Articuler analyses globales et opérationnelles

En appeler à l’élargissement des horizons d’analyse pourrait être interprété comme une marque de défiance vis-à-vis des pratiques opérationnelles les plus usuelles. Mettre en avant le poids des tendances lourdes peut revenir à asseoir la compréhension du TGV davantage sur les explications globales du monde que sur les techniques d’observation et d’analyse de terrain. En réalité, le propos tenu ne vise pas à opposer deux pratiques scientifiques : celle du penseur de la société d’une part, celle de l’expert opérationnel de l’autre. Il vise plutôt à rééquilibrer l’analyse de la grande vitesse ferroviaire et de son cadre socio-technique de développement trop exclusivement fondée, jusqu’à nos jours, sur la seconde démarche.

Tout au long des différents chapitres, les analyses du TGV sont largement appuyées sur des observations de terrain. Il ne s’agit donc en aucune manière de renier cette littérature et ces pratiques de recherche ou d’expertise. Il s’agit en revanche d’illustrer la possibilité de relecture de ces résultats, de montrer comment ils peuvent se trouver chargés de sens en étant articulés sur des problématiques plus larges. Il y a longtemps que cette démarche est mise en pratique dans le champ des télécommunications. Son importation dans le domaine des transports n’en paraît que plus prometteuse.

Intégrer de manière usuelle la prise en compte du long terme, des contextes globaux et des tendances lourdes aux analyses des projets de transport demeure une ambition de longue haleine. Des progrès doivent bien sûr être recherchés dans les dispositifs d’observation qui restent le plus souvent indifférents à ces préoccupations. Mais ces améliorations ne sauraient dispenser du travail amont de repositionnement des interrogations que suscitent un projet d’infrastructure et de la nécessité en aval de réinterpréter à de multiples reprises les données déjà rassemblées.