II - LE Ndjobi ET LES SECTES DANS LE PAYS MBETI DES 1988

Longtemps le pays Mbéti s’est tenu quelque peu en marge de l’activité et de la prolifération des sectes. Et aucun Mbéti n’a jamais dirigé, ni créé un mouvement religieux de grande envergure et s’inspirant du christianisme tant dans son territoire qu’au Congo. Souvent les sectes qui ont tenté de s’y installer vinrent de l’extérieur et furent dirigées par des non-Mbéti. Considérées comme étrangères par les autochtones, elles ne purent pas s’implanter, n’eurent ici aucun impact social. Ce fut le cas des Témoins de Jéhovah (en 1972), du Ngounza, de l’Eglise Pentecôtiste (entre 1974 et 1976). D’ailleurs le Matsouanisme (d’origine Lari) installé à Kellé en plein pays Mbéti depuis 1963 concentre son activité sur la dizaine des membres de la communauté Lari; même les Eglises catholique et protestante installées ici au début du XXè siècle voient leur influence s’étioler au fil des décennies, comme si les Mbéti rejetaient tout syncrétisme religieux ou que ces mouvements religieux ne correspondaient pas à leurs attentes, ni à leur culture.

Mais l’installation de la secte du Saint-Esprit (avec le Pasteur E. Ambeni) à Okoba I (dans la sous-préfecture de Mbama) et la création du mouvement prophétique (de Mme Otokawa) à Oponga (dans la sous-préfecture d’Etoumbi) à partir de 1988 modifieront totalement les données de la coexistence habituelle entre le Ndjobi et les religions universalistes dans le pays Mbéti. Est-ce l’appartenance au groupe ethnique Mbéti de la prophétesse Otokawa et du pasteur Ambéni, leur connaissance de leur environnement social, leur démarche contraire à celles des religions universalistes qui expliqueraient une adhésion massive des femmes et des jeunes gens à ces sectes ? Ce phénomène inédit est d’autant plus intéressant à ’analyser qu’il met en évidence un nouveau type de rapport de force dans le pays Mbéti entre le Ndjobi et les sectes, entre le Ndjobi et le pouvoir politique.