2.2.3. Le pronom de deuxième personne (’vous’)

Il est évident que dans la conversation dyadique celui qui est ’délocuté’ ne peut devenir un des deux protagonistes, ’il’ renvoyant à l’être qui existe hors de la situation de conversation. C’est le cas notamment du cadre participatif particulier au dilogue. Mais il n’en est pas de même pour le trilogue qui a un schéma d’allocution plus complexe : un locuteur et deux destinataires qui n’ont pas le même statut. Ainsi, dans la situation triadique, le locuteur parle à deux interlocuteurs : l’un est le destinataire direct, et l’autre le destinataire indirect qui peut être désigné comme tel par le pronom de troisième personne ou par un désignatif, et qui participe quand même à l’interaction en cours. Toutefois, dans le contexte du débat à la radio il existe aussi des cas où le tour d’un débatteur sélectionné ne s’adresse pas seulement à l’animateur, mais peut aussi s’adresser à l’autre débatteur avec le pronom de deuxième personne, comme en 037 :

(1) (Répliques 7 : 038-039)

Dans l’extrait ci-dessus, l’intervention du débatteur (J.-P. Chrétien), dans la mesure où elle est simplement une réponse à la question de l’animateur (Alain Finkielkraut), semble s’adresser, en premier lieu, à l’animateur, mais, d’autre part, le pronom ’vous’ utilisé dans cette intervention renvoie à l’autre débatteur, et cela indique que c’est lui qui est, en fait, le destinataire direct du tour du débatteur (Chrétien). A cet égard, on peut dire que le format de réception reste ambivalent dans l’interaction triadique.

Enfin, comme mentionné ci-dessus, le système d’alternance des tours pose la question de l’emplacement du changement de tour et de la sélection du locuteur suivant. Dans le module d’interview, le système d’alternance met en jeu deux processus gérés par l’animateur : la récupération et la relance de la parole des invités. Pour reprendre la parole, le meneur interrompt, dans bien des cas, le tour de son partenaire sous la forme de l’autosélection. Il existe cependant des cas où il peut reprendre la parole à la place transitionnelle, dans la mesure où c’est toujours l’animateur qui prend la parole lorsqu’un débatteur ne se sélectionne pas lui-même comme locuteur suivant à la fin du tour de l’autre débatteur. Pour le cas de l’allocation de tour, l’alternance fonctionne dans la plupart des cas sur la sélection du locuteur suivant par l’animateur, mais aussi sur l’auto-sélection qui se produit dans le chevauchement.