2.2. Avec le marqueur d’opposition

Le désaccord direct se réalise par les marqueurs discursifs d’opposition (’ani’ ou ’kûnde’) sans avoir le morphème de négation dans le tour en question. (1) en est l’exemple, extrait de l’émission, «Jipjung tolon», sur l’intégration des assurances maladie :

(1) (Jipjung 7 : 033-034)

Dans l’extrait ci-dessus, le débatteur (M. Yun) répond en 033 à la question de l’animateur (M. Tchoe) sur ce à quoi renvoie la classe qui a des droits acquis selon lui. Comme il n’apporte pas l’information souhaitée, l’animateur (Tchoe) tente en 034 d’interrompre le tour de son interlocuteur (Yun), en ayant recours à ce marqueur d’opposition (’ani’)141, et de relancer de nouveau la question : ani je jilmun-ûn (’non ma question’). Cet énoncé en début de tour implique que Tchoe a déjà posé cette question dans le tour précédent, et qu’il la reformule encore une fois dans le tour en cours. C’est la raison pour laquelle cette partie initiale de son tour peut être considérée comme un type de désaccord métadiscursif. Le refus du tour de Yun, introduit par ’ani’ ne porte pas sur le contenu lui-même de la réponse de Yun, mais sur la pertinence de cette réponse. Autrement dit, le débatteur (Yun) ne respecte pas le principe conversationnel de la maxime de «relation» au sens de Grice. L’animateur intervient pour éviter la déviation du sujet de conversation qu’il avait proposé, en employant le marqueur d’opposition (’ani’). Etant donné que ce marqueur nie le précédent tour du partenaire, il indique que le tour de Tchoe repose tout d’abord sur le désaccord avec la réponse de M. Yun. Ce désaccord ne porte pourtant pas sur la vérité ou la fausseté de la réponse, mais sur la non pertinence de la réponse, dans la mesure où la contribution conversationnelle de M. Yun ne contient pas l’information qui correspond à ce qui est demandé par la question de l’animateur.

Examinons le cas de désaccord direct qui peut se caractériser dans la séquence de discussion par l’usage mutuel de marqueurs d’opposition. L’exemple (2) en est une illustration ; il est extrait de l’émission «Jipjung Tolon» où deux débatteurs (Yun et Kim) débattent sur le problème de la gestion des sources d’eau minérale :

(2) (Jipjung 6 : 162-165)

Dans l’exemple (2) ci-dessus, le désaccord est marqué par ’ani’ (’non’) dans le tour de Yun en 163 et par ’kûnde’ (’mais’) dans celui de Kim en 164. Ici, ces marqueurs d’opposition jouent un rôle essentiel : celui de permettre aux interlocuteurs de reconnaître le tour en question comme un désaccord. En 162, le débatteur (Kim) demande la confirmation de ce qu’il a compris en concrétisant l’argument de son partenaire sous forme de reformulation interrogative et en mettant l’accent sur le mot hana-do (’même une seule (source)’). Son tour apparaît donc comme une sorte de confirmation à piège qui a un accent négatif. Le débatteur (Yun) interrompt en 163 le tour de Kim avec le marqueur d’opposition (’ani’) qui indique son désaccord avec la proposition précédente. Il renverse le point essentiel de l’argument que son partenaire a avancé au moyen de ’hana-do’, réduisant le problème à une question de siki (’période’) et de sijôm (’moment’). En revanche, le débatteur (Kim) interrompt en 164 le tour de Yun avec ’kûnde’ qui indique une relation contradictoire entre les mots de Yun : kûlônikka kômsa-ka sangdandhi jungyohan kôpnida (’donc c’est très important, l’examen’), et ses propres mots : ¼ bunki-e hanbôn ssik kômsa-lûl hajanhayo (’vous examinez [la qualité d’eau minérale] une seule fois par trimestre’). Le terme ’kûnde’ qui est introduit au début du tour de Kim permet à Yun d’interpréter l’argument de Kim comme un reproche sur le fait qu’il n’examine la qualité de l’eau minérale qu’une seule fois par trimestre, bien qu’il affirme qu’il est important de l’examiner.

Notes
141.

Dans ce cas, ’ani’ se produit une seule fois, mais on voit dans une autre situation de discussion que les interlocuteurs tentent de prendre la parole en répétant ’ani’ à plusieurs reprises (’ani ani ani’).