Conclusion générale

La littérature concernant la grande vitesse ferroviaire traite habituellement ce thème à partir d’un projet précis qu’il s’agit d’analyser et d’évaluer. Même les écrits à vocation plutôt transversale concernant par exemple l’insertion territoriale de la grande vitesse ou encore les TGV européens (c.e.d.r.e., 1992 ou Cinotti et Tréboul, 2000 par exemple) se cantonnent souvent pour l’essentiel à l’examen successif de diverses options ou réalisations.

Dans le présent travail, c’est le point de vue inverse qui a été adopté. La grande vitesse est appréhendée de manière générique, sans que la référence à tel ou tel projet conduise à substituer un objet partiel à la technique de transport et à ses usages considérés comme un tout. L’utilisation de données d’enquête concernant le TGV-Atlantique par exemple, n’a visé qu’à étayer des analyses plus générales pour qualifier la demande de déplacement à grande vitesse.

Cette façon de procéder répond à l’objectif annoncé en introduction d’examiner comment le développement de moyens de transport ferroviaire à grande vitesse s’insère dans des évolutions plus larges de la société. À l’issue de cette tentative, il convient naturellement de s’interroger sur la pertinence d’une telle démarche. Cette interrogation s’articule en plusieurs niveaux. Le problème peut être abordé à un premier niveau très modeste : il s’agit tout d’abord de dresser le simple constat de la possibilité de cette analyse. On s’interrogera tout d’abord pour vérifier si l’on a réussi à relier quelques évolutions importantes de la société à certaines caractéristiques essentielles, certaines dimensions de la grande vitesse ferroviaire. On cherchera encore à savoir si ce rapprochement d’analyses macro-sociales et de questionnements spécifiques sur une technique de transport et ses usages a permis une ré-interprétation fructueuse des observations déjà rassemblées sur le TGV.

La possibilité de mener une telle démarche étant confirmée, on pourra alors tenter de juger de sa pertinence. Un second niveau de bilan s’en tiendra sur cet aspect à un point de vue non-utilitaire. Sans revenir sur le détail des analyses présentées dans le corps du texte, il insistera sur l’intérêt de ce croisement entre le macro et le micro : du premier vers le second, il permet de charger de sens les évolutions de la grande vitesse ferroviaire qui ont déjà pu être observées dans un référentiel plus étroit ; du second vers le premier, l’application d’analyses globales aux questions spécifiques du TGV est une façon, même très marginale, d’enrichir la compréhension des mutations contemporaines. Il apparaît alors que, loin d’opposer les analyses globales aux pratiques d’oservations plus proches du terrain, la démarche mise en oeuvre ici vise à les articuler.

Enfin, un bilan plus pragmatique peut être envisagé. Il consiste alors à repérer ce que les pages précédentes apportent de nouveau aux évaluations que l’on continuera à mener essentiellement projet par projet. On reviendra sur deux enseignements essentiels que sont la prégnance des « tendances lourdes » d’une part et l’intérêt du répérage du travail métropolitain d’autre part. La démarche générale de cette thèse s’écarte volontairement d’une visée utilitaire qui aurait pu la limiter à des considérations opérationnelles. Pour autant, il ne semble pas choquant, au contraire, que les travaux universitaires puissent, même de façon minime, servir à des applications pratiques de court terme.