4. La pédagogie de la médiation.

La pédagogie de la médiation est-elle sous-tendue par un projet au service de la vocation intégrative du sujet ?

La pédagogie de la médiation par le PEI vise la formation de l’intelligence, elle-même définie comme la capacité à utiliser ses ressources cognitives pour s’adapter et s’épanouir. La médiation est une qualité d’interaction dont l’étayage va permettre la découverte d’intelligence et le développement des aptitudes. A partir d’une tâche proposée dans le cadre du programme PEI, il y a une centration sur l’activité adaptative du sujet. Le médiateur s’interpose entre le stimulus que représente la tâche et l’organisme, selon la formule consacrée : S-H-O-H-R, de telle sorte que le PEI, s’adressant aux enfants ’déficients’ sur le plan cognitif et privés de ces expériences d’apprentissage médiatisées ( les E.A.M), puissent en bénéficier.

Dans la médiation il y a un principe éducatif majeur, celui de la pause. On s’arrête pour réfléchir ; selon l’adage, ’une minute, je réfléchis’. L’élève est considéré comme un sujet. Un temps est accordé à la ’discussion’, à propos de l’activité de tâche, à la parole échangée. On valorise l’intériorisation. Ainsi, la mise en mot de l’activité véhicule une thématisation d’expérience privée. L’interpellation surseoit à la poursuite et indique le retour sur soi. A l’issue de la séance, on sollicite, d’une autre manière, une prise de recul car, au regard de l’activité, on formule des principes, des lois. Le questionnement : Qu’est-ce que ? Pourquoi ? Comment ?, provoque la réflexion de l’expérience implicite, offrant une conscience d’être, chercheur de sens, manquant et puissant, a fortiori désirant. Celui-ci est ramené à la finalité de son travail selon un maintien de perspective. Le statut de l’échange est une provocation de ’naissance’. Il recouvre une attitude polémique.

La médiation est une position d’expectative. L’ intentionnalité du médiateur traduit à la fois le désir et l’espérance. Il y a, pour l’élève, une considération implicite de compétence, de telle sorte que lui est restituée une image positive de lui même comme de quelqu’un qui est capable de réussir, de progresser, ’Regarde, cette réponse que tu viens de donner ne pourra pas exister sans ta contribution 366 .

C’est la conception de la médiation pédagogique qui sert l’unification et l’expansion d’être personnel et réalise ainsi la vocation intégrative de l’apprenant.

Il existe donc, en-deçà des différences entre ces pédagogies, une unité de perspective qui positionne la personne au centre de la raison pédagogique. Plus encore, au-delà de cette analyse théorique, la personne ne représente-t-elle pas un enjeu et une valeur à ce point capitaux que des praticiens aussi divers dans leur pratiques et leurs convictions en font leur ancrage ?

Les enseignants se rejoignent par leur espérance commune de formation de la personne. Cette conviction s’appuie sur des principes ’essentiels’, qu’ils reconnaissent comme des fondations propres à la pédagogie qu’ils choisissent et à laquelle ils s’identifient. La pratique pédagogique est alors un moyen de mise en oeuvre, mais également de recherche et d’approfondissement d’une visée éducative personnaliste. Dès lors, compte-tenu de cette aspiration commune, pourquoi choisir de rallier telle pédagogie plutôt que telle autre ? N’y aurait-il pas une certaine fortuité du choix ? A l’appui des entretiens nous montrerons en réalité qu’il y a une certaine contingence de l’option préférentielle pour telle ou telle pratique pédagogique. Dès lors nous serons conduite à nous interroger sur l’essence de la pédagogie. N’est-elle pas intrinsèquement personnaliste ? Nous étudierons alors les fondements d’un personnalisme pédagogique, sur lequel notre thèse se conclut.

Notes
366.

Pédagogie de la médiation, op., cit, p. 155.