4.2. Renforçateurs

L’autre moyen de renforcer le désaccord est le recours aux «renforçateurs» qui selon C. Kerbrat-Orecchioni (1992 : 244) «augmentent effectivement l’impolitesse d’un énoncé», à la différence des «intensifieurs» qui peuvent accentuer le caractère poli ou impoli selon le type d’acte, FTA ou FFA qu’ils accompagnent. C’est le cas notamment des exemples ci-dessous, extraits de l’émission «Jipjung Tolon».

(3) (Jipjung 6 : 235-254)

L’exemple (3) ci-dessus est extrait de la discussion échangée entre l’animateur (Tchoe) et le débatteur (Yun) sur le problème de la gestion des sources d’eau minérale. Tchoe lui demande en 135 s’il y a une règle selon laquelle il est interdit d’installer des toilettes dans un périmètre de 30 mètres autour d’une source d’eau minéral. Lorsque Yun ne répète en 136 et 138 que l’importance de l’examen de la qualité de l’eau, Tchoe reprend en 138 la parole avec une interruption accompagnée d’un chevauchement, et l’attaque immédiatement avec un désaccord radical. Sa réfutation est explicite par l’existence d’un marqueur d’opposition (ani : ’non’) et renforcée par l’interruption accompagnée d’un chevauchement, et par les accompagnateurs à valeur d’intensification, tels que bêknal (’cent jours’), maltsang (’tout à fait’), et hôskôs (’inutilité’). Ces trois expressions ont systématiquement une valeur négative et péjorative dans une conversation ordinaire. Le terme ’bêknal’ fait allusion à l’’impossibilité’ d’un acte comme dans l’exemple suivant :

  1. bêknal hê bwaya an doenda.
    (’ce n’est pas possible, on a beau faire cela pendant cent jours’)
    Le nom commun ’bêknal’ s’utilise souvent d’une façon adverbiale signifiant la répétition, ici de ’cent fois’. L’adverbe maltsang qui appartient à la langue familière a pour fonction d’intensifier seulement le FTA. Il correspond au terme français ’totalement’, ’complètement’ et se combine souvent avec ’hôskôsida’ (’être en vain’) dans l’exemple suivant :

  2. maltsang hôskôsida
    (’c’est complètement en vain’)

Ces expressions bâties avec les adverbes (’bêknal’ et ’maltsang’) ont un sens qui n’est pas fonction du contexte, comme c’est le cas avec les autres adverbes, mais elles attribuent intrinsèquement un caractère menaçant à un énoncé. Enfin, l’animateur (Tchoe) exprime dans ce tour de parole ses reproches radicaux accentués par les renforçateurs employés comme moyen qu’utilise le locuteur pour attaquer ou disqualifier agressivement l’adversaire discursif ou/et son énoncé.