2.1.2. Absence de contradiction entre l’instinct et la raison

La démonstration prend ici la forme de l’observation du comportement humain. Il s’agit apparemment de déterminer si c’est l’impulsion (impulse) ou la raison qui déterminent l’action humaine. Il est intéressant de noter que les exemples nombreux évoquent tour à tour l’action de l’individu, l’action d’un groupe dans le cadre des institutions sociales et l’émergence des théories sociales et politiques. Ce parallèle est typique de la conception organique hobhousienne : l’auteur passe ainsi de la mère qui berce son enfant, soit dans le but conscient de le calmer, soit guidée par son instinct maternel, aux rites sacrificiels qui peuvent être interprétés soit comme la manifestation d’un instinct meurtrier, soit comme la recherche sincère d’une meilleure récolte agricole. Puis il interroge les motivations qui engendrèrent la formulation du concept de démocratie par les utilitaristes. Était-ce, dans ce cas précis, un instinct égoïste qui poussait la bourgeoisie à vouloir s’emparer du pouvoir ou bien le souhait de démocratie était-il la conclusion logique de principes éthiques ? C’est à dessein que l’auteur procède ici à une simplification de l’argument psychologique, de façon à établir un parallèle entre les exemples choisis qui semblera peu crédible au lecteur ; c’est, en effet, à son bon sens, comme souvent dans l’oeuvre, que l’auteur fait appel : « [...] ‘parmi les exemples que nous avons choisi le lecteur en aura trouvé certains bien plus convaincants que d’autres’ 50. »

En fait, l’usage de ces exemples est ici pédagogique. Il s’agit justement de démontrer que l’action humaine n’est en aucun cas imputable au seul instinct et qu’il faut au moins admettre que l’homme tend vers un comportement rationnel. A nouveau, la démarche est « réconciliatrice », puisqu’elle procède de la résolution d’une contradiction apparente. En effet, Hobhouse choisit d’affirmer la prépondérance de la raison dans la détermination d’une action, tout en reconnaissant qu’au regard de la psychologie il est impossible de nier les déterminations inconscientes ou instinctives51 :

‘Whether idea or impulse comes first may be difficult in a specific case to determine, but, whichever comes first, both in the end are equally essential to the developed purpose. (TRG 24)’

Notes
50.

 TRG 23 : «  [...] of the examples chosen above, the reader will probably have found some much more convincing than others.»

51.

 La confusion des deux concepts ; inconscient/instinct est la sienne.