Chapitre 3 : L’épuisement du fordisme

Révolution dans les méthodes de travail, mutation de l’organisation du système productif, rupture dans les habitudes de consommations... l’analyse économique n’est évidemment pas en reste lorsqu’il s’agit de faire de notre époque l’une de ces périodes charnières qui laissent une empreinte durable sur la société qui en émerge. Il n’est pas inutile de se laisser prendre à ce jeu afin de percevoir les dynamiques qui sont aujourd’hui à l’oeuvre dans l’espace économique de l’Europe de l’ouest. Pour le reste, chacun fera ce qu’il voudra de cette impression de vivre une époque formidable.

Par-delà la « crise économique » que l’Europe occidentale a connue depuis plus de 20 ans, il semblerait aujourd’hui que le mode de structuration de l’activité économique s’est profondément modifié. Une interprétation courante de ces évolutions est de poser que le mode d’organisation fordiste – ou, pour faire explicitement référence au courant de pensée de « l’école de la régulation », le mode d’accumulation fordiste – s’est heurté, à partir des année 60 à un ensemble de limite qui ont peu à peu brisé ses dynamiques et appelé son renouvellement, voire son remplacement. Le présent chapitre donne donc une lecture de ces trnasformations. Il en précise plusieurs dimensions – le rôle des exigences de flexibilité notamment – qui aideront, dans les chapitres ultérieurs, à comprendre le phénomène de globalisation (chapitre 5), les mutations des organisations productives (chapitre 6) ou la structure contemporaine de l’espace économique (chapitre 9).

Mais l’épuisement du fordisme, analysé à travers la montée de la pression concurrentielle, à travers les limites des organisations pyramidales ou à travers le renouvellement de certaines valeurs individuelles permet aussi, et c’est son intérêt ici, de relire l’histoire de la naissance du TGV. À l’aide de cette clé de lecture globale, on peut donc d’abord déceler la manière dont la genèse de la grande vitesse ferroviaire rend compte des évolutions plus générales. Mais cet éclairage différent permet aussi de mieux comprendre l’origine de certains aspects particuliers de l’offre TGV. Des analyses globales aux analyses plus étroites, du passé au présent, l’objectif demeure de donner un sens à cette innovation socio-technique.