Un regard conscient sur le quotidien

Le visiteur, dans une démarche volontaire, vient porter un regard conscient sur un objet quotidien (banal, usuel, voisin) que l’instance culturelle lui a désigné comme exceptionnel...

C2h1
[...] plutôt que ces bâtiments dans lesquels on va souvent, et pour lesquels on ne voit jamais... soit on ne prend jamais le temps,
V6f
bien... je suis valentinoise, donc les châteaux d’eau... j’l’ai toujours vu, enfin j’les ai toujours vu, [...]

et il fait l’effort d’aller découvrir les espaces qualifiés de son propre quartier (de sa ville).

F8f
C’est la proximité, s’approprier le patrimoine dans lequel on vit, on habite pas très loin
G8f2
C’qui nous intéressait c’était de connaître qu’est-ce qui faisait partie de cette ville dans laquelle on habite depuis ...
T1h
parce que j’habite dans le quartier
T3f
[...] et qu’ça serait très bien de connaître ce qui m’entoure avant d’aller ailleurs
T5h
On passe souvent dans le coin, et on a dit, bah tiens

Car c’est bien dans une relation affective que se constitue la relation à la ville, à l’architecture.

F9h
[...] inciter les hommes à se pencher quand même sur leur histoire, sur leur passé, c’est...et ne pas vivre à côté de choses intéressantes sans...sans être sensible.

Cette relation affective ne naît cependant pas toujours immédiatement. Elle se laisse en fait con-naître (procédant même comme nous l’avons vu d’une démarche de découverte ou de reconnaissance – du territoire).

C4f
Ouvrir les gens sur leur ville, leur faire aimer davantage et connaître davantage et eux mêmes le feront connaître...

Particulièrement significatif de la relation affective qui s’installe avec l’objet architectural, on portera attention au cas d’un visiteur de Firminy (F9h) : ce visiteur est revenu pour visiter le bâtiment qu’il a habité pendant deux ans,

F9h
Je connaissais déjà l’Unité parce que j’y avais déjà habité

Après les explications données par l’accompagnateur, (F9h) s’aperçoit qu’il a habité un lieu exceptionnel, « un des plus importants du monde »...

F9h
Et... bon, en réfléchissant un petit peu avec l’accompagnateur, on s’aperçoit que Le Corbusier était ...très en avance sur son temps,

et l’entretien s’avance alors sur un ton plus intime, sur une « tranche de vie », sur l’expérience personnelle :

F9h
maintenant, c’est vrai que l’appartement témoin qu’on a visité j’trouve qu‘il a son charme aussi. J’y ai vécu ...pendant deux ans, mais j’avais pas les meubles adaptés. J’ai pas voulu investir parce que je savais que je n’y resterais pas, mais...mais j’n’ai pas...J’en garde pas un très bon souvenir de cette vie. Ça correspond pas à une période pas très heureuse de ma vie. Mais, j’sais pas, c’est ce que je disais en descendant : il y avait comme une part d’inachevé dans l’Unité Le Corbusier. Parce que c’est vrai que, comme il l’avait conçu, il avait pensé un peu à tout, c’était bien, mais...il manquait des magasins, il manquait des associations de locataires, il manquait toute la vie sociale, et on se marchait sur les pieds, on marchait sur les pieds des mêmes gens tous les matins, dans l’ascenseur on se parlait pas. Et il fallait se recontrer dans d’autres circonstances et ce n’est qu’après qu’on se parlait. Ce n’est pas dans l’Unité Le corbusier que l’on se rencontrait.

Une fois ce regard conscient porté sur l’architecture, c’est bien tout un système de questions qui émergent

T3f
[...] tout c’qu’est architecture avant-gardiste ça m’plaît pas forcément et là, j’ai un exemple sous les yeux. À 2 mètres de chez moi y’a un énorme chantier de l’ENS Lettres et Sciences Humaines et justement j’me pose des tas d’questions pace que... pff... J’comprend pas du tout l’architecture... et j’trouve ça vraiment... bon y’a des choses qui apparemment sont très jolies, mais y’a beaucoup d’tôle et ... pff... j’ai l’impression qu’y a beaucoup d’choses qui servent à rien, bon, c’est vrai qu’c’est pour les yeux mais... J’vois pas l’fonctionnel ...enfin j’me pose des questions [...]