6-1 Observation parallèle de la structure relative et de la structure phrastique correspondante

Etant donné que l’analyse des fonctions relativisables et relativisées est plus délicate à réaliser en coréen qu’en français, nous aimerions procéder, dans un premier temps, à une étude systématique des constituants nominaux marqués par quatre particules casuelles [ka/i], [lIl/Il], [esO] et [(I)lo]. Elle permettra de voir s’ils sont ou non accessibles à la relativisation et si l’identification de leur rôle dans la structure relative est facile ou non et, dans ce dernier cas, ce qui l’empêche. Cette analyse est donc destinée à préparer le terrain pour la discussion qui s’ensuivra. Pour la faciliter, nous présenterons chaque fois en parallèle une structure relative où le terme nominal relativisé est morphologiquement absent avec sa particule casuelle, et une structure phrastique qui lui correspond, où figurerait le terme nominal concerné avec sa particule casuelle. Les cas correspondants du français seront observés au fur et à mesure.

Pour les constituants nominaux marqués par ces quatre particules casuelles, il nous paraît raisonnable de ne pas leur associer de façon systématique une fonction syntaxique particulière, notamment pour ceux marqués par les deux dernières particules [esO] et [(I)lo] qui indiquent des fonctions obliques que nous appellerons fonctions de « compléments circonstanciels »156. En effet, on sait que [ka/i] sert à indiquer généralement la fonction syntaxique de ’sujet’ ou ’attribut de sujet’ (nominatif) et [lIl/Il] la fonction d’’objet’ (accusatif), sans pour autant exprimer une relation sémantique concrète. En revanche, [esO] et [(I)lo] marquent les rapports syntactico-sémantiques tels que compléments de lieu, de temps, d’instrument, etc. que peuvent établir les constituants nominaux auxquels elles sont postposées avec un prédicat verbal. Comme les prépositions du français qui leur correspondent fonctionnellement et sémantiquement (à, en, par, pour, etc.), chacune de ces particules casuelles présente des effets de sens variés selon le contexte où elles apparaissent. Par exemple et comme nous allons le voir, une particule comme [(I)lo] marque un constituant nominal qui peut assumer dans des constructions prédicatives différentes fonctions telles que complément directionnel, complément d’instrument, complément de moyen, complément de titre, etc. Selon les cas, cette particule postposée peut avoir pour correspondant français des prépositions ou des adverbes à, vers, avec, par, pour, comme, etc. C’est pourquoi, au lieu d’associer systématiquement chaque particule casuelle à telle ou telle fonction syntactico-sémantique, il importe de considérer les divers emplois que peut avoir le constituant nominal qu’elle marque dans des constructions prédicatives différentes.

Il nous semble utile sur un plan heuristique d’observer ainsi les différentes fonctions syntactico-sémantiques pouvant être assumées, dans une structure phrastique indépendante, par les constituants nominaux affectés de ces particules casuelles, parallèlement aux cas de leur relativisation. Mais disons dès maintenant que ces différentes fonctions syntactico-sémantiques ne sont pas toutes accessibles à la relativisation. Outre les contraintes de relativisation portant sur certaines fonctions syntaxiques en coréen, l’observation nous permettra de mieux cerner les problèmes d’analyse que soulèvent du point de vue du décodage certaines structures relativisées ou supposées telles, notamment lorsque la position relativisée est celle d’un complément circonstanciel. A la suite de cette observation, nous reviendrons amplement sur ce dernier problème, particulièrement délicat en coréen.

Notes
156.

Nous n’allons pas faire ici de distinction nette entre compléments fortement régis par la valence du verbe, ceux par exemple que l’on désigne traditionnellement en français par « objet indirect », et compléments faiblement régis par la valence du verbe, ceux couramment appelés « compléments circonstanciels » ou « circonstants », car il n’est pas toujours évident de les distinguer en coréen. A l’instar de certains linguistes, nous nous contenterons d’opposer les fonctions « directes » comme le sujet, l’objet et l’attribut aux fonctions « obliques » autres que ces trois dernières fonctions. Ces fonctions obliques seront appelées communément « compléments circonstanciels », même si ce dernier terme suggère plus un type de rôle sémantique qu’assume dans le procès le référent du constituant nominal qu’un type de fonction syntaxique.