Pour Lucrèce (1953)

Réseau positif
  AMOUR
  Armand


mission-crime





univers


mesure du temps




chasse





voyance







variétés de bois d’ébénisterie



peinture







rivières
Il y a longtemps que je me proposais de crier un jour au monde que j'aime ma femme. Le crier comme on crie une mission ou un crime. La proclamation d'un amour légitime, cela n'a jamais été fait, surtout à Aix. Merci à votre amie de m'en donner l'occasion. ( p.1015, Acte I, sc. 3)

Il ne s'agit pas d'être simple dans une confession publique; on peut parler noble. Grâce à elle, j'aime tout. Grâce à elle, j'ai tout. Le monde, le temps, l'espace ont trouvé ce moyen de se donner à moi: c'est en elle que je circule, que je respire. Elle est pour moi la seconde, la minute, l'heure. Le soleil, c'est ma femme. Mon cadran solaire, c'est ma femme. Je m'aime à cause de ma femme...
( p.1015, Acte I, sc. 3)

Il est des maris que leur nature contraint d'être aveugles. Je suis chasseur, Eugénie. Sur le sol le plus sec, au taillis le plus ouvert, je décèle la trace du chevreuil, de la plus légère des bêtes. Je vois dans l'air le sillage d'une bécasse déjà disparue... Il n'y a pas eu de passage dans ma vie conjugale... D'aucun gibier... ( p.1017, Acte I, sc.5)

Je suis une espèce de devin. J'ai prévu des morts, des accidents, des bonheurs. Jamais je n'ai eu d'alerte en pensant à Paola. Souvent dans la rue, je m'écoute parler tout haut, et à m'entendre, j'entends des vérités que j'ignorais. J'entends: Ta barbe te va mal, Armand. Ton Corot est un Trouillebert, Armand. Tu as une femme qui a un amant... C'est qu'elle n'en a pas. ( p.1018, Acte I, sc.5)

Je n'ai surpris que l'innocence. Je collectionne les meubles : pas un secrétaire, pas une commode, pas un bureau d'appui ne m'a avoué que pour moi désormais le bois de rose, l'acajou n'étaient qu'une même et vile essence. Le citronnier m'a crié qu'il était encore citronnier, le palissandre, palissandre. Alors? Je collectionne les turqueries. Qui est chargé au monde de me révéler la trahison de Paola, je vous le demande, sinon ma Turque de Liotard, ma petite odalisque nue sur son divan rayé? Le jour où Paola me trompera je sais ce que deviendront à mes yeux la gorge de ma sultane, ses reins, ses jambes. Quel affreux rébus! Non. Tout était clair autour d'elle. Sous son genou plié le soleil mettait sa tache, et non la lèpre. Les sonnettes du kiosque du sultan étaient au repos, avec leur ruban amarante et m'enchantait le cœur. Les Eaux douces d'Europe serpentent encore pour moi, les Eaux douces d'Asie murmurent encore pour moi, Eugénie... ( p.1018-1019, Acte I, sc.5)
  Paola
cuisine


règne végétal
nourriture
parfums

Vous lui préparez une cuisine succulente, dit-on, et votre chair devient pulpe. Vous lui lisez vos Harmonies, et votre mémoire devient jardin et cœur. Vous chantez, vous l'embrassez, et votre bouche devient muqueuse et miel. Arrêtons-nous là. Intendant des parfums, introducteur des fruits, ambassadeur des élixirs, entraîneur de défaillances, voilà ce qu'est votre mari.
( p.1028, Acte I, sc. 8)
  Le Procureur Impérial (Lionel Blanchard)
grossesse


personnage historique
Ce qu'elle est maintenant pleine de vous, même dans votre absence. ( p. 1059, Acte 3, sc.2)
Il n'est qu'une force pour l'homme: une femme d'humeur égale. Le cas de Socrate excepté, lequel d'ailleurs a mal fini, à la base de toute entreprise menée à bien par un homme, de toute carrière féconde, il y a une femme à un seul visage, à un seul timbre de voix, à un seul rythme de gestes. ( p.1061, Acte 3, sc.2)
  VÉRITÉ (PURETÉ)
  Armand

effets sonores


objets familiers





corps






animaux



armée



religion






effets sonores
Il est moins satisfaisant de penser qu'elle n'a trouvé pour vous deux qu'une voix. Deux bouches et une voix.
( p.1014, Acte I, sc. 3)

Oui. Je reviens. Les hommes oublient leurs gants, leur cravache sur la table des femmes qu'ils veulent revoir. J'avais oublié ma vie sur la vôtre, chère Eugénie, toute ma vie. ( p.1017, Acte I, sc.5)

Rassembler dans le pharynx des souffles qui seraient bien plus à leur aise dans le larynx, mettre en branle la glotte, galvaniser les muscles d'une langue qui rêve d'être toute à ses muqueuses et ses papilles, un flûtiste à la rigueur s'y croit obligé, pas une femme, si elle n'y est contrainte pour sauver son mari ou dire à l'interlocuteur qu'elle l'estime et l'aime. ( p.1019, Acte I, sc.5)
C'est peu. J'ai vu un chat qu'on noyait revenir douze fois au quai, malgré les bâtons. Un homme a moins de résistance. Je n'atteindrai pas la quatrième. ( p.1022, Acte I, sc. 6)

J'ai dit que la vertu était la faiblesse des militaires forts et la cuirasse des magistrats faibles. ( p.1025, Acte I, sc. 7)

En ouvrant ma fenêtre, j'ai vu ce qu'il était un jour de règlement. Le ciel est tout bleu, tout pur, mais à une barre invisible qui le coupe, on voit qu'il est le ciel du règlement, et, en vous, au lieu de se mélanger, les torts et les vengeances se séparent et vont chacun dans leur colonne. Tu aurais dû ouvrir ta fenêtre ce matin, et regarder la barre. Cela te donnerait le courage des comptes.
( p.1047, Acte II, sc. 3)

Grâce à elle, le diapason s'est vraiment haussé dans votre pauvre ville. Aix manquait vraiment de grandeur et d'héroïsme. ( p.1048, Acte II, sc. 3)
  Barbette

religion
tradition chrétienne


effets lumineux


art photographique



tissus


Il n'y rien à faire pour les hommes de ta peau, c'est de l'ange. Il n'y a rien à faire de tes jambes, c'est le ciseau de sainte Agnès! ( p.1076, Acte 3, sc. 7)

La pureté n'est pas de ce monde, mais tous les dix ans, il y a sa lueur, son éclair. Sous l'éclair de pureté elles vont toutes se voir dans leur manège et leur turpitude. Elles vont rester immobiles et surprises comme si le photographe les prenait, et aussi l'éclair de pureté coulera sont lait sur tout leur corps, elles le verront soudain dans son honneur, elles le verront en dépôt de Dieu, et il leur fera ses reproches.
...
Tu n'as pas voulu être touchée par une autre étoffe, par un autre jupon tant que tu serais sans honneur, mais c'est justement dans ce linge qu'on t'attend chez les bienheureux. ( p.1079-1080, Acte 3, sc. 8)
  Eugénie
confiserie Te voilà satisfaite, d'avoir gardé ton mot amour dans ta bouche, comme un bonbon. ( p.1016, Acte I, sc. 3)
  Lucile

cimetière



véhicule


monde du crime





tortures
et
miracles


esprits malveillants
reptiles


photographie






bijoux



éternité


effets lumineux


légende

animaux domestiques





effets lumineux
J'ai un grand respect pour mon corps. Car il est sain, loyal et sage. Je lui évite cette fosse commune de la vie qu'est la promiscuité... ( p.1013, Acte I, sc.2)

C'est pour cela que tous les matins j'ouvre en souriant mes yeux et ma fenêtre. Un quadrige de mots purs m'amène le soleil. ( p.1021, Acte I, sc. 6)

Je suis sortie de la maffia des femmes.
( p.1033, Acte I, sc.10)

On les a mises nues devant la foule, elles ont tissé un habit de leur nudité même, et ont traversé la ville par les grandes rues. On leur a arraché les ongles, le sang a collé sur leurs doigts des ongles divins, et elles ont repris leur couture. On les a étendues sur le feu, les barres du gril, le fers des tisonniers ont gravé sur leur corps une musique céleste, elles se sont relevées et ont chanté. ( p.1054, Acte II, sc.4)

Jamais! Jamais je ne serai une des vôtres. Vos tours de démon n'y peuvent rien. Ni vos sifflements de vipère...
( p.1056, Acte II, sc.5)

Lionel, c'est une question comme le ciel en pose avec un éclair. Si l'âme n'y répond pas à la même vitesse, elle ne se pose jamais plus. C'est fini pour jamais.
( p.1061, Acte 3, sc.2)

Ce temps qui accole passé, présent et avenir dans un ordre immuable, qui aligne dans leur suite nos jours, nos mois et nos années, n'est qu'une illusion? Dieu ne juge pas la vie des hommes d'après ce collier. Il le défait après leur mort. Il choisit dans ces années éparses. ( p.1062, Acte 3, sc.2)

Cette éternité qui s'approche, c'est sa fidélité.
( p.1065, Acte 3, sc. 3)

Un éclair du jugement m'est éclairé cet homme jusqu'aux os.
...
Il vivra dans la légende, cela le rehaussera à ses propres yeux. Ce sera une légende fausse, mais où sont les légendes vraies! Le pauvre agneau Vérité est égorgé au pied de tous les vitraux. D'ailleurs puis-je faire autre chose, Armand! Autre chose que l'héroïne? Les héros sont ceux qui magnifient une vie qu'ils ne peuvent plus supporter.
( p.1077, Acte 3, sc. 6)

Le monde est pur, Paola, le monde est beauté et lumière!
( p.1077, Acte 3, sc. 6)
  Paola

religion
Elle est la pureté même, mais la pureté est comme la sainteté, un débordement de l'imagination.
( p.1038, Acte II, sc.1)
  Le Procureur Impérial (Lionel Blanchard)

tribunal


boissons
objets quotidiens


barrage
Ma petite Lucile ne s'était pas glissée dans la robe de la Justice poursuivant le crime... ( p.1059, Acte 3, sc.2)

Cette femme ne sait ce qu'est le vin, elle boit son eau de coing avec des transes, et elle ne se garde pas contre le poison. Elle ne perd jamais un mouchoir, une clef, et elle se perd soi-même. Tous les gendarmes, toutes ses lois, tous les préjugés, et toutes les vérités du monde, je les ai disposés autour du corps de ma femme, et il trouve le moyen de forcer le barrage. ( p.1074, Acte 3, sc.5)
Réseau négatif
  ADULTÈRE
  Armand

volailles


amphibiens




règne végétal et règne minéral





corps





esprits surnaturels


monstres






art dramatique

sculpture




règne animal






Jamais je n'aurais pensé que ma femme n'avait pas de bouche, mais ce derrière de poule... C'est la vérité pourtant, du moins depuis une minute. Elle a chanté merveilleusement jusqu'à ce matin. Je me demande quel coassement elle va nous donner ce soir.
( p.1022-1023, Acte I, sc. 7)

Car les yeux de Madame Lionel Blanchard m'ont amené au second vice de ma femme. Les prunelles de ma femme ne sont pas de mousse, comme je croyais, mais d'acier. Il y a une armure à l'intérieur de la tête de ma femme. Et son regard ne vient pas d'une source où l'algue et le rayon se mêlent, comme je le lui disais, mais d'un miroir de fer. Il ne caresse pas, il ne rafraîchit pas: il égratigne, il brûle. Je me réjouis que Madame Lionel Blanchard ne m'ait pas touché de sa main, car sans doute trouverais-je maintenant squameuse cette peau conjugale qui couvrait pour moi de velours le jour et la nuit. Je viens de passer ma main sur elle; elle est toujours lisse; mais elle transpire un peu, je crois que c'est de peur... ( p.1023, Acte I, sc. 7)

La vue. Une vue double! Je vois derrière Madame Blanchard une espèce d'ange qui lui ressemble, qui souffre, lui, de se taire, qui me parle des lèvres qui me murmure un mot bien inattendu, le mot amitié. Je vois derrière ma femme une espèce de monstre, à l'œil tombant, qui lui ressemble, qui me dit un mot bien étrange, le mot haine... L'odorat! Près de Madame Blanchard, l'air embaume. Près de ma femme, cela sent. Cela se décompose, Eugénie. C'est à n'y pas rester. ( p.1024, Acte I, sc. 7)

Voilà son œuvre. Ou plutôt l'œuvre n'est pas d'elle. Il y a eu un drame sans dialogue. Un drame par monologue. C'est très fréquent. Peut-être aurions-nous le même devant la statue dont vous parliez tout à l'heure. La statue de Diane dressée, par exemple. Ou plutôt de Vénus accroupie...
( p.1024, Acte I, sc. 7)

L'humanité est l'humanité! Que ce soit un grand troupeau de cerfs qui sorte à six heures des ateliers, à huit heures des cercles ou des cafés, que ce soit un grand troupeau de biches qui s'assemble autour des lavoirs ou des pâtisseries, qu'y pouvons-nous? L'humanité est la promiscuité. Mais ce que je ne trouve pas juste, c'est que j'aie le sentiment d'avoir failli, d'avoir tué. Si les innocents ont le remords, c'est comme si les coupables avaient le chagrin. C'est la pire solution. ( p.1025, Acte I, sc. 7)
  Eugénie

espace





topographie


rituel religieux

manège



oiseaux




sorcellerie




tradition chrétienne

animaux
Aix avant votre venue était vraiment la ville de l'amour. La moitié du chemin que font les Aixois dans la vie était dédié à l'amour. Quel beau réseau, quel beau lacis, si leurs pas manquaient!... Suivre un Aixois ou une Aixoise, c'était aller dans la journée vers l'amour! ( p.1010, Acte I, sc.2)

Dans sa promenade la plus droite sur le cours Mirabeau, il coupait un lacis d'intrigues, de billets et de baisers.
( p.1011, Acte I, sc.2)

Cette messe amoureuse qui se disait au grand jour sans y perdre un de ses secrets, tu la changes, partes mépris, en manège sordide.
( p. 1011, Acte I, sc.2)

Tu sais ce que tu nous prépares, un scandale et un drame. Armand près de sa femme était le plus brave des paons, avec cent yeux aveugles sur sa roue. Tu viens de donner la vue aux cent yeux. ( p.1020, Acte I, sc. 6)

Mettre un mari en éveil, c'est lâcher l'apprenti sorcier. C'est réveiller tous ces gardiens dont la confiance faisait des camarades innocents la curiosité, la jalousie, le crime. Armand va voir d'un coup tous les amants de Paola, un par œil. Il va ruiner, la chasser. ( p.1020, Acte I, sc. 6)

J'enrage à te voir confesser la vertu au café, comme une martyre sa foi au cirque. C'est de mauvais goût, et périlleux, avec cette sorte de tigresse.
( p.1020, Acte I, sc. 6)
  Lucile
trahison
espionnage




mannequins

appât
C'est en vous répétant en traître ce qu'elle m'a confié, en vous disant en espionne ce qu'elle m'a montré de nu et de secret sur elle, que je reste innocente et sûre. Votre femme est un monstre.
...
Vous n'êtes pas pour elle un homme vous n'êtes qu'un mannequin d'homme qu'elle aime fait défaut, la forme et l'amour des hommes. Vous n'êtes que l'appât des voix, des statures, des gestes d'amant. ( p.1031, Acte I, sc.9)
  Paola

souvenirs
Mon mari? Il me reste une conscience ténébreuse, une obsession agréable, qui est mon mari. Comme une mémoire à laquelle on n'a pas recours, parce que le présent est présent dans toutes ses minutes. Un compagnon plus en ombre qu'en chair auquel j'ai remis ma vie habituelle en consigne. ( p.1027, Acte I, sc. 8)
  Le Procureur Impérial (Lionel Blanchard)
artisanat


vêtement
Il m'a rendu un corps de veuve, un de ces corps modelés à la main, à la main d'un mort... ( p.1073, Acte 3, sc.5)
Quel niais j'ai été, de revêtir cinq ans pour le lit conjugal une toge de candeur et de convention...
( p.1074, Acte 3, sc.5)
  MENSONGE
  Armand

déguisement






maladie
Dans la catastrophe, il est bien rare que le malheur prenne le temps de nous fournir le vrai masque pour nos visages. Celui de l'époux outragé était à portée de votre mari. Il l'a pris. Qu'il tombe, et vous retrouverez la vraie face.
( p.1066, Acte 3, sc. 3)

Il est si naturel que ce matin les hommes aient cette punition d'offrir à vos yeux des visages sordides. Tous ceux que vous avez rencontrés depuis hier portent la même lèpre.
( p.1066. Acte 3, sc. 3)
  Eugénie

religion
C'est de ce crime que t'en veulent tant de gens: tu redonnes à la ville le péché originel. ( p.1011, Acte I, sc.2)
  Lucile
animaux


animaux


maladie



maladie




objets familiers



animaux



accident



apparitions surnaturelles
morts violentes


maternité








mort




religion


vêtement



objets familiers





effets lumineux


marionnettes


objets divers


insectes


vêtements


religion




objets familiers




parasites
(insectes)
Non. Une bête visqueuse, ou grouillante. Elle sort de ses lèvres, elle court sur son corps. ( p.1012, Acte I, sc.2)

Il y avait un ver dans ses yeux.
( p.1012, Acte I, sc.2)

Si j'avais à dire votre prénom, je vomirais du sang...
( p.1042, Acte II, sc.1I)

Et parce que vous m'avez touchée, vous que je hais, vous avez jeté votre lèpre sur tout, même sur ce que j'aime.
( p.1043, Acte II, sc.2)

Mon lit lui-même, mon lit de mariage s'est ouvert comme mon lit d'enfant. Pas une heure de la nuit ou de l'aube ne m'a traitée en paria. J'aurais obéi à une pierre qui m'aurait dit de mourir. Les pierres m'ont dit de vivre. Je serais tombée devant le grognement d'un chien. Les chiens m'ont léchée. Et cette permission que tout humain, même non coupable, demande chaque matin aux objets et aux animaux, ils me l'ont répétée de toute leur douceur. Mais tous mettent une condition: la condition que votre méfait ne marque plus sur moi, que je le change en un accident, en une collision d'un autre âge. Un autre siècle a heurté par mégarde ma pauvre et simple vie. Je ne puis vous admettre que dans un passé déjà évanoui. ( p.1043, Acte II, sc.2)

Vous mouriez comme ceux qui ont voulu trop atteindre, et qui, en sombrant, s'élèvent. Je vous voyais avec vos anges, qui étaient la noyade, le pistolet, la congestion.
( p.1044, Acte II, sc.2)

Je me cramponne à la mort comme un enfant à sa mère. Elle seule me mène à la vie.
( p.1044, Acte II, sc.2)

Ma demande était simple à l'homme d'enfer que je vous croyais. La mort était un de ses vices, presque une de ses habitudes. Vous lui faisiez signe et elle était là. Vous enjambiez un garde-fou, vous vous dissolviez, vous deveniez une torche, et vous brûliez. Quelle désillusion! De celui que je vois à la mort, il y aussi loin que du condamné à la guillotine. Tant pis. Il faudra faire à pied le chemin.
( p.1045, Acte II, sc.2)

Mais au point de malheur où je suis, je puis compter sur toutes les ressources de Dieu, du miracle à la mort...
( p.1053, Acte II, sc.4)

C'est par orgueil que j'ai voulu passer une robe blanche au-dessus de l'ignominie. ( p.1065, Acte 3, sc. 3)

Il ne m'aime pas. Pas un objet de cette maison qui ce matin n'ait pris un cœur, ne soit sorti de son néant d'objet pour m'accueillir, n'ait gagné à ce désastre une tendresse et un désir. De lui est sortie la cruauté, et la haine.
( p.1065, Acte 3, sc. 3)

Ô Armand, Dieu doit avoir ses raisons pour que si souvent à la lumière du crime la victime se ternisse, le criminel se dore, mais il est horrible de penser que si vous prenez sa femme à un mari, juste, bon, généreux, vous le changez en pantin égoïste, sans âme et sans vertu. C'est ce que je viens de voir de mes yeux. Sa robe de vertu, dont il était si fière, ce n'est plus qu'une loque, sa peur de vertu une écaille. Dans sa bouche il n'est pas une parole, qu'elle fût honneur, justice, ou famille, qui ne m'ait paru désigner une hypocrisie ou une tare. Il a parlé latin, il soulevait une pierre tombale des cloportes en sont partis. Jusqu'à son parfum que j'ai choisi, son vêtement dont j'ai voulu l'étoffe, m'étaient aussi étrangers et hostiles que lui. Il m'est arrivé chaussé, drapé, rasé, par des ennemis, par je ne sais quels criminels... ( p.1066. Acte 3, sc. 3)

Moi, l'épouse, coupable, je ne vais pas être nommée l'espionne de Dieu, auprès de ce pauvre homme innocent!
( p.1066, Acte 3, sc. 3)

Leur métier d'homme lui-même m'insultait. Le plâtre sur celui-ci, le charbon sur cet autre, les couleurs sur ce tablier de vigneron, tout cela marquait sur moi indélébilement, c'était mes taches, c'était mon sang.
( p.1067, Acte 3, sc. 3)

Il est hideux! Il a tout avili, tout bafoué! Je vois sur la terre une pauvre vermine qui s'accole et se ronge. Ce sont les humains!
( p.1076, Acte 3, sc. 6)
  Marcellus
boissons


fleurs




animateur
corps




religion


querelle




religion

femme



la mode







pêche




corps

effets sonores


art dramatique et gravure



liaison amoureuse









corps




Alors sers-moi le rafraîchissement qui va au vice.
( p.1006, Acte I, sc.1)

Le Procureur Blanchard impose désormais à ma boutonnière une orchidée fendue de sang, qui sente la marée. ( p.1006, Acte I, sc.1)

Le vice a aujourd'hui une mission qu'il ne cédera à personne. Celle de vous annoncer la vertu. Elle est en marche. Vous allez la voir en chair et en os s'asseoir dans quelques minutes sur cette chaise, de ses fesses de vertu...
( p.1008, Acte I, sc.1)

Partout où passe cette procureuse charmante, la vie prend les formes et l'agrément du Jugement dernier.
( p.1008, Acte I, sc.1)

Vice et vertu vont se contempler pour la première fois face à face. ( p.1008, Acte I, sc.2)

Le vice! Tu parles comme Monsieur Blanchard. Qui lui-même parle comme une vieille fille. Qui elle-même parle comme Dieu. À huit heures du matin, aucun homme n'accepte d'être le vice. Le vice est féminin, surtout à cette heure. ( p.1036, Acte II, sc.1)

Tu deviens très provinciale devant elles. Tu les suis, tu les observes comme si la pureté était un secret à apprendre. Tu as l'air d'être en retard pour une mode. Tu prends devant elles l'œil de celle qui va copier un chapeau ou scruter une robe. Le secret qui donne ce regard que tu n'auras plus jamais, ce regard qui caresse l'homme sans le voir, qui le voit sans l'imaginer, celui de Lucrèce, celui de Madame Lionel Blanchard. ( p.1036-1037, Acte II, sc.1)

Cet horaire de la journée, minute par minute, par lequel seulement on peut prendre une femme comme par un filet, je me levais dès l'aube pour la tendre.
( p.1037, Acte II, sc.1)

Vous n'êtes pas cette femme à voix, à regard, à geste. Vous êtes ce que vous étiez hier. Un corps à la fois d'inconscience et de docilité, des yeux qui ne voient pas et qui s'ouvrent tout grands. Un murmure sans mots.
( p.1041, Acte II, sc.2)

Je suis dans le plus beau de mon rôle, puisque c'est la visite de la mort que je reçois, comme dans les gravures où elle vient demander à Don Juan compte de tous ses crimes.
( p.1044, Acte II, sc.2)

Je ne sais pas ce qui naîtra de notre étreinte, mais la convention, la niaiserie et la routine en sont mortes. Tu te crois entrée dans ton malheur, tu l'es seulement dans ta vie. Tu as dit adieu pour toujours à ce bonheur sans bonheur qui était le tien, à ce mariage sans union, à cet honneur sans gloire. Débats-toi, défends-toi. Qu'il est beau de voir la première défense que la vertu oppose à l'amour.
( p.1045, Acte II, sc.2)

Ce n'est pas d'une bouche, ce n'est pas d'un cerveau, c'est de ses entrailles qu'il faut arracher à la femme sa vérité et son aveu. J'ai le tien. C'est ton mari d'hier que tu as nourri de mensonges. ( p.1045, Acte II, sc.2)

  Paola

religion

déguisement




sculpture


littérature
histoire chrétienne



poids

maladie





vêtements



trahison




animal


tradition biblique



animaux

animaux



peinture

artisanat




mythologie grecque


objets quotidiens

peinture



pollution

nature


effets lumineux
offices




handicapés



mythologie grecque



vie conjugale



corps

sommeil

théâtre



objets familiers
animaux domestiques
maquillage et tromperie







arbres



parfums



parfums






crime



odeur



accouchement


écriture



mythologie






palace



miroirs




prison


espace


poids et mesure



mythologie grecque


théâtre et vie




la vie dans le désert



vêtements




lutte



médecine



religion








art dramatique

dessin

effets sonores




art culinaire



personnages
mythiques

personnage
historique

religion

maladie



littérature





accouchement




objets techniques


esprits malveillants




tribunal


animaux

déguisement
histoire grecque
ancienne
religion


La beauté est première au courant de ce qui arrive aux péchés capitaux. ( p.1006, Acte I, sc.1)
Je suis assez loyale vis-à-vis de moi-même pour juger et voir les hommes sans leur mettre ces masques que sont les grands hommes. ( p.1026, Acte I, sc. 8)
Mais, pour les hommes, vous sentez chacun d'eux net, achevé, mâle, dans son enveloppe et son esprit et ce jeu de vertu que vous nous jouez n'est que la coquetterie, l'effroi et le délire d'un corps qui vous échappe devant les statues de chair immuables et précises dont ces messieurs vous environnent. ( p.1027, Acte I, sc. 8)
Vous avez beau mettre à ce discoureur la tête de Bossuet, à ce juge la tête de Salomon, dans votre esprit vous ne changez pas son corps, qui ne vous est rien.
( p.1028, Acte I, sc. 8)
Quand il ne pèse plus sur moi, le poids du monde y tombe. Vous, enfin vous respirez. Votre tuteur, votre oncle, voilà ce qu'est votre mari. Celui que vous écoutez encore, pas pour longtemps, car une lèpre va lui monter bientôt au visage, celui près duquel l'air est supportable, pas pour long temps, car il aura bientôt autour de lui son odeur, celle de l'être qu'on déteste.( p.1029, Acte I, sc. 8)
Que votre vertu soit le domino de la sainteté ou de la concupiscence, peu m'importe. Vous êtes gentille au-dedans, boutonnée jusqu'au col. Qu'un jour tous les boutons craquent ou que vous y ajoutiez une chape de supplément, cela vous regarde. ( p.1029, Acte I, sc. 8)
Elle (la confrérie des femmes) ne comporte pas d'espions ni de traîtres. Nous y estimons que le pire crime, de la part d'un de ses membres, c'est de passer aux hommes. ... Mon mari est jaloux comme un tigre: il mime la confiance. Cela leur suffit. Sous cette liberté du premier-né de la nature, toute liberté est donnée à sa cadette pour avoir une âme. À la faveur de sa myopie, nous courons nues dans le monde, nous avons nos sens, nos mouvements, nos voluptés. ( p.1029-1030, Acte I, sc. 8)
Adam croit dur comme fer qu'il a été chassé du paradis terrestre. Ève n'en est pas sûre, mais pas sûre du tout, et agit en tout cas comme si elle restait.
( p.1030, Acte I, sc.9)
Il est aussi plus dangereux que le chat auquel les souris ont passé la sonnette. ( p.1030, Acte I, sc. 8)
Aucune mâchoire de bouledogue n'est plus tenace que les doigts d'une femme qui hait. ( p.1033, Acte I, sc.10)
Mais ce sommeil te portera sur un rivage où tu n'as jamais dérivé... ... L'homme le plus volontaire n'est qu'une esquisse, qu'un barbouillage sur le décor humain. Aussi sa bouche, ses mains se promènent-elles à tâtons sur la création. Toute femme est comme toi, belle Lucile, achevée comme une clef. Que vais-je bien , ouvrir avec toi! Le scandale? Le malheur? Nous allons voir ce que tu ouvres. Pas une de tes moulures, pas une de tes encoches qui n'indique que ce sera un scandale de choix, un malheur inouï. J'ai la clef de la boîte de Pandore... Tu l'as voulu, puisque tu as voulu que j'ouvre la haine.
( p.1033, Acte I, sc.10)
Avec les taches de rousseur, les rides, la lie de vin et les poils follets, ils feraient tous deux de son visage ce que Vinci n'a pas fait de la Joconde... ( p.1034, Acte I, sc.10)
Elle tète la pureté. Elle suce la clarté. Et quel parfum se dégage d'elle! De toi et de moi, pauvre Barbette, le soleil couché, s'échappe cette acidité du monde que les arbres absorbent à grand-peine. Quelle belle nuit pour les hommes, s'il n'y avait sur terre que cette femme et toutes les forêts! ( p.1034, Acte I, sc.10)

Tu lui donneras cette splendeur qu'elle n'aurait jamais approchée, avec son magistrat de mari, son procureur de cœur, son juge de Dieu, la splendeur du désordre.
( p.1034, Acte I, sc.10)

Pas pour elle. Tout ce qui est laid ou vil serait de moindre poids pour elle. Je connais ces natures. Un bossu, un boueux, elle en souffrira moins; ce serait une épreuve, non des hommes, mais de Dieu; un accident, pas une mort. Non. Nomme le plus beau, le mieux né, le plus subtil dans la corruption... ( p.1035, Acte II, sc.1)
C'est ton mouchoir d'Ariane. Il te mène sans remède à la calamité. ( p.1035, Acte II, sc.1)
La vraie femme de l'homme est la lâcheté. C'est à elle qu'il se confie tous les soirs, en se donnant au sommeil. Triste spectacle pour celle qui l'aime qu'un homme endormi! Cela tient de l'alibi et de la dénonciation. Je t'ai regardé souvent dormir. Il y avait sur toi une naïveté du sourcil et une candeur de l'omoplate qui n'avaient vraiment pour but que de rejeter la faute sur le corps de ta compagne. Tu dors sans ton désir. Marcellus, sans ton foie, et sans ta force, comme Monsieur Blanchard dort sans ses décorations.
( p.1036, Acte II, sc.1)
Dans tout rôle d'amoureux trompé, l'homme ne dispose que du répertoire. ( p.1037, Acte II, sc.1)
Une ombre qui a ton poids et tes os s'est glissée entre elle et tout ce qui l'entoure. Entre elle et son mari, et son déjeuner en vieux marseille, et ses Harmonies poétiques, et son caniche, et Dieu... ( p.1037, Acte II, sc.1)
Barbette a maquillé cent filles en vierges. Pour une fois qu'il s'agissait du maquillage inverse, tu penses qu'elle a pris tous ses soins. D'ailleurs la victime tenait dans sa main ton mouchoir. C'est de la tradition. Je connais mes classiques. Et maintenant remercie-moi. ( p.1038, Acte II, sc.1)
Elle se fût frotté le visage de terre. Et l'arbre a dû respirer, murmurer, avoir une tendresse trop hardie pour un arbre. Elle l'a lâché soudain, et est partie... L'arbre n'a pas suivi... Elle a pensé que son mari était absent, et est allée vers sa maison. Le vent se levait et l'arbre avait prévenu les arbres. Ils se relayaient. Tous les feuillages s'agitaient. ... Tous les parfums de l'Arabie ne peuvent effacer une tache qui n'existe pas. ( p.1039, Acte II, sc.1)
C'est le parfum avec lequel j'ai vaporisé hier ta belle. Ton parfum dans l'enfer... ( p.1040, Acte II, sc.1)
Une amie maintenant pour vous, ce n'est plus la niaise à qui l'on réserve ses histoires de mode ou de ménage, c'est une compagne dans cette vie de femmes au pays des hommes qui est désormais la vôtre, une complice, une jumelle, une entremetteuse: c'est moi. ( p.1050, Acte II, sc.4)
Un jour devait venir où vous cesseriez de danser pour la galerie votre pas de fausse vierge. C'est un passage délicat pour nos âmes sensibles et critiques. L'amour vous a prise à l'improviste et endormie. Vous y gagnez, surtout avec votre comparse. Autant Marcellus est à l'aise dans le folâtre, autant la passion l'enlaidit, et c'est son désir même qui lui a fait choisir cette séduction anonyme. Quand Jupiter se déguisait en nuage pour visiter une mortelle c'est que cette nuit-là il ne se sentait pas très beau.
( p.1050, Acte II, sc.1V)

Que puis-je vouloir? Bavarder avec vous. Épiloguer sur ce prologue. Savourer cette joie d'être là, sage-femme de votre viol. ( p.1051, Acte II, sc.1V)
Dans nos cerveaux de femme, l'encre de Dieu souligne tout ce qui est désir, mais la gomme de Dieu efface tout ce qui est satiété. ... Une troupe d'eunuques autour de l'amant neuf, voilà ce que toute femme amasse par sa vie d'amoureuse. De chacun de nos amants, il reste juste ce qui resta du pauvre Orphée après l'assaut de ses prêtresses, une main dont vous reconnaissez surtout la bague, un globe d'œil, dont je ne connais rien dont vous reconnaissez surtout la vinule plutôt que le regard. ( p.1051, Acte II, sc.4)
Quand une femme entre pour la première fois dans l'amour, que ce soit de gré ou de force, elle croit en effet pénétrer dans le cœur du secret. Elle se croit isolée dans un jardin ou en enfer, cachée dans un souterrain, élevée dans un ciel. C'est juste le contraire. Elle est entrée dans un palace d'où elle est vue de l'univers, dont les murs, les plafonds sont tendus de mille miroirs qui renvoient ses moindres gestes, dont la résonance est telle que jusqu'à ses soupirs éclatent. C'est cette vasque de musée qui vous crie tout ce que l'on confie à voix basse à la vasque opposée.
( p.1052, Acte II, sc.4)

Ma mission était de libérer ma procureuse de ses chaînes. ... Avouez que chacun de ces hommes qu'hier vous distinguiez à peine de vous-même, a pris une forme, un poids, un relief. Sur Aix, sur la terre entière, un astre a laissé subitement échapper pour vous les mâles de votre race. C'est avec eux qu'il vous va falloir désormais manger, parler, dormir. .... Chacun est devenu votre balance. Chacun s'ajuste à vous. Il n'est plus de remède...
( p.1052, Acte II, sc.4)
Armand m'a persuadée qu'il était Persée devant Andromède, mais il rate un lapin à cinq pas.
( p.1053, Acte II, sc.4)

Vous êtes dans le mélo et je suis dans la vie.
( p.1053, Acte II, sc.1V)

Elles laissaient le chamelier partir sans l'insulter, se redressaient, s'époussetaient, et poursuivaient leur route dans le désert jusqu'au fleuve où le batelier percevait aussi son péage. .... c'est peut-être la pureté qui est le tribut. Vous l'aviez assez payé. Je vous libère de sa charge. Remerciez-moi, descendez de cette estrade et de ce pathétique. Je vous assure que sous votre manteau de drame on vous voit toute gracile et nue.... Et allez vers la vie...
( p.1054, Acte II, sc.5)
À lutter à bras-le-corps toutes nues, comme nous luttons depuis hier, nous avons gagné une intimité qui a ses devoirs. Dieu n'a pu vous donner la journée, les femmes vont vous donner la journée, les femmes vont vous donner l'heure. L'heure qui vous permettra de vous préparer, non pas à être vue, de ce côté-là vous ne risquez rien, mais à voir. Si vous avez un collyre magique, videz le flacon, Lucile.
( p.1056, Acte II, sc.5)

Cela en vaut la peine. Jamais martyrs ne se sont mutuellement aussi palmés. Vous lamentez, mais le compliment vous habite. Vous déplorez, mais vous n'êtes que des cantiques. Vous croyez hurler à la mort, vous miaulez à l'amour, et à son entremetteuse, l'amitié...
( p.1068, Acte 3, sc.4)
Ne joue pas sur les mots. Vous êtes des assassins. Elle l'a tué. Tu l'as tué. Par votre vérité. Elle en se croyant la vertu. Toi en te croyant l'honneur. Tous deux en chaussant le cothurne alors que vous plongez jusqu'au col dans la farce. ( p.1068, Acte 3, sc.4)
Les graffiti sur les murs seront ses messages. L'acoustique du monde est ainsi ordonnée, ses résonances, qu'il n'est pas une part de ton corps, mon cher Armand, que cette bouche d'ange ne puisse dénommer, aussi crûment que moi.
( p.1068, Acte 3, sc.4)
Je n'étais pas comme elle, aucune femme n'est comme elle, qui fait un mélange sordide de ses sentiments et de ses corps, qui brasse en cette minute son mari, Marcellus et toi dans un pot-au-feu de pensionnaire et de sorcière.
( p.1069, Acte 3, sc.4)
Il reste plus de langueur dans les yeux et sous la peau de Madame Blanchard que sur Elvire après le passage de Don Juan. Mais elle est ce matin ce qu'elle était hier, devant ses glaces à la framboise, une femme intacte et bornée que seules ont jamais touchée la main et les lèvres d'un honorable Cujas. Barbette s'est chargée de la mise en scène. Sans extra, sans génie. ( p.1070, Acte 3, sc.4)
Quel désastre, n'est-ce pas, de s'étendre martyre et de se relever vierge! Toi, cher mari, tu respires. On t'opère d'un orgelet. Une image pittoresque mais désagréable de Madame Blanchard maquillant pour un faux viol Madame Blanchard, entre ses couvre-pieds et ses bougeoirs, c'est une vision bien peu hallucinante. Elle relève tout au plus de Paméla, et de la gravure anglaise.
( p.1071, Acte 3, sc.4)

Une histoire d'enfant, un motif de mélo, il n'en fallait pas plus pour qu'elle arrivât en un jour au terme que nous les femmes folles n'atteignons qu'après des années. Enceinte de l'amour! Ô mon Dieu! L'amour, la volupté et la haine sont nés chez Madame Blanchard d'une fausse grossesse.
( p.1071, Acte 3, sc.4)

Les daguerréotypes étaient dans sa mémoire, tirés par elle. Ils y sont... C'est maintenant qu'elle le retient, qu'elle l'étreint. ( p.1071, Acte 3, sc.1V)
Il vous laisse étendue, niaisement et ridiculement étendue à terre, maintenue sur le dos par un démon que vous n'avez pas reconnu dans la nuit, et qui vous répète sans relâche, depuis ce matin, tous les gestes et les mots de l'amour, toutes les voluptés et ses hontes, et qui n'est que vous-même ( p.1072, Acte 3, sc.1V) Sur nos pauvres âmes en joie et en douleur, le couple juge revendique toujours son mandat? ( p.1075, Acte 3, sc. 6)
Mais ce qui lui donnait sa séduction, c'est son inconscience de pensionnaire, ses ruades de pouliche. Ce sera lamentable. Vestale dégradée et languissante, il y aura sur Madame Blanchard un masque loué au vestiaire des ouvroirs et des sacristies. Hélas, c'est la vie. Il n'y a que les vieilles filles qui puissent tenir ici-bas le serment des vierges... ( p.1075, Acte 3, sc. 6)