Tout d’abord nous allons présenter une idée de la structure théorique d’un modèle dont les principaux paramètres sont suivants :
Il est indiscutable que la pratique sociale remplissant des espaces humains de la géographie différente a une influence très importante sur la plupart des processus économiques, urbains etc. Cela concerne bien sûr le processus de choix modal qui est un facteur déterminant les parts de marché des transports urbains dans la mobilité des personnes.
La densité de l’espace social est un ensemble de composantes de la substance définie, évalué du point de vue du positionnement des parts de marché des différents modes de déplacements, dans un milieu nous entourant et, proprement dit, créé par l'homme. La notion de “ densité ” est introduite dans l’estimation du travail (ou des efforts) minimal nécessaire pour faire changer la part de marché d’un mode de déplacement. Il est évident que de cette densité dépend la quantité de travail à prendre, puisque dans un milieu plus dense (voire plus résistant) nous faisons plus d’efforts pour obtenir un changement. Pourquoi déterminer une quantité minimale de travail à prendre ? Parce qu’on peut faire des efforts correspondant à une quantité de travail bien supérieure à celle minimale, mais le résultat sera bien inférieur à celui attendu. Les efforts effectués ne se composent pas seulement de moyens financiers ou, même, matériels, mais également d’autres efforts plus subjectifs : par exemple, faire changer l’opinion publique par rapport à la question qui nous intéresse : l'évolution de la répartition modale. Cette question nécessite, bien sûr, l'application des moyens monétaires, mais souvent elle représente le changement de la politique ou, même, de l’idéologie dominante. Donc, le cas échéant, pour réduire, par exemple, le trafic routier d’un quartier quelconque nous pouvons très simplement trouver la solution de le faire avec le minimum des moyens financiers - créer des clôtures pour des voitures aux entrées dans ce quartier. La perte de ces moyens financiers ne représente qu’une petite partie de quantité minimale de travail à effectuer. Il est toutefois indispensable dans ce cas d'ajouter d’autres efforts pour que, par exemple, ces clôtures ne soient pas cassées ou pour réprimer un mécontentement d’une bonne partie des habitants de ce quartier et non pas seulement d’eux. Une autre alternative moins abstraite serait d'améliorer les déplacements en transport collectif, accroître leur vitesse commerciale par rapport à celle de la voiture particulière. Une des mesures pour cela peut être de réduire l’espace octroyé aux automobilistes d'une part et, de l'attribuer aux transports en commun. Matériellement ces mesures peuvent être réalisées assez facilement, mais il est indiscutable que l’opinion publique sera en revanche hostile à de telles mesures et dans ce cas les efforts à faire pour faire évoluer cette opinion sont beaucoup plus difficiles à prévoir. Ainsi, souvent la quantité minimale de travail nécessaire n’est pas limitée par des moyens financiers ou matériels, mais bien au contraire d'autres composantes liées aux mentalités, aux modes de vie et habitudes de la population. Le problème qui mérite d’être envisagé plus en détail est celui de la correspondance entre la quantité de travail trouvée dans un modèle théorique et celle qui s'appliquerait à la situation réelle.
La notion “ densité de l’espace ”, en ce qui concerne la quantité de travail à effectuer, est relative elle-même. C’est-à-dire que, si on reprend notre sujet de choix modal, il faut définir la densité soit par rapport à l’usage des transports collectifs, soit à celui d’une voiture particulière. Donc, autant la densité de l’espace est relativement forte pour un changement de la position de la part de marché de l’usage des transports collectifs, autant elle est relativement faible pour un changement de la position de la part de marché de l’usage de l’automobile. Nous pouvons dire qu’a priori c’est notamment l’efficacité de la confrontation des quantités de travaux réalisées dans l’espace d’une certaine densité qui définit la position du choix modal des usagers des transports. Il est utile d’estimer l’efficacité des quantités de ces travaux et de faire des estimations théoriques sur la quantité minimale de travail nécessaire pour effectuer un changement désirable.
Un autre facteur exerçant une influence sur la densité de l’espace est le temps. Il est évident que la densité change avec le temps. Ceci a été observé, par exemple, dans l'évolution de l’industrie automobile, dont l’influence sur la population est actuellement importante, et non comparable, par exemple, avec celle des années 50 ou même 60. Donc, c’est un des facteurs qui joue sur le travail nécessaire pour diminuer la résistance de notre espace à l’intervention de l’automobile. Actuellement, par exemple, on peut voir la confrontation entre l’offre d’une voiture particulière et celle des transports en commun comme une partie des facteurs influençant le choix modal. Mais il faut noter que pour atteindre la qualité de l'offre de voiture particulière à nos jours, cette industrie a déployé une quantité énorme de travail, dont les résultats sont devant nous. D’autre part, la qualité de l’offre des transports en commun est aussi considérable mais la quantité de travail (nous omettons ici son efficacité) est insuffisante pour changer la tendance à l’augmentation de la part de marché de l’automobile. On peut dire que, d’une part, l’efficacité de la quantité de travail effectué définit la densité de l’espace, mais d’autre part la densité définit aussi la quantité de travail minimal nécessaire pour réaliser un changement désirable. C’est, donc, la dynamique du modèle.
Théoriquement la densité de l’espace représente une sorte de champ vectoriel, idéalement non stationnaire (dynamique) et avec un grand nombre de couches différentes définissant, proprement dit, sa “ densité ”. L’encyclopédie donne la notion suivante du champ physique : “ Entité décrite par l’ensemble des valeurs d’une grandeur physique, en général à plusieurs composantes, en tous les points de l’espace. D’ordinaire, le champ dépend aussi du temps (évolution du champ). On appelle couramment “ champ en un point et au temps t ” la valeur de la grandeur prise en un point et un instant déterminé. ” 75 . Nous allons donc faire une association entre la densité de l’espace décrivant, a priori dans notre cas, l’opinion publique d’un milieu social par rapport au choix modal, et la notion physique du champ pour avoir la possibilité d’utiliser l’appareil mathématique existant. Nous essaierons de présenter l’appareil mathématique théorique du positionnement d’un point dans le champ de force, tout d’abord le cas idéal et ensuite dans un cas intégrant des simplifications.
De plus, généralement, les forces existantes dans un champ dépendent des forces formant ce champ ainsi que des propriétés du point, qui, dans les champs physiques, peuvent être mesurées par la masse de ce point (le champ gravitaire), par la charge (les champs électriques et électromagnétiques), etc. On peut utiliser deux variantes pour la présentation de ce point : soit simplifier le modèle et poser les propriétés égales à 1 (il n’y aura donc que l'agrégation entre les forces des champs opposants), soit ce point peut être représenté comme une partie de carré présenté dans le graphique suivant.
Ce graphique exprime la situation pour l'ensemble d'usagers ou pour un individu moyen. Pour un individu réel, le carré ne se composera que des deux parties : M – en faveur soit de la VP, soit des TC, et C – aussi en faveur soit de la VP, soit des TC.
Le point définissant la position du choix modal d’un individu moyen est dissocié en deux composantes :
Dans le graphique 5.1 on a :
L’autre partie de carré exprime l'influence des deux champs des forces opposées. Donc, CVP est l'influence de la source des forces en faveur de l’usage de la voiture particulière et CTC est l'influence de la source des forces en faveur de l’usage des transports en commun.
Le carré lui-même montre la dynamique du choix modal d’un individu moyen, mais il se forme sous l’influence des facteurs du champ des forces définissant, dans notre cas, la densité de l’espace. Et ce carré est insuffisant pour trouver la quantité de travail nécessaire pour changer la position du choix modal (d’un point dans l’espace). Cela nécessite l'introduction du facteur de temps.
Le cas théorique général décrit la densité de l’espace comme fonction de l’ensemble de facteurs définissant l'espace et le temps :
Ensuite, nous allons définir les traits importants de la structure théorique du modèle (les graphiques 5.2 et 5.3 ci-dessous) :
Notre espace a toujours une densité homogène si l’on n’envisage qu’une ligne parallèle à l’axe Oy (PTC), c’est-à-dire pour Δt → 0. Cela signifie que la densité de l’espace ne dépend pas de la position de la part de marché des TC (la distance jusqu’à l’axe Ot), mais au contraire cette position dépend de la densité et est basée sur la quantité de travail efficace effectuée pour son changement. Et, il est évident qu’il existe une interdépendance entre le champ et les propriétés (une charge) du carré, mentionné plus haut, et exprimant, en réalité, la position d’un individu moyen par rapport au choix modal. Même si l’on prend les environs d’un point sur l’axe Ot avec Δt relativement important (non pas en fonction de l’échelle de l’axe Ot - plutôt de la situation réelle, son ampleur pouvant être discutée) on peut considérer la figure t0P0P1t1 comme un espace avec une densité homogène.
En premier lieu, il nous faut révéler les facteurs qui composent les couches de la densité de l’espace. Nous soulignons encore une fois que cette densité définit la possibilité (des efforts minimaux) et la quantité minimale de travail nécessaire pour faire varier la position, par exemple, de la part de marché des transports en commun par rapport aux autres modes de déplacements. Il s'agit donc d'un ensemble de facteurs définissant la position d’un individu moyen par rapport au choix modal.
En ce qui concerne la définition de la composante M – la composante psychologique – nous allons analyser les cas d’usage d’une voiture particulière et des transports en commun pour un même individu. La combinaison des conditions de transport (on les limite par l’influence des facteurs : le prix (p), où le prix ne représente que les coûts de l’usage direct de l’automobile pour son propriétaire, et le temps de déplacement (t)) forme une situation spécifique. Cinq situations principales, théoriquement possibles, peuvent être trouvées et envisagées (dans l’espace constitué par trois axes PTC, Δp et Δt) :
1) Le “ Point zéro ” : tVP = tTC et pVP = pTC, c’est-à-dire CVP = CTC. Ce point correspond à la situation d’égalité absolue des conditions. Il est évident que dans ce cas un usager choisira un mode de transport uniquement selon les critères de M. Ce cas ne peut pratiquement pas être rencontré dans la situation réelle : il est idéal pour définir les valeurs absolues des MVP et MTC, mais il ne donne pas encore la possibilité d’évaluer les valeurs des influences relatives des MVP et MTC. Du point de vue théorique le plus intéressant n'est pas spécifiquement ce “ point zéro ”, mais surtout les environs de celui-ci, c'est-à-dire en s’approchant de Δt = tVP – tTC > 0, Δp = pVP – pTC > 0 ainsi que de Δt = tVP – tTC < 0, Δp = pVP – pTC < 0. En plus, une analyse de la tendance de la courbe du partage modal dans ces environs donne la possibilité de définir les moindres valeurs absolues du prix et du temps pour un usager pendant le processus de choix.
A priori, le “ point zéro ” représente l’égalité des fonctions :
f(pVP + tVP) = f(pTC + tTC) ou
αpVP + βtVP = αpTC + βtTC.
Mais, si l’on ne prend pas des chiffres absolus (sans les coefficients α et β), la séparation des composantes MVP, MTC et CVP, CTC devient une tâche très difficile. Outre cela, la constante β est associée souvent avec la composante mentale, notamment avec MVP. Dans ce cas le rapport α/β est estimé comme la valeur du temps.
Puisque ce point suppose l’égalité des conditions on peut s’abstraire du fait que tout l’espace du choix modal sera partagé entre MVP et MTC , et alors la part modale peut être définie comme :
PTC = MTC et
PVP = MVP, c’est-à-dire
MTC + MVP = 1.
L’autre analyse, possible à effectuer, concerne la définition des moindres valeurs absolues du prix et du temps pour un usager (ainsi que pour leur ensemble) pendant le processus de choix. Théoriquement ce cas peut être exprimé par la résolution du système d'équations suivant (si l’on représente graphiquement l’évolution de la part de marché P – axe Oz – comme une fonction de Δp – axe Ox – et de Δt – axe Oy) :
L’espace est limité ici par Δp = ]-∞ ; 0][ et Δt = ]-∞ ; 0] pour l’usage préférable d’une voiture particulière et, respectivement, Δp = [0 ;+∞[ et Δt = [0 ; +∞[, - ce cas nous semble exceptionnellement théorique – pour l’usage préférable des transports en commun. Ce système d'équations peut exprimer la moyenne des valeurs absolues pour l’ensemble d'individus si l’on analyse l’ensemble d'observations, ou la valeur concrète s’il s’agit du comportement d’un individu. La résolution du système, si l’on envisage un modèle logit, donne l’ensemble des solutions exprimées par la ligne de dépendance entre Δp et Δt. Mais, si ce modèle est décrit par la formule logit symétrique, cette approche est plus que problématique, puisque le point d’inflexion de cette fonction est toujours égal à P = ½ sur le plan et, dans l’espace, P = ½ ce qui suppose ea+bΔp+cΔt = 1, donc a+bΔp+cΔt = 0 et Δp = (-a-cΔt)/b. L’application de la formalisation asymétrique du modèle logit laisse la possibilité de trouver, par cette méthode, les moindres valeurs absolues du prix et du temps qui peuvent, probablement, correspondre à la situation réelle.
Du point de vue géométrique la solution du système d'équations se situe sur la ligne le long de laquelle la surface de la fonction F = P(Δp, Δt) change la tendance de la concavité à la convexité. L’intérêt présente la différence (les normales) entre cette courbe et les plans Δp = 0 et Δt = 0. Simplifié, cela est montré dans le graphique ci-dessous.
Le point K marque théoriquement le passage de la concavité à la convexité d'une courbe de la part de marché pour définir les moindres valeurs du prix et du temps par rapport à l’usage dissuasif des automobiles.
2) “ Situation classique ”, donc tVP < tTC et pVP > pTC, c’est-à-dire le cas où il est, a priori, impossible de séparer l’influence de la composante MVP de celle de la valeur du temps. Cette situation est la plus répandue en pratique et la plus analysée par des investigations mathématiques.
3) “ Situation classique inverse ”, donc tVP > tTC et pVP < pTC, la situation très peu rencontrée pour les déplacements urbains. Ce cas est fréquent dans le choix entre les modes alternatifs d’un trajet à plus grande distance (avion – automobile, par exemple). Le cas peut être intéressant par le fait qu’ici la force mentale MVP n’est pas associée avec la valeur du temps, mais avec celle des coûts. Il est, quand même, aussi difficile d’estimer ici séparément la valeur de cette force.
4) “ Situation extrême positive ” - positive dans ce cas signifie par rapport à l’usage des transports en commun, donc tVP > tTC et pVP > pTC, c’est-à-dire les conditions complètement défavorables à l’usage d’une voiture particulière. C'est le cas idéal pour estimer la valeur de la composante MVP, puisque les conditions CVP prennent le signe négatif. Si on définit :
Δt = tVP – tTC,
Δp = pVP – pTC,
et puisque dans ce cas Δt > 0 et Δp > 0, cela veut dire que CVP devient négatif et fait baisser l’influence relative de MVP. Donc,
5) “ Situation extrême négative ”, le cas inverse du précédent où “ négative ” signifie par rapport à l’usage des transports en commun, donc tVP < tTC et pVP < pTC, soit des conditions complètement défavorables à l’usage des transports collectifs. Ce cas est également intéressant puisqu’il donne la possibilité d’évaluer la part de marché des usagers des transports collectifs qui n’ont pas d'accès à l’automobile. La formalisation mathématique est symétrique au cas précédent en dehors de l’asymptote de la courbe de la fonction f(CTC) qui ne sera pas l’axe (ou la surface) PTC = 0, puisqu’il existe toujours une partie des usagers qui ne peuvent jamais, pour des raisons objectives, refuser les services des transports en commun.
Nous pourrions aller plus loin et définir toutes les modifications possibles de la combinaison du temps et du prix (par exemple, tVP = tTC, pVP >pTC), mais il nous semble que ces cas sont des dérivées des situations mentionnées. De plus, nous décrivons systématiquement les conditions pendant l’analyse d’une situation quelconque.
Il est évident, que les parts “ mentales ” comme pour l’usage d'une voiture particulière, ainsi que pour l'usage des transports en commun doivent être définies pour l’ensemble d'usagers ayant la possibilité d'un choix alternatif entre ces modes de transport. Parfois il est difficile de révéler cette part pour certains usagers des transports collectifs qui ont les moyens financiers suffisants pour avoir l’automobile, mais ne l’ont pas en possession pour différentes raisons (aucun désir de l’utiliser, par exemple, etc.), donc des usagers qui ne sont pas inclus dans l’ensemble de ceux-ci ayant un choix alternatif.
Encyclopédie Universelle, V. 1, p. 658.
La composante psychologique a deux types de valeurs : la valeur absolue et la valeur de l'influence relative (sa part dans la somme des influences de C et de M) sur le choix modal. Cela sera envisagé plus en détail dans la partie 5.4.