2.4.2 Période 1992 à 1995: post-libéralisation

Les résultats de l’estimation sur la période 1992 à 1995 sont présentés dans le tableau 26. Le test de Lagrange et celui d’Hausman modifié nous amènent à privilégier l’estimateur des moindres carrés quasi généralisés.

Les résultats de l’estimation sur la seconde période (1992 à 1995) ne sont pas surprenants: pratiquement toutes les variables visant à contrôler l’intervention publique ne sont plus significatives. L’allocation du crédit ne semble pas dirigée par des critères imposés par les pouvoirs publics. Toutefois, les banques ne semblent pas encore avoir mis en place des outils de gestion leurs permettant de se couvrir contre les risques de défaut entraînés par les effets des asymétries d’information. Si l’on analyse les résultats obtenus par les estimations MCQG, on constate que certains résultats restent inchangés par rapport à la période 1987 à 1990: sur cette période, comme précédemment, les variables log(capital) et sold/capital sont significatives avec un signe négatif, et les variables âge et privé ne sont pas significatives.

L’obligation des banques de déposer des réserves pour financer des créances d’exportation a été supprimée en 1994 (cette mesure a été mise en place en 1989). Ce désengagement de l’Etat dans le financement des exportations apparaît clairement dans les résultats. Les entreprises exportatrices n’ont plus un accès favorisé au crédit dans la seconde sous-période.

La période allant de 1992 à 1995 a été chaotique au Maroc: d’une part par l’importance des réformes mises en place mais aussi par les résultats en termes de croissance (une croissance du PIB négative en 1992, 1993 et 1995 et un taux record de 10% en 1994 !). Ainsi, la non significativité de la variable efficience technique semble montrer que les banques n’ont pas la possibilité de juger de l’efficacité des entreprises, étant donné que trop d’éléments externes influencent celle-ci. Une explication complémentaire peut-être invoquée: on pourrait penser que les banques ne s’intéressent pas au niveau de l’efficacité technique des entreprises étant donné qu’elles ont une vision financière et de court terme.

L’évolution entre les deux périodes est symptomatique de la transformation de l’économie marocaine: le fort désengagement de l’Etat a entraîné une allocation des ressources qui ne dépend plus des critères de l’allocation administrée. En effet, la discrimination des entreprises dans leur accès au crédit qui apparaissait nettement avant 1992 n’est plus visible. Les critères sur lesquels les banques devraient baser leurs choix pour faire face aux asymétries informationnelles, tels que l’âge, la taille ou encore l’efficacité, ne sont pas déterminants sur la période récente au Maroc. Le manque de maturité des banques marocaines explique sans doute ce phénomène : elles ne reconnaissent pas encore qu’une performance économique est un gage de sûreté pour leur financement. Néanmoins, la probabilité estimée de présence continue qui devient significative dans la seconde sous-période met en évidence que les relations de confiance sont un déterminant non négligeable de l’allocation du crédit. En effet, cette probabilité est positivement corrélée à l’allocation du crédit, indiquant que les banques allouent d’autant plus de crédit que les entreprises ont plus de chance d’être présentes sur une longue période.