chapitre 6
l’organisation politique

La politique de Hobhouse prétend donc partir de la liberté de l’individu qui est réconciliée avec le Bien Commun. Pour l’auteur, il ne s’agit pas là d’une pure spéculation. Il considère que les évolutions récentes de la politique anglaise reflètent la disparition de l’antithèse entre l’individu et la collectivité. L’individu est, désormais, réconcilié avec la société, puisqu’il est devenu (ou est en passe de devenir) conscient que son épanouissement aura lieu en son sein :

‘The development of the common life, the collective effort, which has already been in progress in my country for a generation or more, is not adverse to the freedom, the responsibility, or the dignity of the individual. On the contrary it has in the past assisted and may in the future be expected to further the development of these essential features of a good social order. A more real freedom, a more general and more complete personal independence, a more stable because a more free family life are among the prime objects of the extension of social control. (IS 164)’

Pourtant, force est de constater que si l’histoire témoigne d’un progrès, la société contemporaine est encore loin de l’idéal social hobhousien. Vers 1925279, Hobhouse fait le constat plutôt pessimiste que l’organisation sociale traditionnelle a échoué, mais n’a pas encore été remplacée.

‘Competition failed and we live among its debris with no established freedom of social co-operation to take its place, but with the struggles of organised capital and labour confronting us, and that in a world seething with racial and national passions and bristling with international dangers. (TP 272)’

Il est donc urgent de définir les modalités d’une nouvelle organisation sociale qui devra, cette fois, être effectivement de nature à permettre l’épanouissement de l’individu. C’est pourquoi « The Problem », l’un des derniers écrits de Hobhouse, recommande la mise en place d’une « coopération libre » (free co-operation). Un tel système offre de nombreux avantages : sur le plan politique d’abord, parce qu’il s’appuie sur la contribution des citoyens, devenus des « participants pratiques » (practical contributors)280 et repose sur l’idée de la réciprocité des droits et de devoirs énoncée dans le chapitre précédent :

‘[...] to make the rights and responsibilities of citizens real and living, and to extend them as widely as the conditions of society allow, is thus an integral part of the organic conception of society [...].(Lib 64, 65)’

La participation politique garantit, comme nous l’avons vu, à la fois la stabilité des institutions, en ce qu’elle traduit la volonté des citoyens, et une certaine souplesse parce qu’elle reflète l’évolution de cette dernière. L’économie aussi ne peut que bénéficier d’une participation active ; ainsi, les conséquences d’une coopération seront un accroissement de productivité et une meilleure répartition des biens, tandis que les efforts seront concentrés sur les besoins collectifs. Enfin, la coopération libre est propice à l’exercice de la liberté et, par là, au développement rationnel et moral de l’individu, ce qui est conforme aux intérêts du Bien Commun.

Notes
279.

 La date exacte de l’écriture de « The Problem » n’est pas connue. Toutefois Hobson précise qu’il s’agit d’un texte que Hobhouse avait écrit pour servir de chapitre d’introduction à un ouvrage collectif. Le projet ne fut pas mené à bien à cause de la mort de Hobhouse.

280.

 Lib p. 64.