3. Des agnosies visuelles particulières

Avec l’apparition du courant des neurosciences cognitives, les objectifs de la neuropsychologie ont évolué. La neuropsychologie vise désormais à mieux comprendre les mécanismes neurophysiologiques et la connectivité neuronale sous-tendant les différentes fonctions cognitives. En mettant l’accent sur l’étude de la signification des troubles, l’approche cognitive en neuropsychologie tente de tirer parti des déficits consécutifs aux atteintes cérébrales dans le but de comprendre l’organisation et le fonctionnement des processus mentaux chez le sujet sain. Il faut toutefois rester prudent sur les interprétations théoriques : d’une part, une zone corticale lésée ne signifie pas qu’elle est le siège de la fonction déficitaire mais seulement que son intégrité est nécessaire à la réalisation de cette fonction, d’autre part l’intégrité structurale d’une région d’un cerveau qui est par ailleurs lésé ne garantit pas son intégrité fonctionnelle. Cette prudence est d’autant plus nécessaire que les travaux issus de la neuropsychologie cognitive sont essentiellement fondés sur l’analyse de cas individuels, soulevant ainsi le problème de la légitimité d’utilisation des données issues d’observations individuelles pour élaborer des modèles cognitifs à portée plus générale (pour revue, Seron, 1993).

La nouvelle approche de la neuropsychologie cognitive appliquée au traitement des mots et des visages a largement contribué, d’une part à spécifier les opérations cognitives qui composent les processus complexes de lecture et de reconnaissance faciale chez les sujets normaux, d’autre part à éclairer le débat relatif aux spécialisations fonctionnelles hémisphériques. Nous définirons donc rapidement le concept d’agnosie visuelle avant d’en présenter une distinction en deux grandes catégories : les agnosies aperceptives et associatives. Nous exposerons ensuite les travaux de neuropsychologie cognitive sur les troubles de la lecture, en examinant les différentes formes de dyslexie, et sur la reconnaissance des visages, en décrivant une forme d’agnosie visuelle particulière, la prosopagnosie.