Introduction

Un facteur essentiel de réussite de toute organisation est la maîtrise de l’information : celle qui circule à travers elle, celle qui existe autour d’elle, celle qu’elle produit. Tous les acteurs sont concernés de près ou de loin par sa gestion, son utilisation, sa communication. L’intérêt de cette maîtrise a été souligné par des disciplines telles que les sciences de l’information et de la communication, mais aussi celles de la gestion. En effet il est possible d’aborder ’l’objet’ information de ces différents points de vue, suivant l’objectif que l’on veut lui donner. Mais les études qui en découlent se recoupent et se rejoignent lorsqu’il est question d’intelligence économique ou de veille stratégique. Quant au capital immatériel de connaissances, ’‘sa gestion devient un des impératifs majeurs de toute réflexion prospective et stratégique au sein d’une firme’’ [ZACK01].

Nous vivons au sein d’une ’‘société de l’information dans laquelle la gestion, qualité, rapidité de l’information sont des facteurs déterminants de compétitivité. Pour relever un tel défi, l’entreprise doit engager une politique d’intelligence économique, laquelle englobe la mise en place d’une fonction d’observation et de surveillance en vue de détecter, analyser et suivre tous les signaux susceptibles de conforter, d’infléchir ou de remettre en cause sa stratégie ou les décisions prises’.’ [AFNO98]

Au vu de l’importance, pour une entreprise ou quelque organisme que ce soit, de la gestion efficace de l’information interne et externe, il faut ’‘apprendre à maîtriser les ’flots informationnels’ avant de prendre une quelconque décision stratégique’’ [REVE98].

Ces quelques remarques générales se déclinent tout particulièrement pour un centre de recherche et développement, puisque ’‘le positionnement des informations stratégiques dans le système de recherche fondamentale, recherche et développement, production, est une étape très importante. L’identification des points d’excellence informationnels doit permettre de maîtriser rapidement les facteurs critiques et décisionnels. Ceci est l’enjeu des techniques de veille stratégique, technologique et scientifique.’’ [BRAN97]

C’est donc avec ces multiples angles de vision que nous aborderons la problématique d’une gestion efficace des flux d’information technique dans un contexte particulier, celui de la recherche et du développement2.

Or nous pouvons facilement constater que le flot informationnel submerge trop souvent les différents acteurs de l’entreprise. Le temps qu’ils ont à consacrer à la recherche et collecte d’information représente généralement un pourcentage très faible de leur travail, même s’ils ont des fonctions liées au traitement de cette information (comme par exemple un rôle dans un réseau de correspondants pour la veille ou l’intelligence stratégique).

La situation est presque paradoxale :

Ces constats nous ont amenés au besoin de faire le point sur les méthodes d’organisation et les outils disponibles pour mieux gérer l’information stratégique afin d’en faire un meilleur usage pour la stratégie. Nous nous proposons d’apporter des éléments de réponse à la question suivante :

Comment, dans un contexte de recherche et développement, gérer et optimiser l’information circulant dans les réseaux existants, qu’ils soient humains ou techniques, pour l’aide à la décision, en terme d’organisation, support et outils ?

Nous partirons du besoin de penser la gestion des flux d’informations internes et externes à l’entreprise de façon globale, donc moins cloisonnée par fonctions (documentation, veille, intelligence économique, gestion des connaissances...).

Du général...

Après avoir largement présenté les concepts clés d’intelligence économique, de veille stratégique et de gestion des connaissances, et développé les questions que cela soulève, nous analyserons les points de convergences de ces fonctions de traitement de l’information dans l’entreprise.

Puis nous verrons quelle place occupe l’information scientifique et technique et la connaissance dans un contexte de R&D, quelles sont ses spécificités, ainsi que les évolutions actuelles de ce domaine (chapitre 1).

Sur quels types d’outils peut-on se reposer pour l’activité d’intelligence technique, que peut-on faire en particulier avec les fonctionnalités proposées par l’internet ? Nous essaierons dans un troisième chapitre d’apporter à ces questions des éléments de réponse basés sur une veille que nous avons menée ces dernières années, et nous mettrons ces données en perspective avec les besoins réels des personnes directement intégrées aux processus de gestion d’informations stratégiques.

au particulier

Dans un deuxième chapitre, nous verrons comment organiser efficacement l’aide à la décision par le choix de méthodes ayant fait leurs preuves. Nous nous intéresserons en particulier au rôle des différents acteurs intervenants dans ce processus, aux scénarios de veille et d’intelligence technique et stratégique auxquels ils sont confrontés, ainsi qu’aux problèmes rencontrés et aux solutions envisagées.

Les fonctionnalités d’accès et de partage de l’information s’avérant prioritaires, nous présenterons dans le dernier chapitre nos travaux de conception d’une plate-forme pour optimiser le travail des professionnels de l’intelligence technique et stratégique, en particulier des groupes de veilleurs thématiques. Nous verrons sur quelles bases les choix d’outils et de sources ont été faits, et comment pourrait évoluer un tel système.

L’objectif global de ce travail de recherche a été, durant plus de trois années, de proposer une méthode globale de gestion des réseaux humains et techniques pour l’aide à la décision stratégique. Nous essayons de montrer comment les objectifs et le contexte organisationnel doivent guider les choix de conception d’un système pertinent.

Notes
2.

Nous utiliserons dans ce document l’abrégé ’R&D’.