4.3. Le désaccord

4.3.1. Remarques préliminaires

L’acte de désaccord se trouve un peu partout dans le débat radiophonique qui constitue notre corpus. Il se définit tout d’abord comme une réaction oppositionnelle verbale ou non-verbale à une action initiative, mais il a aussi le caractère de provoquer une réaction de la part de l’interlocuteur, en exprimant le jugement ou l’opinion du locuteur lui-même. Ce type de réaction est plus complexe que l’acte d’accord, dans la mesure où il est une action délicate et plus ou moins menaçante pour la face positive du partenaire, et qu’il se réalise dans divers contextes et dans l’ampleur des variations. De même, la typologie des désaccords peut aussi varier selon les critères retenus. Pour les classifier, il est salutaire de prendre en considération le modèle de Brown et Levinson (1987), mais il ne convient pas complètement pour analyser le tour de désaccord qui se produit dans notre corpus. Le cadre qu’ils utilisent pour identifier les énoncés qui comportent des FTAs repose sur la dimension de caractère direct (accomplir ouvertement un FTA) ou indirect (accomplir non ouvertement un FTA). Et si le FTA se réalise ouvertement, il peut se produire avec ou sans action réparatrice. Mais le FTA réalisé ouvertement sans action réparatrice reste encore flou dans notre corpus, dans la mesure où il peut comporter des expressions directes et des expressions aggravantes qui sont renforcées par des durcisseurs verbaux, paraverbaux, et non-verbaux66. Parmi ces derniers nous considérerons seulement les durcisseurs verbaux. Nous allons donc classer les actes de désaccord en trois types basés sur la présence ou non des marqueurs verbaux qui adoucissent ou durcissent la force du désaccord. Voici, d’un point de vue ternaire, notre typologie des actes de désaccord que les interlocuteurs au débat utilisent sans cesse, consciemment ou non :

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Le caractère direct du désaccord est plus saillant que l’indirect dans le cadre du débat radiophonique, car dans ce cas, on a tendance à attendre et à préférer la clarté de l’opinion ou de la perspective. En effet, étant donné que l’acte de désaccord comporte intrinsèquement une nature menaçante, le degré de gravité du désaccord est largement fonction de la clarté ou de l’ambiguïté de la force illocutoire, et de l’existence des adoucisseurs ou des durcisseurs. Ainsi, le type (4) ci-dessus qui est proche de l’impolitesse désigne le désaccord durci, et les types (1) et (2) qui se situent du côté de la politesse correspondent au désaccord adouci. En revanche, le type (3) qui est intermédiaire est considéré comme désaccord ni adouci ni durci, mais attendu dans ce type d’interaction. Dans ce sens, il conviendrait d’envisager ces types de désaccord en connexion avec les trois notions proposées par Lakoff (1989), telles que «polie», «apolie», et «impolie».

Notes
66.

Les processus d’atténuation ou de renforcement de FTA peuvent se faire non seulement au niveau verbal, mais aussi au niveau paraverbal ou non verbal, qui sont énormément importants pour adoucir ou durcir la force menaçante d’un acte de langage. Dans ce travail, nous ne nous occuperons que du niveau verbal.