1.1 Gestion de portefeuille et réglementations bancaires

Nous supposons ici que les managers de la banque sont averses au risque. De plus, supposons qu’ils se comportent en gérants de portefeuilles d’actifs financiers. Leurs décisions dépendent alors d’un arbitrage entre le rendement anticipé et le risque des différents actifs. Ce cadre d’analyse est repris de Caprio (1996), Artus (1990) et Greenwald et Stiglitz (1990).

La banque fixe son taux d’intérêt débiteur en fonction du risque du crédit à octroyer. On peut ainsi définir une frontière des prêts (courbe FP de la figure 3) qui détermine l’ensemble des couples rendements/risques que la banque peut choisir.

Cette courbe est croissante dans un premier temps: lorsque le risque augmente, la banque exige un plus grand rendement. Cette courbe est décroissante à partir d’un certain niveau de risque car on suppose qu’il existe des asymétries d’information entre la banque et l’emprunteur privé (les emprunteurs ont une meilleure connaissance des caractéristiques de leurs projets - rendement et risque - que la banque). Dans ce cas, des phénomènes de sélection adverse et d’aléa moral conduisent à une situation telle que lorsque le taux d’intérêt augmente, la qualité des emprunteurs diminue, ce qui entraîne un rendement décroissant du portefeuille de la banque (Stiglitz et Weiss, 1981). Ainsi, la frontière de prêts de la banque devient décroissante à partir d’un taux maximum au-delà duquel la banque n’octroie pas de prêt.

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Figure 3 Choix de portefeuille de la banque entre crédits et Bons du Trésor

Les banquiers peuvent détenir deux types d’actifs: des actifs risqués correspondant à des crédits au secteur privé et des actifs non risqués émis par l’Etat (Bons du Trésor), dont le rendement est r BT. La combinaison d’actifs risqués et non risqués correspondant à un portefeuille efficient est représentée par la droite PE : elle passe par le point (r BT ,0) et est tangente à la frontière des prêts en A. Le taux d’intérêt sur les crédits est déterminé par le point A.

Les courbes d’iso-utilité sont représentées en pointillé sur la figure. Comme les banques sont averses au risque, elles n’acceptent de risques élevés qu’en échange de rendements anticipés élevés. On suppose de plus que l’aversion au risque des banques est décroissante avec la richesse : les courbes d’indifférence sont plus ’aplaties’ lorsque la richesse augmente, pour un même niveau de risque.

Les caractéristiques du portefeuille (risque/rendement) sont déterminées par le point de tangence B. Les banques vont donc détenir un portefeuille composé d’actifs risqués rémunérés au taux r A (avec un risque σ A) et de Bons du Trésor non risqués au taux r BT; le taux d’intérêt et le risque moyen du portefeuille sont donnés par le point B.

A partir de ce modèle, différentes situations caractérisant un marché financier réprimé peuvent être analysées. En particulier, quatre types de réglementations sont étudiés: le plafonnement des taux d’intérêt débiteurs, l’obligation de détention de Bons du Trésor, l’obligation d’octroyer un montant minimum de crédits à certains secteurs, mais aussi les règles prudentielles (en particulier, l’obligation faite aux banques de détenir un capital minimum).