbrat-Orecchioni (2000 : 46).