I - LES LIEUX CULTUELS ET LE RELIQUAIRE

La diversité des sociétés initiatiques et secrètes, des confréries, des pratiques cultuelles, des esprits et des génies sacralisés... dont nous avons examiné quelques caractéristiques vont de pair avec la multitude de lieux cultuels. Ici tout espace est susceptible de devenir un lieu cultuel. C’est le cas du carrefour des chemins, du coin d’une case familiale, de l’arrière de celle-ci, de l’olèbè, du cimetière, d’un ancien village, d’un champ, d’une sorte d’enclos situé dans un bosquet ou en pleine forêt... Cette diversité tient à la fois à la symbolique du lieu, à la perception du sacré, à l’exigence du rituel et au respect des arguments qui établissent l’efficacité de l’acte rituel. Ainsi une dévotion peut être rendue dans quelque espace que ce soit pourvu que l’esprit destinataire perçoive le message et satisfasse à l’attente des sollicitants.

Il faut différencier la symbolique de ces lieux selon qu’il s’agit d’une société initiatique ou secrète et d’un rite lignager. Les premiers sont une propriété indivise des initiés ou de la société initiatique et sont interdits aux néophytes. Leur usage est rigoureusement réglementé. Tandis que les seconds, bien qu’appartenant à un lignage, sont des lieux publics intégrés au vécu communautaire et ont un double usage : rituel et normal. Ces caractéristiques confèrent ainsi aux lieux cultuels des sociétés initiatiques une symbolique particulière notamment dans le Ndjobi où ils deviennent des cadres soustraits de l’activité quotidienne des habitants d’un village. Cette particularité renforce leur caractère sacré.

L’analyse portera essentiellement trois lieux cultuels complémentaires et d’importance inégale dans la dynamique du Ndjobi: le fouoyi, l’olèbè-à-ndjobi et le mba-è-ndjobi (ou Nkina); au détriment.certains lieux dont la fréquentation est épisodique tel que l’ontswé-à-mpoho 81 et les divers endroits de la forêt où sont recueillis les écorces, les herbes, l’argile blanche et d’autres composantes indispensables aux divers rituels.

Précisons que dans la conception Mbéti, le village et la forêt appartiennent à l’espace villageois dans la mesure où il est défini par l’association de l’espace résidentiel, des espaces économiques et des lieux cultuels. C’est ainsi que certains rites débutent au village et prennent fin dans la forêt ou vice versa. D’autres, par contre, commencent au village, se poursuivent dans la forêt et se terminent au village. Le village et la forêt sont en rapport de contraste voire d’opposition symbolique ; permettant de comprendre le sens des allées et venues des initiés entre le fouoyi et l’Olèbè-à-ndjobi.

Notes
81.

L’extrémité occidentale du village où les danseurs se préparent pour la dernière phase publique de l’Okwandji au village.