privé/public

La frontière entre public et privé, entre intime et commun, apparaît comme une frange indécise, et c’est dans l’appropriation de l’espace public que se manifeste le plus clairement la pratique de la ville.

Les rues de Santorin, régulièrement repeintes à la chaux le long de chaque maison pour signifier cette immixtion du privé dans l’espace public et en valider géométriquement la partie privative (c’est-ici-que-je-place-ma-chaise-dans-la-rue) constituent certes un exemple pittoresque. Pourtant, cette appropriation n’est pas l’apanage exclusif de la ville méditerranéenne. Les rues de nos lotissements privés sont peu à peu réintégrées dans le domaine public, à la charge d’entretien de la commune, alors que l’habitus leur conserve un usage privatif. Au Japon, les rues (en tant qu’espaces privés mis en commun) sont nettoyées à tour de rôle par les habitants. Dans le même esprit, on voit en Allemagne du sud s’effectuer le nettoyage hebdomadaire du trottoir et du socle de la maison par ses occupants. Rituelle en Souabe, la ‘«Kehrwoche»’ (semaine de nettoyage des parties communes des immeubles collectifs) dévolue) s’impose à tour de rôle à chaque habitant .

C’est dans cette logique du rapport Privé/public que les ‘«Biergarten»’ (≈jardin à bière, sorte de jardins familiaux, à la fois potagers et parcs de loisirs) présentent un cas complètement organisé d’une mixité contrôlée de vie privée/vie publique.

Le rapport privé/public présenté par Daniel Pinson [250] dans une opposition culture du contact/culture du spectacle à Fès et Aix peut être mis en analogie avec une comparaison Tübingen/Aix-en-Provence.

Une opposition qui s’affirme comme code culturel car on la retrouve dans les quartiers résidentiels et dans le centre-ville :

Les clotures à Aix sont de véritables écrans masquant complètment l’espace privé : haies denses, murs, palissades de canis, grillages doublés de tôles, et lourds portails ; en revanche, à Tübingen, les clotures restent symboliques : haies basses, treillis de bois aisément franchissables, le jardin-de-devant est à la fois espace tampon et espace de représentation.

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Figure 67 - Aix, les frontières privé/public
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Figure 68 - Tübingen, les frontières privé/public

Dans le centre-ville, même instrumentation : géraniums pittoresques et accueillants en façade à Tübingen et grilles défensives et hostiles à Aix. Cette opposition Nord/Sud de la Méditerranée se retrouverait-elle donc dans l’opposition Nord/Sud des Alpes ?.

Notes
250.

[] PINSON Daniel (1996) ’Fès et Aix, contact et spectacle, ou les conditions culturelles de la forme et de la pratique des espaces urbains’, Communication devant le 2° Colloque International de la ville méditerranéenne, Architecture et modernité. Paris, Dominos, Flammarion