III : Oralité et stratégies scripturales : problématique d’une lecture de l’oeuvre de Khaïr-Eddine.

Comment s’introduire dans une oeuvre, une réflexion, une sensibilité, faire part de l’aventure de l’écriture, exprimer le plus profond d’une rencontre en termes analytiques et académiques ? Le travail que nous livrons ici revendique une part de subjectivité et d’implication du critique dans son objet. Il n’oublie pas qu’on n’invente rien mais qu’on reformule à travers le prisme de sa subjectivité une relation avec l’oeuvre et à travers celle-ci avec la littérature et l’écriture.

Nous ne proposons certainement pas « la bonne lecture » de l’oeuvre de Khaïr-Eddine, l’énigme du texte restant entière et le discours critique totalement ouvert. Il s’agit pour nous de contribuer à la connaissance de l’oeuvre de Khaïr-Eddine par une « lecture sensible » et vue comme « partage d’un don », selon la belle expression de Khatibi. Cette lecture se pose aussi comme investissement et participation active, concevant l’écriture comme pratique langagière, invitant ainsi à une communication dialogique.

L’écriture est envisagée dans son rapport à l’oralité comprise dans les contours que nous avons tenté d’établir plus haut, dans ses dimensions anthropologique, linguistique et poétique, ainsi que ses extensions psychanalytique et identitaire. Il s’agit de montrer comment et pourquoi ce rapport est déterminant dans la démarche créatrice, la production de l’oeuvre et l’élaboration de l’esthétique de Khaïr-Eddine. Cette préoccupation pour la question de l’écriture et de l’oralitésous-tend une problématique qui tente de saisir le projet littéraire comme projet anthropologique et symbolique, esthétique et « poïétique», avec le sens et l’orientation psychanalytiques que Didier Anzieu donne à ce mot dans sa réflexion sur le processus de la création : Le corps de l’oeuvre 99.

Notes
99.

Didier ANZIEU. Le corps de l’oeuvre. Paris : Gallimard, 1981, p.

10-11.