Section 3 Libéralisation financière et contraintes de financement dans le secteur manufacturier marocain

Au travers de l’analyse du comportement d’investissement des entreprises, la section précédente fournit le cadre théorique permettant de soumettre à réfutation l’hypothèse d’existence de contraintes financières. Dans cette section, nous mettons en oeuvre des estimations économétriques à partir de données d’entreprises manufacturières marocaines. Ces données, issues de l’Enquête Annuelle du Ministère du Commerce, de l’Industrie et de l’Artisanat du Royaume du Maroc, proviennent d’un panel de 472 entreprises manufacturières marocaines suivies sur la période 1989 - 1996. Elles rassemblent des informations à la fois comptables et institutionnelles (voir l’annexe du chapitre introductif pour des informations générales sur cette base de données ainsi que pour la définition des variables et l’annexe 9 de ce chapitre pour la constitution de l’échantillon utilisé dans cette section).

Pour estimer l’équation d’Euler, formalisée dans la section précédente, nous supposons que les termes fiscaux ainsi que les taux d’actualisation et d’intérêt sont constants. Cependant, l’ajout d’effets spécifiques individuels permet de tenir compte de l’hétérogénéité individuelle des entreprises quant à ces termes. Ainsi, l’équation d’Euler sous sa forme testable devient:

message URL FORM212.gif

Comme nous l’avons noté dans la section précédente, pour prendre en compte une situation de concurrence imparfaite sur le marché des biens et services, la variable Y/K est ajoutée à l’équation d’investissement (Bond et Meghir, 1994).

Plusieurs méthodes d’estimations prennent en compte l’aspect dynamique de ce type de modèle. Nous avons montré dans la section précédente que l’estimateur des moments généralisés développé par Arellano et Bond (1991) est efficace et convergent. Cet estimateur est construit à partir de conditions d’orthogonalités entre les résidus et les variables explicatives retardées (utilisées comme instruments), sous l’hypothèse d’indépendance sérielle des erreurs. Son calcul est facilité par l’existence d’un programme écrit sous le logiciel GAUSS (Arellano et Bond, 1998). Ce programme est utilisé ici.

Pour corriger les biais d’estimation introduits par la corrélation entre la variable endogène retardée et l’effet spécifique individuel, l’équation (52) est transformée en prenant les différences premières70. L’équation à estimer est alors:

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Pour corriger l’éventuel biais de sélection dû à la méthode de constitution de l’échantillon, la probabilité estimée de présence continue des entreprises dans l’échantillon (proba)i est incorporée à l’équation estimée (voir le deuxième chapitre pour les résultats de l’équation explicative de cette probabilité).

Plusieurs résultats d’estimation sont présentés ci-dessous : l’estimation sur l’ensemble de l’échantillon, puis en distinguant par période et enfin en différenciant par catégorie d’entreprises (effectif employé et montant des exportations).

Notes
70.

De nombreuses études existent sur l’estimation de fonctions d’investissement avec variables endogènes retardées, en utilisant l’estimateur d’Arellano et Bond (1991) sur des variables en différence première. Voir entre autres Siegfried (2000), Hansen et Lindberg (1997), Bond et Meghir (1994), Harris, Schiantarelli et Siregar (1994) et Devereux et Schiantarelli (1990).