1.2. Les intérêts catégoriels

Fidèle à la grande tradition libérale, l’auteur pensait que la politique devait être dégagée des intérêts catégoriels (sectional interests). Le parti travailliste, au contraire, était précisément l’incarnation de ce danger, s’il devait s’avérer être seulement le parti des travailleurs. Hobhouse était donc d’autant plus partisan d’une politique de réformes sociales qu’elle lui semblait être le moyen d’éviter que les classes laborieuses ne se tournent vers un parti des travailleurs catégoriel et, de par l’extension du suffrage, ne fassent, à terme, basculer le pouvoir dans le camp de leurs intérêts propres. Dès 1892, il appelait, dans un article du Speaker290, le parti libéral à se débarrasser de ses propres intérêts catégoriels pour permettre l’intégration des nouveaux électeurs dans ses rangs. On trouve, au demeurant, la même méfiance envers les intérêts catégoriels dans sa critique de la notion de lutte des classes. Hobhouse reconnaît, donc, que « les conséquences de l’association peuvent être à double tranchant, d’un côté, elles peuvent restreindre la liberté et de l’autre, l’augmenter291 ». L’association volontaire est souhaitable tant qu’elle ne revient pas à une division de la collectivité et qu’elle s’inscrit dans la perspective du Bien Commun. Par conséquent, les associations ne doivent pas devenir des corporations, et l’égalité exige qu’elles restent libre d’accès : elles ne peuvent pratiquer la sélection de leurs membres en fonction de leur naissance, de leur classe sociale ou de leur sexe. Si certaines associations n’ont pas pour finalité d’être ouvertes à tous, ses critères de sélection devront rester justes. Une association de commerçants, par exemple, doit autoriser tous les commerçants à adhérer, de même qu’un syndicat doit être d’accès libre pour tous les travailleurs de sa branche. L’égalité des chances (opportunities) contenue dans la liberté sociale requiert, notamment, que l’éducation et les carrières soient accessibles à tout un chacun.

Notes
290.

 Voir Freeden I p. 126.

291.

 Lib p. 68 : « the effect of combination may be double-edged, that it may restrict freedom on one side and enlarge it on the other. »