L’initiative de la création du centre oecuménique d’Elancourt-Maurepas a été prise au début des années soixante-dix par l’Etablissement Public d’Aménagement de Saint-Quentin-en-Yvelines en lien avec l’Association Diocésaine de Versailles et les Chantiers du Cardinal116.
« ‘L’Eglise Réformée de France a ensuite été associée au montage de ce projet’ », précise l’architecte Martine Deslandes, « la conception du centre oecuménique a été confié à mon mari, Philippe Deslandes, qui était architecte-en-chef du centre des Sept-Mares à Elancourt-Maurepas117. Il s’agit du seul édifice cultuel que mon mari et moi-même ayons conçu »118. « ‘Le souhait des responsables de l’E.P.A. de Saint-Quentin était de réaliser un édifice qui serve à la fois pour les catholiques et les protestants. On a demandé aux paroisses locales de déterminer en commun quels seraient leurs besoins afin de concevoir un projet commun aux deux confessions’ », confirme Madame Annie Poitrenaud, Présidente de l’association qui gère le centre oecuménique119, « ‘Un architecte d’Elancourt-Maurepas, membre de la paroisse catholique, a servi d’interlocuteur à l’E.P.A., maître d’ouvrage, pour faire valoir le point de vue des utilisateurs’ »120.
Selon Martine Deslandes, l’équipe paroissiale catholique souhaitait que l’édifice ressemble plutôt à un quelconque édifice industriel ou à un hangar et surtout pas à une église. « C’était une époque », se souvient-elle, « ‘où les responsables catholiques voulaient attirer les gens, leur montrer le chemin de l’église, car l’église faisait peur ’»121.
Afin d’ouvrir le centre sur la vie sociale du quartier des Sept-Mares, les responsables des deux communautés religieuses évoquèrent même l’éventualité de louer l’édifice le samedi soir pour le bal - on parlait du “bal des portugais”-, parce que cette communauté était très présente au début de l’édification de la ville nouvelle.
L’édifice a été conçu sur la base d’une structure de poteaux en béton armé dont la section est en forme de croix (fig. 30). Sur ces poteaux s’adossent les murs en brique apparente. L’ensemble du bâtiment, en rez-de-chaussée, est couvert de toits-terrasses (fig. 31 et 32). Les différentes pièces sont disposées autour d’une cour d’accueil centrale, transparente, qui permet d’apercevoir, derrière les baies vitrées, la distribution des locaux. On accède à ce patio depuis un parvis sur lequel donne l’entrée principale (fig. 33 et 34).
A droite du porche d’entrée se situe un oratoire ainsi qu’une pièce réservée au culte catholique sur laquelle s’ouvrent quatre salles de réunion. Ces salles de réunion sont occultables au moyen d’un dispositif de cloisons mobiles. Afin que ces locaux puissent accueillir les activités les plus variées, seul le petit oratoire, dédié au culte catholique, est consacré (fig. 35).
A gauche de la cour d’accueil sont disposés différents locaux utilisés par les membres de l’Eglise Réformée de France : salles d’aumônerie, cuisine, bureau et salle de culte (fig. 36).
« L’architecture permet un usage polyvalent de l’usage des locaux », observe Madame Annie Poitrenaud122. En effet, la salle dévolue à l’Eglise Réformée peut accueillir d’autres communautés religieuses comme la communauté israélite. D’autre part, l’ensemble des pièces munies de cloisons mobiles sert à de multiples usages, comme, par exemple, de salle de spectacle ou à des cours de soutien scolaire, de salle de réunion pour la communauté évangélique tzigane, ou encore pour des manifestations liées aux cultes catholique ou protestant.
Le projet a été conçu et dessiné aux alentours de l’année 1974. « ‘Le programme était intéressant en ce qu’il faisait se côtoyer protestants et catholiques dont les points de vue étaient extrêmement différents’ », remarque Martine Deslandes, « ‘ainsi les responsables de la communauté protestante souhaitèrent, pour des raisons de convivialité, disposer d’une cuisine. La communauté catholique s’est d’ailleurs associée à ce souhait. Les responsables de la ville nouvelle étaient toujours présents aux réunions concernant ce projet. Ces responsables de l’aménagement, n’étaient pas des gestionnaires, c’étaient des constructeurs’ »123.
La construction du centre oecuménique a débuté en 1976 et il a été inauguré en 1977. Un conseil d’administration, composé de douze membres appartenant pour moitié à chacune des communautés fondatrices – Eglise Catholique et Eglise Réformée de France -, dirige l’Association Oecuménique des Sept-Mares qui gère le fonctionnement des locaux. La paroisse protestante réformée a en charge 18% des locaux et des frais, le reste revenant à la paroisse catholique.
Une fois par mois se déroule une célébration oecuménique. D’autre part, le conseil d’administration oecuménique organise régulièrement des conférences. Ainsi, depuis plus de vingt années maintenant, le centre continue de fonctionner en conservant sa dimension oecuménique initiale.
Les projets et les réalisations de lieux de culte oecuménique sont demeurés relativement peu nombreux malgré l’intérêt suscité par cet aspect révolutionnaire de l’esprit conciliaire. Cela s’explique, en partie, par la difficulté de traduire dans un programme architectural unique des pratiques et des symboliques parfois opposées mais aussi par la complexité présentée par la gestion des espaces communs et la coordination de fonctionnements différents. Cependant, le développement de ce type de réalisation a sans doute été principalement freiné par les atermoiements de la hiérarchie catholique qui provoquèrent, au cours des années soixante-dix, la retombée de la ferveur initiale.
S. Robin, Eglises modernes, 1980, p. 155.
Martine et Philippe (décédé accidentellement en 1988) Deslandes furent les élèves de Louis Arretche (1905-1991), architecte chef d’atelier à l’Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts. Philippe Deslandes fut diplômé en 1961 et sa femme Martine en 1959.
Propos recueillis auprès de Martine Deslandes lors d’un entretien téléphonique avec l’auteur le 28 avril 2000.
L’Association oecuménique des Sept-Mares est présidée alternativement par un membre de chacune des deux communautés.
Propos recueillis à l’occasion d’un entretien téléphonique le 10 avril 2000. Madame Annie Poitrenaud Présidente du centre oecuménique des Sept-Mares à Elancourt m’a aimablement communiqué les plans de l’édifice.
Martine Deslandes, ibid.
Madame Annie Poitrenaud, ibid.
Martine Deslandes, ibid.