La hiérarchie de l’offre de transport à grande vitesse

Les 12 cartes présentées mettent en évidence des situations plutôt contrastées. Elles illustrent que l’offre de transport à grande vitesse est très inégalement répartie. Bien sûr, elles font ressortir la situation très avantageuse de Paris de ce point de vue (Carte 1). La Capitale est la seule cité qui dispose d’une relation à grande vitesse avec la quasi-totalité des autres villes de l’échantillon. Seules lui manquent des liaisons performantes et directes avec Avignon et Toulon. Outre la présence de l’aéroport de Marseille-Marignane qui permet de combler cette lacune en moins de 3h15, la mise en service récente du tronçon Méditerranée du TGV améliore encore, depuis le recueil des données, les conditions de déplacement vers le sud-est.

En termes d’intensité, il semble se dessiner un contraste nord-sud au départ de Paris. Plutôt qu’une simple opposition de lattitude, il s’agit en réalité des stratégies de fréquence différenciées des deux modes de transport en présence : les arcs les plus intenses (qui apparaissent en marron ou rouge sur la carte) correspondent tous à des relations desservies par l’avion seul (Marseille ou Toulouse aux conditions de grande vitesse) ou concurremment au train (Nantes ou Lyon par exemple). Le cas de Lille est symptomatique de cette réalité où la vingtaine d’allers-retours quotidiens proposée par la SNCF fait finalement bien pâle figure. Un traitement différent de la pondération des fréquences observées devrait néanmoins conduire à des résultats disqualifiant un peu moins l’offre ferroviaire.

Encadré : La construction des cartes de fréquence de desserte à grande vitesse
La construction des cartes de fréquence de desserte aérienne et ferroviaire à grande vitesse procède de plusieurs étapes successives : le recueil des données, leur traitement et enfin leur représentation graphique.
Le recueil des données
La recherche a porté sur les relations entre les principales agglomérations françaises. Dans un premier temps, la totalité des agglomérations de plus de 120.000 habitants ont été retenues, soit 38. Dans un second temps, pour éviter les effets de proximité trop manifestes, les agglomérations situées à moins de 70 km d’une autre agglomération plus importante ont été éliminées. C’est le cas de Douai, Lens et Valenciennes par rapport à Lille, Le Havre par rapport à Rouen, Metz par rapport à Nancy, Cannes-Antibes par rapport à Nice et Saint-étienne par rapport à Lyon. 31 agglomérations demeurent dans la sélection.
Le recueil des données a ensuite intégralement été effectué par interrogation des sites Internet des grands opérateurs présents en France : Air France (www.airfrance.fr), Air Liberté (www.air-liberte.fr) et SNCF (www.sncf.com). Le site de la compagnie Air Littoral (www.airlittoral.fr) n’affichait pas, au moment de la recherche, les horaires des vols qu’elle propose. C’est sur le site de Swissair (www.swissair.com) que ceux-ci ont été récupérés. Des ajouts ont encore été effectués à partir du site de la compagnie Regional Airlines (www.regionalairlines.com), dont une partie des vols est déjà proposés dans les pages d’Air France. Enfin, des vérifications ont été réalisées à partir du site des aéroports français (www.aeroport.fr).
Les horaires relevés sont ceux proposés pour le mardi 21 novembre 2000, un jour a priori parfaitement banal. Ils impliquent un départ après 5h30 et une arrivée avant 22h30. Pour chaque couple origine-destination considéré, seuls les trajets impliquant une correspondance au plus ont pu être pris en compte. Parmi ceux-ci, seuls ceux proposés directement par les opérateurs ont été retenus. En particulier, aucune possibilité de correspondance entre opérateurs (TGV+avion par exemple) n’a été envisagée, à l’exception de celle proposée sur son site par Air France au départ de Lille vers Mulhouse-Bâle.
Sur la base des horaires affichés par les opérateurs, la durée-limite retenue pour les trajets de gare à gare ou d’aéroport à aéroport est de 3h15. Cette durée n’inclut donc pas les trajets initiaux et terminaux. Lorsque l’offre mise à disposition par un opérateur sur une O-D est diversifiée, il peut arriver que les horaires d’un trajet proposé (A) « recouvrent » les horaires d’un autre trajet plus court (B) (le départ de A est alors antérieur au départ de B et l’arrivée de A est postérieure à l’arrivée de B). Dans ce cas uniquement, le trajet A n’est pas sélectionné. Le schéma suivant précise les conditions de sélection :
En revanche, les horaires des différents opérateurs n’ont pas été comparés et aucune redondance des offres de la SNCF, d’Air France et d’Air Liberté n’a été supprimée.
Les deux aéroports parisiens ont été considérés sans différence. De même, concernant les dessertes ferroviaires, l’ensemble des gares situées dans la ville-centre a été pris en compte pour chaque agglomération comme s’il s’agissait d’un seul et même point de desserte. La desserte des gares de périphérie a par contre été ignoré sauf pour Orléans (Les Aubrais), Tours (Saint-Pierre-des-C.) et Amiens (Longueau). Les arrêts dans les gares-TGV « bis » de région parisienne et lyonnaise (Massy, Roissy, Chessy et Saint-Exupéry), en particulier, n’ont pas été pris en compte. Il y a sur ce point une distorsion manifeste entre les deux modes. Celle-ci peut être atténuée en intégrant des temps de trajet initiaux et terminaux moyens qui rendent compte de la position excentrée des aéroports par rapport aux agglomérations qu’ils desservent.
Enfin, aucune condition de sélection ne porte sur le tarif des différents trajets proposés (malgré des écarts parfois importants entre différentes relations et pour une même relation, entre modes de transport comme au sein de chaque mode), ni sur les itinéraires empruntés (que le jeu des correspondance rend parfois peu intuitifs).

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Une pondération différenciée des fréquences observées ?

Une fois enregistrées les fréquences de desserte de chaque relation pour chaque opérateur, les valeurs ont été agrégées par mode par simple addition. L’agrégation des valeurs des deux modes aérien et ferroviaire a été plus délicate en raison de l’incidence de stratégies de desserte contrastées de la part des opérateurs. Sur les grandes lignes au trafic le plus intense, la SNCF limite en effet la desserte à une bonne vingtaine d’allers-retours quotidiens (par exemple, sur les trois dessertes TGV cadencées depuis Paris : 23 vers Lille, 22 vers Lyon et 21 vers Nantes). En regard, les « Navettes » d’Air France offrent 32 possibilités chaque jour vers Toulouse et 33 vers Marseille, auxquelles il faut ajouter 16 vols Paris-Toulouse d’Air Liberté. Dans ces conditions, la simple sommation des fréquences des deux modes traduit une réalité qui, à ces niveaux d’offre, révèle aussi un biais : les relations qui, du fait de leur longueur, sont préférentiellement desservies par l’avion risquent aussi d’être celles qui, tendanciellement, bénéficient des fréquences les plus élevées. Le nombre de dessertes quotidiennes constitue-t-il encore, à partir d’une certaine densité, un élément tangible de qualité de service ?
On a choisi ici de pondérer les fréquences aériennes par un coefficient ½. Cette solution est encore insatisfaisante. Elle conserve néanmoins le mérite de rester simple, et donc plus facilement lisible que d’autres solutions envisageables. On peut par exemple imaginer d’adopter une pondération variable suivant le nombre de vols effectivement offerts : proche de 1 pour les fréquences peu élevées et très faible à partir d’une certaine densité de desserte. L’idée qu’un seuil existe au delà duquel une possibilité horaire supplémentaire n’apporte plus que peu d’amélioration de la qualité de service est plausible. On peut par exemple utiliser une fonction logistique calculant le poids de la fréquence supplémentaire pf en fonction du nombre x de fréquences déjà observées sur la même liaison d’après la formule suivante : p(x) = 1/(1+exp(K(x-M2/x))) où M est telle que p(M) = 0,5 et K/2 est la pente en p(M). M détermine donc la position du seuil et K sa progressivité. La courbe ci-dessous est tracée pour M = 21 et K = 1/3.
La fréquence pondérée totale d’une relation, fp(f) s’obtient en fonction de la fréquence observée f en sommant les valeurs discrètes de p(x), x variant de 1 à f. Le tableau précise ces valeurs.
On observe que pour l’essentiel, cette pondération consiste à limiter le niveau de fréquence maximum, ici à 20,7. On peut alors envisager plus simplement d’utiliser une simple fonction en escalier plutôt qu’une fonction logistique pour obtenir un résultat finalement très similaire.
Quoi qu’il en soit, la question est réelle de savoir s’il est possible de déterminer la valeur de ce seuil en excluant tout choix arbitraire. De même, on peut se demander si l’on peut raisonner cette question en faisant abstraction de la répartition horaire des différentes dessertes proposées. On voit à travers cette dernière interrogation que l’investigation change de nature, qu’elle s’oriente alors vers la mise au point d’un indicateur d’accessibilité lourd, impliquant une masse de donnée importante. Tout en soulignant l’intérêt de cette démarche, on fait le pari ici que les conditions de desserte à grande vitesse des principales agglomérations françaises peuvent être utilement éclairées par le simple examen des fréquences.
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Calcul d’un coefficient d’intensité de l’offre
Comme les trafics, il est logique que la fréquence de desserte entre les villes diminue avec la distance et augmente avec le poids démographique des points reliés. Cette variation est un élément important de la réalité à représenter et il convient de ne pas l’occulter. C’est dans cet esprit que les cartes sont construites, sur la base des données brutes de fréquence, figurées par l’épaisseur des arcs (voir légende). On peut cependant compléter l’information ainsi mise à disposition en indiquant pour chaque liaison, l’intensité de l’offre hors effet de distance et de population. Cette information complémentaire correspond à la couleur de chaque arc suivant un code d’intensité décroissante du marron au rouge, à l’orange, au jaune et au bleu (voir légende). Ce code est issu d’un ratio K égal au rapport de la fréquence observée (ici fréq fer+ fréq air/2) et d’une fréquence théorique dont la présentation suit.
La fréquence théorique (f) est calculée sur la base d’une formule gravitaire sensée rendre compte de l’effet distance et de l’effet masse : f = B.(m.m’)a/dc, soit ln(f) = ln(B) + a.ln(m.m’) – c.ln(d)
Par régression linéaire multiple, cette fonction est alors calée sur l’ensemble des fréquences observées non nulles, soit un échantillon de 220 valeurs. Les résultats de régression obtenus sont les suivants :
On constate donc une valeur des résidus (R2) relativement élevée qui indique la réalité de l’influence des deux paramètres retenus (mm’ et d). En revanche, elle demeure éloignée de 1 ce qui signifie que la répartition de l’offre de transport entre les grandes villes ne suit pas parfaitement une loi gravitaire. On ne s’étonnera pas de l’influence d’autres paramètres. L’examen des chiffres indique par exemple que les relations bénéficiant d’une offre aérienne sont tendanciellement plutôt mieux desservies que ne le prévoit le modèle théorique, malgré le coefficient ½ qui affecte les fréquences aériennes. C’est bien cet écart entre valeurs observées et valeurs théoriques qui donne son intérêt à l’exercice.
On notera la valeur des coefficients obtenus. a, le coefficient appliqué aux masses, est très inférieure à 1, valeur souvent retenue par analogie aux lois de la mécanique. De même, c, qui affecte la distance, est très proche de 1 et non de 2. Ce dernier résultat paraît confirmer ce que retient Félix DAMETTE (1994, p. 106) d’un exercice identique mené sur le trafic ferroviaire.
Construction des cartes
Le traitement graphique des données a été réalisé à l’aide du logiciel Géoconcept, spécialisé dans la gestion des données spatialisées. Seuls ont été représentés les arcs correspondant à une fréquence réelle pondérée supérieure à 2. L’épaisseur des arcs a été représentée de façon proportionnelle à la valeur de la fréquence observée (pondérée d’un coef. ½ pour la desserte aérienne). Le ratio K d’intensité de l’offre, résultat du quotient fréquence réelle sur fréquence théorique, a été représenté par un code de couleur. Les cartes devenant rapidement difficiles à lire, le nombre de villes dont le système de desserte est figuré sur une même carte a été limité à 2 dans le cas des agglomérations les plus importantes. En revanche, les villes au système de desserte moins étoffé peuvent figurer à 3 ou 4 sur un même fond.

Clermont-Ferrand a également été représentée sur cette même Carte 1. Il s’agit d’une part d’un clin d’oeil visant la réputation d’enclavement dont elle pâtit. Mais il s’agit aussi de relativiser les discours tenus sur les hubs, ces plate-formes de correspondance autour desquelles le transport aérien tend à s’organiser. La logique en a rapidement été présentée au chapitre deux. Selon la théorie, les aéroports choisis pour ce rôle bénéficient d’une offre de transport largement augmentée par rapport à celle que pourrait justifier leur aire de chalandise naturelle. L’exemple de Clermont-Ferrand amène à tirer une conclusion mitigée de ce point de vue : hub de Regional Airlines, la Capitale auvergnate est loin d’être accessible à grande vitesse depuis l’ensemble du territoire français. Elle ne bénéficie pas d’une offre aussi diversifiée que les grandes agglomérations de Province dont la desserte est illustrée sur les Cartes 2 à 6. On peut avancer que, grosso modo, son statut de hub ne permet pas à Clermont de changer de catégorie (163).

Concernant les plus grandes villes de Province (Cartes 2 à 6), les systèmes de desserte présentent une forte régularité. Il n’est donc pas nécessaire de détailler la situation de chacune des agglomérations dont l’offre de transport à grande vitesse est figurée sur les cartes. Il suffit d’évoquer les principes généraux. Les systèmes de desserte sont en effet systématiquement composés de trois éléments :

Dans une optique de repérage de la hiérarchisation de l’offre de transport à grande vitesse, ce dernier point est important. Parmi les 31 villes de l’échantillon présenté, on distingue effectivement un sous-ensemble particulier, dont tous les éléments sont reliés les uns aux autres dans des conditions suffisamment performantes pour satisfaire aux critères de sélection retenus ici et pouvoir afficher les arcs correspondant. Ce sous-ensemble regroupe les 8 principales agglomérations françaises que Félix Damette (1994) accepte de qualifier de métropole, à savoir Bordeaux, Lille, Lyon, Marseille, Nantes, Paris, Strasbourg et Toulouse (164). On peut également ajouter Nice à cet ensemble. Cette réalité met bien en évidence le caractère fortement métropolitain du réseau d’offre de transport à grande vitesse.

À un niveau un peu inférieur, un petit groupe de trois cités semble en mesure de recoller à ce peloton de tête. Il rassemble Rennes et Mulhouse d’une part, qui paraissent disputer le leadership de (respectivement) l’ouest et l’est à Nantes et Strasbourg (Carte 6), et Montpellier d’autre part (Carte 11). Ces agglomérations bénéficient en effet d’un système de desserte qui les connecte à la plupart des métropoles, mais plutôt mal entre elles. Ce groupe intermédiaire est un peu celui des particularités locales, auquel on aurait peut-être pu adjoindre Nice d’un côté et Brest de l’autre. Rennes et Montpellier s’y retrouvent en raison de la diversité des « fonctions d’état » dans lesquelles elles sont plutôt spécialisées (Damette, 1994, p. 101). Mulhouse y doit certainement sa place au fait qu’elle partage son aéroport avec l’agglomération helvétique de Bâle. La particularité de Nice (deuxième aéroport international du pays) dans le paysage aérien français n’est plus à souligner. Enfin, l’éloignement de Brest oriente la presque totalité de l’offre de transport la concernant sur l’avion, lui permettant paradoxalement de tenir une bonne place dans le système de desserte à grande vitesse.

Le contraste est en tout cas très net avec les autres villes de l’échantillon. Alors que le système de desserte métropolitain est composé de trois éléments – régional, parisien et longue distance – le système de desserte dont disposent habituellement les villes moyennes n’est composé, comme l’illustre la Carte 7, que des deux premiers. L’élément régional dépend beaucoup de la position sur le réseau ferroviaire (on notera la situation avantageuse dont bénéficient par exemple Angers ou Avignon) alors qu’un nombre réduit de liaisons aériennes à longue distance peuvent aussi apparaître comme dans les cas de Limoges et Nancy (Carte 9).

Quelques spécificités peuvent être soulignées. La première concerne l’effet de la proximité d’un aéroport métropolitain. On remarque en effet que ni Grenoble, ni Rouen, ni Toulon ne réussissent à afficher de liaisons à longue distance malgré leur poids. Il est vrai que la représentation choisie ne rend pas compte des possibilités pour un Grenoblois, par exemple, d’aller jusqu’à Lyon-Saint-Exupéry chercher l’offre dont il a besoin. Compte tenu des contraintes de délais imposées pour sélectionner l’offre à grande vitesse, il est de toute façon fort probable que l’acheminement initial serait très handicapant. Le cas de ces agglomérations repose en réalité avec force la problématique de Philippe Ménerault et Vaclav Stransky (1999) d’une combinaison intermodale.

L’autre particularité concerne le Bassin Parisien. Le caractère remarquable de l’ensemble connexe formé de Paris, Lille, Rouen, Le Mans, Tours et Orléans a déjà été souligné en note. Il apparaît assez nettement sur la Carte 8. Ces villes situées aux franges de l’Île-de-France sont en effet reliées à Paris en une heure de trajet environ. Si, à l’instar du serveur Internet de la SNCF, on ajoute une heure supplémentaire nécessaire pour la traversée de Paris, on comprend que des relations puissent s’établir de part et d’autre de la Capitale en moins de 3h15. Comme les horaires des différentes lignes convergeant vers Paris ne sont pas coordonnés, il est nécessaire de disposer d’une fréquence suffisante pour qu’une correspondance puisse s’établir dans des délais raisonnables. La Carte 12, illustre ainsi qu’Amiens, et surtout Reims, ne disposent pas de cette liaison fréquente et donc ne réussissent guère à franchir la Seine.

Sur ce type de liaison, le TGV peut fonctionner de deux manières complémentaires. L’exemple des relations entre Le Mans, Tours et Lille montre comment les fréquences élevées et les gains de temps qu’il procure peuvent être mis à profit à travers un jeu de correspondances entre gares parisiennes. Les liaisons TGV directes de Lyon vers Le Mans ou Lille qui ont pu être prises en compte dans cet exercice illustrent le changement d’échelle que permet l’interconnexion des lignes nouvelles convergeant vers Paris en supprimant l’obstacle de la correspondance intra muros.

Il convient cependant de souligner que cette offre de transport de région à région ne consiste pas seulement à éviter Paris, mais aussi à desservir sa banlieue : sans un ou deux arrêts – systématiques – à Roissy, Chessy ou Massy pour augmenter le remplissage des trains, les TGV d’interconnexion ne circuleraient pas. En outre, il faut bien considérer que c’est en priorité au départ des métropoles de Province qu’elle se met en place à mesure de l’extension du réseau TGV. Elle s’inscrit donc également dans une structure hiérarchisée de l’offre de transport à grande vitesse.

La conclusion générale que l’on peut tirer de l’analyse des cartes présentée est la confirmation de ce que l’offre de transport à grande vitesse, observée à travers les fréquences de desserte est spatialement très différenciée. La structure qu’elle met en évidence suit assez fidèlement les grands traits de la hiérarchie urbaine française. Le fait de ne retrouver dans le groupe de tête que Paris, puis les 7 agglomérations de Province que Damette qualifie de métropole confirme la solidité de ce résultat. Bien sûr, il n’étonnera guère, encore convenait-il de l’établir avec suffisamment de netteté.

Le rôle spécifique du TGV dans ce schéma est plus ténu. Le réseau de lignes nouvelles est certes essentiellement radial. L’offre, quand on la mesure en fréquence, renforce encore cette prédominance de Paris. Mais les dessertes ferroviaires à grande vitesse n’ont pas (encore ?) l’extension géographique nécessaire pour laisser apparaître un réseau de métropoles faisant système. De même, les performances du mode ferroviaire sont, de ce point de vue, insuffisantes par rapport à la taille du territoire français et aux vitesses commerciales permises par le mode aérien. C’est en majeure partie grâce à l’avion que ce réseau fonctionne en termes de déplacement de personne, le TGV ne jouant un rôle d’appoint, de concurrent ou de substitut, que dans un nombre limité de cas, bien qu’il s’agisse souvent des relations les plus fréquentées.

Notes
163.

()011Il conviendrait de relativiser ce jugement en soulignant que Regional est une compagnie spécialisée dans la desserte des agglomérations de taille moyenne. Son hub est organisé autour de deux plages de correspondance, le matin et le soir. Dans ce cadre, des services nombreux existent, mais moyennant des fréquences souvent faibles (2 A/R quotidiens vers Avignon, Caen ou Dijon par exemple). Les conditions de sélection retenues pour construire les cartes sont alors particulièrement défavorable à la configuration clermontoise. Cela étant, on visualise le peu d’effet d’amplification de ce dispositif sur les liaisons avec les grandes métropoles et l’on peut s’interroger sur le bénéfice réel que tire l’agglomération de ces possibilités de liaisons avec d’autres villes moyennes.

164.

()011La seule liaison défaillante est celle qui joint Lille à Strasbourg pour laquelle Air France ne propose que 3 A/R quotidiens. On notera que si l’on suit Philippe Ménerault et Vaclav Stransky (1999) et que l’on tente de compléter cette grille des desserte en combinant les horaires du TGV Lille-Roissy et de l’avion Roissy-Strasbourg (avec ¾ d’heure minimum de battement à Roissy), 3 possibilités supplémentaires apparaissent alors, parfaitement distinctes et complémentaires des vols directs proposés par Air France.

D’autres sous-ensembles présentant les mêmes caractéristiques de connectivité pourraient être isolés. Le plus remarquable est peut-être celui qui rassemble autour de Paris, Lille, Rouen, Le Mans, Tours et Orléans (situation qu’illustre presque complètement la carte 8). En revanche, aucun ne présente un tel effectif, ni une extension géographique couvrant l’ensemble du territoire français.