Chapitre 9 : Le processus de communication de l’architecture

9.1 Le cheval, la licorne et la maison

Le langage architectural est donc polysémique et le signifiant, porteur de plusieurs signifiés (parfois contradictoires), peut être écrit par un signe sans rapport avec le référent. En outre, ce langage est multidirectionnel (il s’adresse à plusieurs spectateurs/ acteurs en majorité inconnus), daté (il est écrit dans une technique et une forme liées à l’instant de sa création), diachronique (l’objet architectural jouit généralement d’une durée de vie bien plus longue que celle de ses contemporains), démiurgique (car il est à l’origine de la création d’objet concret modifiant le site d’assiette), et bien imprécis, lorsque les musées vivent pour la plupart dans d’anciens palais princiers ou royaux réutilisés, lorsque des friches industrielles deviennent des logements. La démonstration ‘«cheval vs licorne»’ d’Umberto Eco [173] apporte un éclairage supplémentaire sur l’architecture :

‘«Tout ce processus de signification peut avoir lieu même si aucun cheval n’est présent. Le cheval présent, ou tous les chevaux existant, ayant existé ou qui pourront exister dans le monde, sont pointés comme référents du signifiant /cheval/.......Et de fait, le signifiant/licorne/ existe, de sorte que j’ai pu l’écrire sur cette page ; et le signifié «licorne» est assez clair à qui est familiarisé avec la mythologie, l’héraldique et les légendes médiévales ; mais le référent licorne n’a jamais eu d’existence réelle.» ’

Selon les cas, cheval ou licorne, l’objet architectonique serait signifiant de deux manières : selon une fonction première et selon une fonction seconde. L’expression de ce signifiant peut être convenue, novatrice ou purement symbolique, et le signifié peut être banal ou nouveau. Convenant de ce que le triangle sémantique signifiant/signifié/référent ne recouvre pas totalement le langage de l’architecture et de la ville, nous examinerons trois types de bâtiments remarquables dont les référents sont datés et largement reconnus : l’arc monumental, le lieu de culte, la gare.

Notes
173.

[] Eco Umberto (1973), Le signe. biblio essais, Livre de poche, 1993.