4-3-3 Les marqueurs de subordination des relatives

Appelés traditionnellement « suffixes déterminatifs » mais dénommés aussi « complémenteurs » ou encore « relativiseurs » par les générativistes, les subordonnants des relatives du coréen n’ont pas fait l’objet privilégié d’études, par rapport aux pronoms relatifs des subordonnées correspondantes du français qui ont donné lieu à des recherches très abondantes. Grosso modo, les linguistes coréens s’intéressent, d’une part, au problème de la représentation des subordonnants des relatives, et d’autre part aux rôles, autres que celui de marquage de subordination, qu’ils assument à l’intérieur des relatives.

En effet, en ce qui concerne la représentation des subordonnants, les tenants de la théorie transformationnelle expliquent la présence d’un subordonnant déterminatif comme [nIn] dans la forme verbale subordonnée par un processus de transformations :

En revanche, I-S I, H-P Im (1983) et la théorie GB leur accordent une position structurale COMP dès au niveau de la structure profonde de la relative :

D’autre part, quelques linguistes comme Ch-K Kim (1990) abordent le problème de l’interprétation « temporelle » de la subordonnée relative en s’appuyant sur l’idée, largement partagée, que les subordonnants ont pour rôle, outre celui de marquer la subordination, d’exprimer des valeurs temporelles différentes, par exemple, [(I)n] → passé / [nIn] →présent / [(I)l] → futur. D’après ce linguiste, la « temporalité » de la subordonnée relative peut être interprétée et calculée, d’un côté, par rapport au temps exprimé par la proposition principale, et de l’autre, selon les significations « temporelles » qu’impliquent intrinsèquement les verbes de la proposition principale, que l’auteur divise en trois groupes : verbes comme [hwesaNhata] (se souvenir), [pansONhata] (regretter), etc. impliquant une signification de passé ; verbes comme [yechIkhata] (prévoir), [yenhata] (prédire), etc. impliquant une signification de futur ; et verbes « neutres » du point de vue temporel n’impliquant des significations ni de passé, ni de futur.

Rappelons que le coréen ne connaît pas de règles de concordance des temps, qui s’imposent par contre en français au verbe de la subordonnée par rapport au verbe de la principale, notamment lorsque celui-ci est au passé.

On notera également qu’au lieu d’admettre la présentation temporelle des subordonnants déterminatifs (I)n / nIn/ (I)l telle qu’elle est présentée dans la plupart des grammaires et des ouvrages linguistiques du coréen, nous avons opté, comme H-L Kim (1992), pour une présentation aspectuelle du système verbal du coréen, en pensant que les morphèmes qui affectent le verbe, soit avant le suffixe terminatif, dans les phrases indépendantes ou enchâssantes, mais aussi les subordonnants déterminatifs (I)n / nIn/ (I)l qui affectent la racine verbale dans les subordonnées déterminatives, sont de nature davantage aspectuelle et modale que temporelle. C’est pourquoi nous présentons ces trois suffixes déterminatifs comme une variation aspecto-modale, reposant sur l’opposition « accompli » ((I)n), « inacccompli » (nIn) et « éventuel » ((I)l).

Par ailleurs, étant donné que les analyses morphématiques de ces subordonnants varient d’un linguiste à l’autre, on observe que leur nombre n’est pas fixe. Leur présentation est le plus souvent ternaire : nIn / (I)n / (I)l. Mais certains linguistes et grammairiens comme K-S Nam et Y-K Ko (1989), J-M Li (1985), Ch-K Kim (1990) y ajoutent [tOn] auquel ils accordent une valeur de « passé résolu ou remémoratif ». D’autres comme I-S I et H-P Im (1983) réduisent ces subordonnants à deux (I)n / (I)l, et analysent [nIn] et [tOn] comme étant composés de deux morphèmes ayant des valeurs différentes : [nIn] → nI (valeur temporelle ‘présent’) + n (déterminatif) et [tOn] → tO (remémoratif) + n (déterminatif).

Pour notre part, seuls les trois suffixes nIn / (I)n / (I)l seront pris en considération comme subordonnants déterminatifs. [tOn] doit être envisagé comme une forme amalgamée de deux morphèmes : le suffixe remémoratif [tO] est ajouté au déterminatif [-n] exprimant la valeur accompli pour, ensemble, exprimer le « passé révolu ». Nous reviendrons plus concrètement sur les valeurs aspecto-modales qu’assument ces trois subordonnants déterminatifs dans un chapitre ultérieur.