2-5 Analyse des valeurs aspecto-modales des suffixes déterminatifs, marqueurs de propositions déterminatives en coréen

Il convient de préciser que nous anticipons ici notre étude sur les suffixes déterminatifs [nIn / In / Il / tOn] qui fonctionnent non seulement en tant que marques de subordination des propositions déterminatives, mais aussi en tant que marques des valeurs aspecto-modales du verbe subordonné auquel ils sont attachés. Ces suffixes déterminatifs sont comparables, en tant que marques de subordination des propositions déterminatives, aux morphèmes français comme qui, que, où, dont, etc. que la tradition du français analyse couramment comme pronoms relatifs. Mais, outre ce rôle du marquage de la subordination d’une proposition au nom, ces relateurs de propositions déterminatives jouent d’autres rôles dans le système de chaque langue et ces rôles sont bien différents entre ces deux langues. Etant donné que les suffixes déterminatifs du coréen ont pour rôle d’indiquer des valeurs aspecto-modales, ce qui n’est pas du tout le cas des marques des propositions déterminatives en français, nous nous somme décidée à étudier leurs caractéristiques morphosyntaxiques dans ce présent chapitre consacré aux formes verbales du coréen. En ce qui concerne les marques de subordination des relatives en français, nous les traiterons amplement au chapitre 5 réservé à l’étude contrastive de la relativisation dans les deux langues.

L’analyse de ces éléments, dits couramment “ suffixes déterminatifs ”, n’est pas simple à réaliser en coréen. Dans la mesure où ces éléments sont intégrés à la séquence verbale, leur analyse exige inévitablement une étude du système verbal de cette langue, système qui soulève lui-même des problèmes descriptifs délicats. Dans ce qui précède, nous avons retenu, rappelons-le, trois morphèmes [(I)n]/ [nIn]/ [(I)l] comme suffixes déterminatifs qui marquent les relatives ainsi que les autres types de propositions déterminatives, en leur reconnaissant un double rôle : d’une part, ils indiquent à la fois le caractère subordonné de l’unité phrastique qu’ils affectent et la relation de détermination que celle-ci a avec le nominal qu’elle précède ; d’autre part, ils participent à l’expression des valeurs exprimées normalement par les marqueurs verbaux, telles que celles aspecto-modales, notamment lorsqu’ils s’adjoignent aux verbes dits d’action dans les propositions déterminatives : [(I)n] → accompli / [nIn] → inaccompli / [(I)l] → éventuel. A la différence des éléments introduisant les relatives en français, ces suffixes déterminatifs qui marquent les subordonnées correspondantes du coréen ne posent donc pas de problème quant à la distinction entre pronoms relatifs et conjonctions. Mais ils suscitent toutefois des problèmes descriptifs d’ordre différent, auxquels les recherches actuelles sont loin d’apporter des explications cohérentes et appropriées.

Pour notre part, nous nous limiterons ici à présenter séparément les séquences déterminatives contenant les morphèmes [(I)n], [nIn] [(I)l] et également [tOn] que nous n’avons pas mentionné jusqu’ici, afin de rendre compte de leurs emplois (ou des valeurs, en dehors de celui de marque de subordination) dans les relatives. Compte tenu de la particularité du coréen qui différencie la séquence verbale de la proposition enchâssée — comme les relatives et les subordonnées circonstancielles — de celle de la proposition enchâssante ou de la proposition indépendante, il nous paraît intéressant d’examiner les séquences verbales des relatives que nous appelons « séquences déterminatives » en comparaison avec les séquences verbales correspondantes qui figureraient dans les propositions indépendantes, si elles y apparaissaient. Par opposition aux « séquences déterminatives », nous appelons ces dernières séquences terminatives.

Rappelons que les séquences terminatives se distinguent morphologiquement des séquences déterminatives, et même des séquences verbales des autres types de propositions subordonnées, par la présence de morphèmes appelés « terminatifs ». Ceux-ci ont pour rôle principal d’indiquer à la fois les types de phrase : déclarative, interrogative, exclamative, injonctive, et les six degrés d’honorification (dits aussi « styles » ou « registres ») selon la relation socio-hiérarchique établit entre le locuteur et l’interlocuteur. L’intérêt de cette comparaison est de permettre de cerner les caractéristiques morphologiques des suffixes déterminatifs et leurs emplois relativement à des marqueurs verbaux qui, en tant que marqueurs d’aspect ou de mode, jouent dans les séquences terminatives un rôle identique à celui des morphèmes déterminatifs. Mais elle permet également de montrer qu’il existe tout de même des contraintes et des valeurs (ou des nuances) sémantiques différentes entre les morphèmes déterminatifs et les marqueurs verbaux correspondants, bien qu’on puisse leur reconnaître l’emploi commun de marqueurs aspecto-modaux. Ce faisant, nous aborderons également quelques problèmes descriptifs soulevés par l’analyse de ces morphèmes, sans pouvoir pour autant prétendre apporter des explications appropriées et cohérentes à chaque problème posé.