CHAPITRE 5
Actes d’accords et de désaccords dans le débat

1. Les enchaînements dans le débat radiophonique

Selon Kerbrat-Orecchioni (1990 : 198), une conversation se présente comme une succession de tours de parole, qui n’est pas régie seulement par les règles d’alternance, mais aussi par des règles de cohérence interne qu’elle classe en trois types de cohérence :

Cohérence interne à une même intervention de L1 ou de L2 ;

Cohérence entre les différentes interventions successives de L1 ou de L2 (’auto-continuité’) ;

Cohérence entre interventions produites consécutivement par deux locuteurs différents (’hétéro-continuité’).

C’est la troisième et dernière forme de cohérence (’hétéro-continuité) qui nous intéresse ici, dans la mesure où elle est un moyen fondamental d’organiser la conversation. Sacks (1969) et Schegloff (1972) utilisent le terme de «dépendance conditionnelle» pour désigner la relation de cohérence entre le premier et le second élément d’une paire adjacente, alors que Goffman (1987) emploie les expressions «contrainte systémique» et «contrainte rituelle». Kerbrat-Orecchioni (1990 : 193) note, quant à elle : «toute intervention crée sur la suite un certain nombre de contraintes, et un système d’attentes», qui sont fonction du type d’interaction. Les contraintes d’enchaînement consistent en quatre types de conditions selon Moeschler (1985 : 116-117) :

la condition thématique qui impose au constituant réactif le même thème discursif que celui du constituant initiatif ;

la condition de contenu propositionnel qui impose au constituant réactif d’être en relation sémantique avec le constituant initiatif ;

la condition illocutoire qui impose au constituant réactif le type de sa fonction illocutoire ;

la condition d’orientation argumentative qui impose au constituant réactif d’être coorienté au constituant initiatif.

Le débat à la radio qui constitue notre corpus présente un thème principal et des sous-thèmes qui sont introduits à certains moments de l’interaction par les débatteurs ou l’animateur, et qui peuvent être acceptés ou refusés par le partenaire. Cela signifie que ce type d’interaction comporte des échanges reliés par «un fort degré de cohérence sémantique et/ou pragmatique», au niveau de son organisation globale et locale. Les enchaînements du débat sont assurés systématiquement par le couple question-réponse ou par les assertions argumentées.