4.3.2. L’interruption confirmative

Dans le débat radiophonique qui constitue notre corpus, le tour du débatteur peut être interrompu soit par une expression d’opposition ou d’approbation de l’autre débatteur ou de l’animateur, soit par une question ou une demande de confirmation. Il arrive que la demande de confirmation soit réalisée sous forme d’interruption par le débatteur ou souvent par l’animateur :

(1) (Répliques 2 : 144-146)

L’exemple ci-dessus montre le cas, marqué par la flèche, de l’interruption qui se produit dans la ’pause intra’ pour que le débatteur (Francine Demichel) donne en 145 son adhésion à l’argument du partenaire (Evelyne Pisier). Dans l’exemple (1), la confirmation est marquée par la présence du ’hein’ qui oriente la réaction de l’interlocuteur du côté de la confirmation74. Elle repose sur l’élaboration de la formule du partenaire (’au jury de, d’école nationale de la magistrature je ne peux pas laisser dire qu’il y a des quotas’). C’est donc une hétéro-reformulation avec modification syntaxique.

D’autre part, la confirmation se réalise souvent dans l’intervention de l’animateur après le tour d’un débatteur dans lequel celui-ci propose son argument. Il arrive que l’animateur l’interrompe avec un chevauchement afin de confirmer le contenu des informations :

(2) (Répliques 7 : 010-012)

Dans l’exemple (2), l’interruption marquée par la flèche est une intervention confirmative de l’animateur, qui se produirait dans la ’pause inter’. L’interruption confirmative a pour but de contrôler l’incompréhension et d’amorcer une discussion essentielle, en se produisant non seulement dans le milieu-chevauchement, mais aussi dans la ’pause intra’ comme dans l’exemple (1). Ainsi, dans les exemples ci-dessus, les interlocuteurs interrompus répondent à la demande de confirmation sous la forme de l’hétéro-répétition (’ils le disent’, ’au Zaïre’) et/ou d’un marqueur d’accord (’oui’, bien sûr’), et reprennent la parole avec le fil conversationnel précédent. L’interruption confirmative se clôt tout de suite avec la réponse positive, comme dans les extraits ci-dessus. Mais, dans le cas où elle est suivie plutôt par une évaluation négative, elle s’enchaîne à un échange supplémentaire (’échange latéral’) qui s’enchâsse dans l’activité en cours pour traiter le problème.

(4) (Répliques 7 : 134-143)

Dans l’exemple ci-dessus, le tour de parole de l’animateur (Alain Finkielkraut) en 135 n’est rien d’autre que l’interruption confirmative produite dans le chevauchement avec le locuteur précédent (Bernard Debré). Cette confirmation est réfutée en 136 par le débatteur (Debré) et accompagnée d’une marque d’opposition (’mais non’). Au moment suivant, ces deux interlocuteurs veulent donner leurs propres explications dans des échanges supplémentaires dont les tours sont perturbés par le chevauchement. Les interventions de l’animateur (Finkielkraut) en 137 et en 139 apparaissent comme une proposition pour justifier le sens de son tour. Elles sont en 141 acceptées par le débatteur (Debré) avec le marqueur d’approbation (’oui’) et ratifiées aussi par l’animateur lui-même en 142, même si son intervention n’a pas le statut d’un tour. Leur conflit est négocié et résolu, et le débatteur (Debré) reprend la parole à la fois pour expliquer de nouveau son désaccord en 136 et pour conserver la continuité d’une activité principale qui avait été arrêtée en 134. En conséquence, le tour de l’animateur en question contient un acte subordonné qui s’enchâsse dans une activité principale en 134, et il est donc prolongé par l’échange latéral.

Notes
74.

A. Auchlin, ’Complémentarité des structures thématiques et fonctionnelles pour l’accès aux interprétations dans le discours’, Cahiers de linguistique française, 1986, p. 175.