1.3. Rôle de la philosophie

Puisqu’il s’agit d’élaborer un projet de société rationnel, il faut s’assurer que cette démarche elle-même est valide. C’est là l’une des finalités de la partie de l’oeuvre que nous appellerons « philosophique » et « métaphysique », pour la différencier des recherches scientifiques. Toutefois, pour éviter toute confusion, il faut préciser qu’ici le terme philosophie ne désigne pas, en l’occurrence, la philosophie sociale ou la philosophie politique, et que nous l’entendons donc au même sens que Ginsberg dans l’introduction à « The Works of L. T. Hobhouse42 » :

‘In the field of philosophy proper he made extensive and original studies in logic and the theory of knowledge [...]. In his metaphysical writings he has attempted a comprehensive synthesis. (Ginsberg 99)’

Quoi qu’il en soit ces divisions demeurent superficielles puisque les préoccupations philosophiques de l’auteur sont inextricablement liées à l’élaboration de la pensée politique :

‘Thus the philosophical, the scientific, and the practical interest, however distinct in theory, tend in their actual operation to be intermingled, and it must be admitted that we cannot carry one through without reference to the other. (MTS 15)’

Pour illustrer notre propos, nous pourrions considérer l’enchaînement suivant à titre d’exemple : l’éthique sociale exposée dans The Elements of Social Justice correspond à un projet réaliste parce qu’elle tient compte de la réalité sociale, c’est-à-dire de celle de la société et de son composant, l’individu. Cette réalité nous est connue grâce aux recherches scientifiques. A leur tour, ces recherches sont valides parce qu’elles procèdent d’une méthode rationnelle qui a été elle-même définie dans l’épistémologie. Ainsi le projet politique se fonde sur la méthode qui consiste en une étude rationnelle de l’homme et de la société et, par conséquent, on trouve au second plan une analyse des conditions de la validité de la méthode d’étude elle-même. C’est donc tout logiquement que la philosophie (philosophy proper) et la métaphysique sont associées au projet politique, au même titre que la science. Cette association est l’illustration même de ce que Ginsberg nomme « ‘l’attitude de Hobhouse envers la science et la philosophie’ 43 » :

‘Throughout his work he insisted on the close relation between them. [...] The true function of metaphysics was to co-ordinate the underlying ideas of the sciences and of experience generally. (Ginsberg 105)’
Notes
42.

 M. GINSBERG, « The Works of L. T. Hobhouse », in Hobson/Ginsberg. Cette partie de l’ouvrage est désormais abrégée « Ginsberg ».

43.

 Ginsberg p. 105 : « Hobhouse’s attitude to science and philosophy ».