Deuxième Partie : Les mutations de l’époque
de la grande vitesse

L’objet de la première partie, était de tenter de repérer certaines permanences dans le processus d’évolution des moyens de déplacement au fil du temps. Pour ce faire, on a adopté et cherché à étayer une représentation dans laquelle le système de transport est totalement intégré à son environnement socio-économique : il en est le produit, mais aussi, par sa réalité même, un facteur de transformation parmi une multitude d’autres.

C’est dans le même esprit que, dans les trois chapitres qui suivent, sera abordée la société contemporaine du développement de la grande vitesse ferroviaire. Tout en privilégiant une approche centrée sur les activités économiques, il s’agit de caractériser les grandes dynamiques de notre société pour envisager comment le TGV vient s’y inscrire. Au sein de cette démarche, la caractéristique de la seconde partie est de s’en tenir aux évolutions du contexte économique de notre époque envisagées de façon très générale sous la forme de « changements de paradigme ».

Si l’esprit reste identique d’une partie à l’autre, la manière de procéder est en revanche différente. En effet, l’inscription de la grande vitesse dans les temps longs de l’Histoire a permis que chacune des dimensions abordée soit traitée sur un mode linéaire, respectant grosso modo la chronologie. Dans la seconde partie, le rapprochement de mutations macro-économiques, a priori très extérieures au système de transport, et d’aspects plus spécifiques au TGV imposera de suivre une démarche plutôt binaire : chacun des chapitres suivants débute par l’exposé, plutôt conséquent en proportion du nombre total de pages, du contenu que l’on donne à la tendance macro-économique considérée. Cet exposé, reposant entièrement sur une analyse bibliographique, en surligne plusieurs points saillants qui, en second lieu seulement, seront rapprochées de certaines caractéristiques de la grande vitesse ferroviaire. Ces dernières, c’est en tout cas l’objectif visé, s’en trouveront éclairées de manière parfois originale.

Cet aller-retour déséquilibré entre le global et le local n’est pas fortuit. Il rend de manière explicite son entière indépendance aux « tendances lourdes » de société, qui ne sont désormais que peu – ou pas – influencées par les progrès technologiques du chemin de fer. En retour, certaines dimensions du TGV sont ré-interprétées – elles – à la lumière des analyses macro-, illustrant ainsi que, dans un contexte d’innovation mineure, les relations entre transport et société ne sont pas symétriques. Mais dans le même temps, il ne s’agit pas de laisser entendre que le processus d’innovation que constitue la grande vitesse pourrait être relu dans sa totalité à la lumière de l’épuisement du fordisme ou de la globalisation. Les phénomènes globaux ne fournissent jamais que des éclairage partiels de la « socio-technique » qui est l’objet de ce travail.

C’est ainsi que le premier chapitre (chapitre 3) de cette partie envisage ce que l’on a pu dénommer « l’épuisement du système de régulation fordiste ». Il permettra de voir que « l’invention » du TGV n’est pas sans rapport avec ce contexte historique. Le chapitre suivant (chapitre 4) demeure également sur un plan macro-social pour aborder l’importance croissante de l’information dans l’économie et la société contemporaine et envisager l’avènement supposé de « la société de l’information ». Il débouche sur une analyse du rôle du TGV dans cette économie de l’information. Enfin, le chapitre 5, qui conclut cette partie, donnera une lecture du processus de globalisation et montrera comment le TGV y répond à sa manière. Chacune de ces parties permettra d’illustrer d’une façon particulière l’inscription de la grande vitesse ferroviaire dans les macro-tendances de notre époque.