L’intérêt de la variable de travail métropolitain

Découlant de cette influence essentielle des tendances lourdes, l’intérêt de la notion de travail métropolitain est un résultat d’ordre méthodologique important concernant l’analyse de la mobilité à motif professionnel. Deux mises en oeuvre rapides en ont été présentées. La première, au chapitre 5, sur des critères uniquement socio-professionnels, a permis d’accuser les différenciations que le simple découpage par PCS laissait déjà voir. La variable « travail métropolitain » semble donc mieux rendre compte de ces phénomènes. Mais surtout, elle en permet une interprétation beaucoup plus riche dans la mesure où elle renvoie de manière explicite à des évolutions de la structure économique qui génère les flux observés.

Une seconde mise en oeuvre, présentée au dernier chapitre (chapitre 9), a permis de constater que ce découpage de la population observée résiste à une décomposition spatiale. Ce constat peut d’autant mieux être interprété comme un gage de pertinence de la variable que le jeu de données sur lequel il est fondé, issu des enquêtes du TGV-A, s’est avéré plutôt fragile de ce point de vue à l’exploitation (Klein et Claisse, 1997). Mais, là encore, l’intérêt principal de l’introduction du travail métropolitain est qu’il permet de donner un sens à l’analyse de l’inscription spatiale des différenciations sociales de pratiques de mobilité.

Évidemment, il convient de rester prudent dans l’appréciation de l’intérêt de cette distinction entre le travail métropolitain et celui qui ne l’est pas. Les résultats plutôt encourageants obtenus sur la base des enquêtes de mobilité avant-après TGV sud-est et TGV-A peuvent bien entendu ne pas se reproduire sur d’autres cas d’application. En restant strictement dans le même champ, une tentative de validation supplémentaire pourrait vraisemblablement être menée à peu de frais sur l’exemple du TGV-nord en s’appuyant sur l’enquête par panel glissant dirigée par l’OEST à l’époque de sa mise en service. On peut aussi imaginer d’utiliser les Enquêtes Transports-Communication de 1992 afin de vérifier si les différenciations peuvent toujours se lire de cette manière dans un ensemble de relations géographiques très diversifiées, voire sur d’autres mobilités que la seule mobilité à longue distance et à motif professionnel. Enfin, on peut envisager que d’autres différenciations, ne concernant pas forcément la mobilité, puissent s’interpréter de la même manière.

À cette conclusion concernant l’intérêt d’un cadre d’analyse spécifiant le travail métropolitain, il semble pertinent d’associer les réflexions concernant deux autres variables, qui se révèlent bien utiles pour comprendre la grande vitesse ferroviaire. Il n’y a guère à s’attarder, en premier lieu, sur l’intérêt de raisonner les phénomènes d’accélération ou de réduction de temps de parcours à partir de la notion de franchissement de seuils d’accessibilité. Les observations menées dès l’origine du TGV sud-est avaient laissé voir que la valeur de 2 heures n’était pas anodine de ce point de vue. Les modèles de trafic, et en particulier ceux formalisant la concurrence entre modes, réussissent à rendre compte du phénomène et à en donner une mesure. La multiplication des exemples de dessertes par TGV permet de vérifier et d’affiner le positionnement de ces seuils dans diverses situations. Le seuil d’accessibilité est une notion solide dont l’usage pourrait s’étendre.

La distinction entre la vitesse comme nécessité et la vitesse comme opportunité est bien différente de ce cas de figure. Sa validation empirique reste à opérer. Les deux modalités de cette typologie sont elles-mêmes à affiner afin de pouvoir être utilisées. Pourtant, la résonance qui a pu être mise en évidence entre cette analyse de l’usage de la vitesse d’une part, les évolutions duales du système productif d’autre part, et de la structure des temps sociaux enfin, laisse soupçonner qu’elle puisse se traduire par des différences repérables de comportements de mobilité.