Le TGV comme élément symbolique de l’espace métropolitain

C’est sans doute autour des gares que se dessine le mieux la représentation que se donne la société de la grande vitesse ferroviaire. C’est là, si l’on excepte les problèmes d’insertion des lignes nouvelles, que se concentrent les enjeux de cette nouvelle offre de transport. C’est d’ailleurs l’une des conséquences les plus sensibles du train rapide que d’avoir remis au centre des préoccupations d’aménagement la question des gares ferroviaires. En effet, après avoir été un élément majeur de structuration de l’espace urbain au XIXè siècle (voir par exemple l’analyse du cas strasbourgeois menée par Annelise et Roger Gérard, 1999), les quartiers de gares semblaient progressivement s’assoupir, se marginaliser. Ils n’ont été l’objet que de peu d’attention de la part des autorités publiques jusqu’aux années 70. L’opération d’effacement de la gare de Paris-Montparnasse derrière un rideau d’immeubles de bureaux est de ce point de vue symptomatique de l’effacement plus général des chemins de fer des préoccupations sociales. C’est aussi, on l’a vu, en réaction à cet effacement qu’est né le TGV.

Valérie Facchinetti-Mannone (1999) souligne alors avec raison la rupture que représente la construction du TGV sud-est. Avec les rames oranges au début des années 80, ce sont d’abord des besoins de modernisation techniques qui s’expriment : il faut adapter les gares pour recevoir davantage de trains, mais aussi davantage de voyageurs (Mannone, 1997). Mais la modernité qu’affiche cette couleur vive traduit aussi une évolution de la représentation du chemin de fer : il peut désormais se montrer, la gare redevient un équipement valorisant. Cette évolution permet que d’autres acteurs que le monde cheminot s’approprient également ces enjeux : les collectivités locales s’y impliquent, notamment en investissant dans des projets de réhabilitation des quartiers de gare. La construction de lignes nouvelles exhume également d’autres préoccupations oubliées concernant la localisation des gares-TGV ou l’implantation d’éventuelles « gares-bis » (voir par exemple émangard et Beaucire, 1985).