2. 3. 1. EXPERIENCES PRINCEPS

Tversky et Kahneman (1974) donnent deux exemples expérimentaux d'application de l'heuristique d'ancrage-ajustement.

2. 3. 1. 1. Exemple 1

Un des exemples retenus par Tversky et Kahneman consiste à estimer le pourcentage de nations africaines représentées dans l'Organisation des Nations Unies (ONU).

Dans l'expérience réalisée, une valeur initiale comprise entre 0 et 100 est déterminée par un tirage purement aléatoire à l'aide d'une roue de loterie. Dans un premier temps, les sujets doivent indiquer si le pourcentage de nations africaines à l'ONU (grandeur à estimer) est inférieure ou supérieure au nombre déterminé par la roue. Celle-ci est toutefois truquée, de telle manière qu'elle s'arrête invariablement sur le nombre 10 ou 65, selon les conditions expérimentales. Ensuite, ils doivent fournir une réponse plus précise, c'est-à-dire donner le pourcentage exact de nations africaines à l'ONU.

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Figure 13 — Principe et résultats de l'expérience de Tversky et Kahneman (1974).

Les résultats révèlent que l'estimation finale des sujets est fortement influencée par la valeur initiale. Comme le précise la figure 13, lorsque la valeur initiale est 10, l'estimation médiane est 25 ; lorsqu'elle est 65, l'estimation médiane devient 45. En d'autres termes, la valeur aléatoire fournie par l'environnement (10 ou 65) sert d'ancre, de point de référence, pour réaliser l'estimation, alors qu'elle n'est d'aucune utilité logique. Les sujets ajustent par après la valeur initiale (respectivement vers le haut et le bas) jusqu'à fournir leur estimation finale (i. e., leur estimation du pourcentage de nations africaines à l'ONU). Cet ajustement est toutefois insuffisant, de sorte que les estimations finales (25 et 45) sont biaisées dans le sens des valeurs initiales (10 et 65). Dans l'expérience de Tversky et Kahneman, la force de l'ancrage est même suffisamment marquée pour que des récompenses liées aux estimations correctes ne modifient pas ce phénomène.