3.1 Les limites du développement fordiste

Les économistes situent de manière assez unanime un seuil dans l’évolution de notre économie capitaliste avec le début de ce que le langage courant dénomme « la crise », au milieu des années 70. L’Histoire semble retenir les noms de messieurs Ford et Taylor pour désigner le paradigme qui a structuré le système productif pendant les « trente glorieuses », ces années de forte croissance qui ont suivi la seconde guerre mondiale. Ses traits principaux – la division technique et sociale du travail, les économies d’échelle et la consommation de masse – sont bien connus (56). Autour de 1975 donc, à cinq ou dix ans près, ce paradigme semble atteindre plusieurs de ses limites, dont les tentatives de dépassement fondent quelques-unes des principales dynamiques de l’économie contemporaine. Pour autant, on verra que les tendances actuelles n’effacent pas les mouvements plus anciens. à ce titre, plutôt que de parler de la fin d’une étape, il convient mieux d’évoquer l’émergence de phénomènes nouveaux.

Notes
56.

)011Le taylorisme désigne les principes qui, au moyen d’une organisation scientifique du travail, vont permettre de substantiels gains de productivité et déposséder les ouvriers de leur « pouvoir technique » au bénéfice du patronnat. « Inventé » au cours de la « grande dépression » qui a marqué la fin du XIXe siècle, il participe à la mise en place de « l’ordre productif nouveau », un capitalisme de type monopoliste, dont cette crise va accoucher. Le fordisme correspond à l’achèvement de cet « ordre productif nouveau » au cours de la crise des années 30, notamment en le dotant d’un mode de régulation approprié. Les deux termes ne sont donc pas synonymes. On retiendra plutôt le second pour son acception plus globale (Rosier et Dockès, 1983, notamment les chapitres 4 et 5).